SIXIEME PARTIE :

LE FOIE

 

 

 

Avec la collaboration de B. GULBIS


CHAPITRE I : INTRODUCTION

I.         ANATOMIE

A.        ANATOMIE MACROSCOPIQUE

 

Le foie est irrigué par une double circulation sanguine :

·        veineuse qui, via la veine porte, y amène le sang récolté par les vaisseaux intestinaux (veines mésentériques) et coeliaques.

·        artérielle par l’artère hépatique, branche du tronc coeliaque.

 


Le sang est drainé par les veines sus-hépatiques qui résultent de la fusion des veines sublobulaires.

Figure 1

 

La circulation de bile s’effectue par les canaux biliaires qui forment dans le foie un réseau arborescent parallèle à la circulation sanguine.

L’anatomie chirurgicale du foie divise l’organe en 8 segments. Le lobe gauche comprend les segments II et III. Le foie gauche comprend en outre les segments I et IV. Il y a donc une différence entre l’hépatectomie droite ou gauche (qui est basée sur la notion de foie droit et gauche) et la lobectomie hépatique droite ou gauche (qui est basée sur la notion de lobe droit ou gauche).

B.        ANATOMIE MICROSCOPIQUE

 

Il faut distinguer l’acinus hépatique et le lobule hépatique.

 

L’unité morphologique élémentaire est l’acinus de Rappaport qui est construit autour de la triade portale (artère, veine porte, canal biliaire) et forme autour de cette dernière une petite masse de forme analogue à une petite baie. On y distingue classiquement 3 zones (1,2,3) dont l’oxygénation est différente. Le sang de la branche veineuse se distribue dans l’acinus. Le sang artériel (à faible débit) arrive sous forte pression et se mêle au sang veineux au niveau des sinusoïdes hépatiques par un réseau de shunts, entraînant un effet de chasse qui favorise la circulation. Le sang  est mieux oxygéné au centre de l’acinus (zone 1) qu’en périphérie zone 3), ce qui explique la répartition inégale de certaines lésions parenchymateuses. Le drainage de l’acinus se fait en périphérie par le réseau des veines collectrices qualifiées de veineuses centro-lobulaires.

Figure 2

 

 


Figure 3

 

 


Le lobule hépatique (en pointillé) est axé sur la veine centro-lobulaire (VCL). Il est délimité en périphérie par les espaces portes (EP). Le lobule hépatique ne constitue pas une unité fonctionnelle mais doit être considéré comme une subvision anatomique du foie.

 

A l’intérieur de l’acinus, les hépatocytes (CH) se disposent en un réseau complexe de cloisons, perforés par les sinusoïdes et les canaux biliaires (CB) de drainage. En coupe ces cloisons se présentent sous forme de lames unistratifiées séparées les unes des autres par les sinusoïdes dont la structure est complexe. Leur endothélium (CE) est largement fenêtré, il ne repose sur aucune membrane basale. Il est séparé des hépatocytes par l’espace de Disse (ED) dans lequel on trouve des fibroblastes, des neurones et des cellules chargées de stocker de la vitamine A (cellules de ITO) (CI). Des cellules macrophagiques nombreuses (cellules de Kupffer) (CK) accolées à l’endothélium flottent dans la lumière du sinusoïde. Elles sont douées d’une importante capacité de phagocytose.

 

 


 


Figure 4

 

 

II.        FONCTIONS DU FOIE ET SES ALTERATIONS

A.        LES FONCTIONS METABOLIQUES

 

Le foie joue un rôle absolument central dans le métabolisme des trois nutriments de base (protéines, lipides et hydrates de carbone), ainsi que de la plupart des vitamines et de certains oligo-éléments. Ce rôle est assuré par la captation et la conversion de molécules et de particules (provenant de l’absorption intestinale et du métabolisme du tractus digestif et apportées par la veine porte ou mobilisées à partir des tissus périphériques - et amenées par l’artère hépatique), ainsi que par la production et la sécrétion de nouvelles molécules et particules.

 

1.         Métabolisme des protéines

a. Conditions normales (rappel)

 

Le foie joue un rôle central dans le métabolisme des acides aminés et des protéines. En effet, cet organe prend en charge la synthèse de la majeure partie des protéines circulantes, transforme les acides aminés en substrats énergétiques (glucose et corps cétoniques) et assure l’épuration de l’azote excédentaire.

 

(1)     Synthèse et sécrétion des protéines

 

Le foie synthétise et sécrète la plupart des protéines fonctionnelles (ou protéines viscérales) présentes dans le sang : l’albumine (transport d’hormones, d’acides gras libres, du calcium,…), la transferrine (transport du fer), la céruloplasmine (transport du cuivre), la transthyrétine ou préalbumine (transport de la thyroxine), la « rétino-binding protein » ou RBP (transport de la vitamine A), des facteurs de coagulation, etc.

 

La synthèse de ces protéines est dépendante de la disponibilité en précurseurs (les acides aminés) et en zinc. Cette synthèse est réprimée par des médiateurs (cytokines) synthétisés notamment par les cellules du système réticulo-endothélial, qui induisent l’activation de l’ARN d’autres protéines caractéristiques de la réaction inflammatoire.

 

(2)     Formation de substrats énergétiques

 

L’oxydation directe de certains acides aminés conduit à la génération d’énergie, mais ce processus est quantitativement (et qualitativement) limité. En fait, les acides aminés constituent des substrats énergétiques essentiellement au travers de leur transformation en glucose, et dans une bien moindre mesure en corps cétoniques.

 

On appelle gluconéogenèse la synthèse de glucose à partir de précurseurs non glucidiques. En théorie, la plupart des acides aminés sont gluconéogéniques. En pratique, ce rôle est rempli surtout par l’alanine (ainsi que par la proline et la glycine). D’un point de vue énergétique, la gluconéogenèse à partir d’acides aminés est un processus peu rentable puisque 1,72 g d’acides aminés est sacrifié pour produire 1 g de glucose. Chez l’homme sain, la gluconéogenèse est heureusement peu mise à contribution puisqu’en période interprandiale la glycogénolyse fournit l’essentiel du glucose nécessaire aux tissus extra-hépatiques.

 

La cétogénèse (ou production de corps cétoniques) est théoriquement possible à partir de certains acides aminés ramifiés, mais ce processus est quantitativement très limité chez l’homme. Par contre, le foie transforme en corps cétoniques les acides a-cétoniques produits dans les tissus périphériques à partir d’acides aminés ramifiés.

 

b. Conditions pathologiques

 

(1)   Synthèses protéiques

 

Des atteintes importantes du parenchyme hépatique vont avoir des conséquences fonctionnelles, telles qu’une diminution de synthèse des protéines viscérales, et, à terme par une réduction de production des facteurs de coagulation. Cette dernière complication peut également se rencontrer dans les pathologies cholostatique et est alors consécutive à une malabsorption de vitamines liposolubles (notamment la vitamine K).

 

Lors d’états de dénutrition, la diminution d’apports d’acides aminés à partir du tube digestif entraîne une diminution de la synthèse des protéines viscérales par le foie. La concentration plasmatique des protéines diminue en fonction de leur demi-vie. Ainsi, la concentration d’albumine (1/2 vie : 20 j) est un bon marqueur de la dénutrition chronique, compte tenu de son importance quantitative dans le plasma. Par contre, à court terme, les modifications de concentrations d’albumine reflètent surtout des changements de son espace de distribution ; dans ces conditions, la RBP (1/2 vie : 12 h) et la préalbumine (1/2 vie : 48 h) représenteront de bien meilleurs marqueurs de la dénutrition aiguë ; notons cependant que la concentration de ces protéines, surtout de la RBP, est augmentée en cas d’altération de la fonction rénale. La concentration de transferrine (1/2 vie : 7 j) est également utilisée comme paramètre de l’état nutritionnel, mais elle est influencée par la concentration de fer.

 

Dans les états inflammatoires (aigus ou chroniques) après un traumatisme et au cours de phénomènes septiques, la production de cytokines inflammatoires (interleukine ou IL 6, IL 1 et « tumour necrosis factor » ou TNFa) induit une diminution de synthèse des protéines viscérales, au profit de protéines dites de phase inflammatoire, comme la « C reactive protein » ou CRP, l’a-1glycoprotéine, l’a-1 antirypsine, l’haptoglobine, le fibrinogène, etc. Ces protéines possèdent des propriétés utiles pour la réponse contre l’agression, par exemple l’opsonisation.

 

(2)   Gluconéogenèse

 

La gluconéogenèse à partir d’acides aminés est utile pour fournir le glucose indispensable au métabolisme énergétique de certains tissus spécifiques, après l’épuisement des réserves hépatiques de glycogenèse, soit après un jeûne prolongé sur plus de 24 à 48 h. Ce processus peut être perturbé au cours de dommages hépatiques très sévères, comme l’hépatite fulminante.

 

Dans les états de dénutrition chronique survenant en dehors d’agressions, l’importance quantitative du la gluconéogenèse tend à s’atténuer avec le temps, en raison de la mise en route de mécanismes d’épargne, comme la diminution des dépenses  énergétiques et l’utilisation de corps cétoniques. Ces derniers mécanisme n’interviennent pas dans les états d’agression, où les besoins énergétiques sont nettement accrus (et notamment les besoins en glucose au niveau des tissus de cicatrisation) et où la cétogenèse est inhibée. Dans ces circonstances, la gluconéogenèse est véritablement emballée, et au contraire de ce qui est observé dans les situations courantes, les perfusions de glucose (même en quantité élevée, soit > 200 j) ne parviennent plus à l’inhiber. La mobilisation d’acides aminés par protéolyse musculaire est stimulée, non seulement par les besoins en glucose à couvrir par la gluconéogenèse mais également par les besoins accrus en glutamine au niveau de la muqueuse intestinale et des cellules immunitaires, ce métabolisme libérant de grandes quantités d’alanine.

 

(3)   Altérations du métabolisme des protéines et des acides aminés liés à des pathologies hépatiques

 

La cirrhose est souvent associée à un état de dénutrition protéique. Dans cette pathologie, on observe souvent une altération du profil des acides aminés plasmatiques, caractérisée par une élévation des acides aminés aromatiques (phénylalanine, tyrosine, tryptophane) et une diminution des ramifiés (valine, leucine, isoleucine, lysine).

 

Une insuffisance hépatocellulaire sévère est toujours associée à une production réduite des protéines viscérales, et les états les plus graves à une synthèse diminuée des facteurs de coagulation. Ceci explique l’importance de maintenir des apports protéiques normaux

(0,75-1g/kg de poids) aux malades, à l’exception des états d’encéphalopathies hépatiques. Dans ces cas, on s’efforce de diminuer la production de dérivés protidiques neurotoxiques en limitant drastiquement les apports protéiques (20 à 40 g/j), et de réduire leur absorption en diminuant le pH colique (par des fibres ou du lactulose).

 

2.         Métabolisme des hydrates de carbone

a. Conditions normales (rappel)

 

Ce rappel sera succinct. Le métabolisme hépatique des hydrates de carbone consiste en la formation et le dépôt de glycogène pendant la période postprandiale et sa mobilisation pendant les périodes interprandiales. Dans les conditions normales, ces mécanismes, qui sont régulés par l’équilibre entre l’insuline d’une part et le glucagon et l’adrénaline d’autre part, règlent de façon très précise l’homéostasie glycémique. Comme mentionné plus haut, le processus du gluconéogenèse à partir des substrats non glucidiques (alanine, lactate, pyruvate, glycérol) reste alors limité. La quantité de glycogène déposé ne dépasse normalement pas 5% du poids du foie, et l’excédent de substrats glucidiques est converti en acides gras sous l’action de la lipogenèse.

 

b. Conditions pathologiques

 

Nous ne considérerons pas ici les pathologies liées à un déficit enzymatique congénital : glycogénoses, galactosémie, intolérance au fructose, ...

 

L’altération du métabolisme glucidique la plus fréquemment rencontrée dans les hépatopathies consiste en la résistance à l’action de l’insuline et l’état de diabète des malades cirrhotiques, d’où l’utilité d’enrichir leur alimentation en hydrates de carbone complexes et en fibres.

 

Une complication plus rare, mais redoutable est l’hypoglycémie des malades présentant une insuffisance hépatocellulaire aiguë (cf. plus loin l’hépatite alcoolique grave).

 

Notons encore que les malades en état d’agression présentent une résistance à convertir un excès d’apports glucidiques en graisses et qu’une alimentation hypercalorique peut entraîner chez eux une accumulation de glycogène (et d’eau), provoquant ainsi une hépatomégalie et une altération des fonctions du foie.

 

3.         Métabolisme des lipides

a. Conditions normales (rappel)

 

Le foie se trouve également jouer un rôle très central dans le métabolisme des lipides et des lipoprotéines. C’est en effet au niveau hépatique que s’effectue l’essentiel de la lipogenèse (conversion de glucides excédentaires en acides gras et leur estérification en triglycérides), de la cholestérogenèse, et de la cétogenèse.

 

Par ailleurs, le foie fait partir des tissus spécialisés ayant acquis la capacité d’assurer l’élongation et la désaturation des acides gras essentiels, transformant ainsi les acides à 18 atomes de carbone des végétaux (terrestres et marins) en dérivés polyinsaturés.

 

Le parenchyme hépatique intervient aussi largement dans le métabolisme des lipoprotéines, en produisant des enzymes-clés (comme la lipase hépatique, la « lecithin cholesterol acyltransferase » ou LCAT, et la « cholesteryl ester transfer protein » ou CEPT. Il est prioritairement impliqué dans la captation des particules résiduelles provenant du métabolisme périphérique des chylomicrons intestinaux. De plus, c’est par les hépatocytes qu’est produite l’apoprotéine B-100 qui est incorporée à la surface des lipoprotéines à très faible densité ou « VLDL » et c’est au niveau du foie qu’intervient la captation des lipoprotéines à densité intermédiaire ou « IDL », ou leur conversion en lipoprotéines à faible densité ou « LDL », ainsi que la captations prioritaire de celles-ci. Le foie participe, avec l’intestin, à la formation et la sécrétion des lipoprotéines à haute densité ou « HDL », mais aussi dans la rétroconversion des HDL2 en HDL3 (via l’hydrolyse de différents composants lipidiques par la lipase hépatique), et vraisemblablement dans la liaison et la captation de HDL par des récepteurs spécifiques. Enfin, le foie joue un rôle essentiel dans la récupération des vitamines liposolubles et leur remise en circulation dans des nouvelles VLDL.

 

b. Conditions pathologiques

 

(1)   La stéatose hépatique

 

Les principaux facteurs causant un engorgement du foie en triglycérides ou stéatose hépatique sont : un apport accru d’acides gras (d’origine exogène ou endogène), une stimulation de la lipogenèse hépatique, et une production réduite d’apoprotéine B-100.

 

Par définition, un apport exagéré d’acides gras exogènes résulte de prises alimentaires excessives et est associée à un excès pondéral.

 

Une augmentation d’apports d’acides gras endogènes provient d’une stimulation de leur mobilisation à partir des tissus adipeux sous l’action de facteurs aussi divers que : les catécholamines (dans les états de stress), des glucocorticoïdes (dans le syndrome de Cushing ou lors de traitements à base de stéroïdes), des cytokines cachectisantes comme la TNFa (dans les « wasting diseases », d’une résistance à l’action de l’insuline (dans le diabète, mais aussi communément présente dans la cirrhose), et dans la dénutrition calorique.

 

La lipogenèse hépatique est stimulée par une consommation importante d’alcool, un excès d’apports en hydrates de carbone, l’action de cytokines (comme le TNFa et l’interleukine-1), et divers agents toxiques (comme le CCl4 et certains médicaments).

 

La production d’apo B-100 est diminuée dans les états de résistance de l’action de l’insuline, la dénutrition protéique grave, et l’insuffisance hépatocellulaire sévère. Dans une proportion importante de cas aboutissant également à la stéatose, la production totale d’apo B-100 peut être stimulée, mais dans des proportions insuffisantes que pour compenser l’importante production hépatique de triglycérides.

 

(2)   Altération du profil en acides gras essentiels dans les pathologies hépatiques

 

Dans les insuffisances hépatocellulaires sévères, on observe fréquemment une carence en acides gras essentiels à chaînes longues (³ 20 atomes de carbone) des 2 lignées en n-6 et n-3. Cette anomalie reflète une altération du processus d’élongation-désaturation, et est parfois aggravée par des apports alimentaires insuffisants ou, plus fréquemment, une nutrition artificielle inadéquate. La composition en acides gras de nombreuses membranes cellulaires est alors modifiée, ce qui peut entraîner des perturbations importantes du fonctionnement membranaire et du métabolisme cellulaire.

 

(3)   Altérations du profil des lipoprotéines plasmatiques dans les hépatopathies

 

Les multiples implications du foie à différents niveaux du métabolisme des lipoprotéines laissent deviner l’hétérogénéité et la complexité des altérations observées.

 

La stéatose est fréquemment accompagnée d’une élévation importante des triglycérides plasmatiques, présents dans les VLDL à un stade précoce, mais aussi dans les IDL à un stade plus avancé de l’insuffisance hématocellulaire (ceci étant lié à une altération de la lipase hépatique).

 

Dans les cas aigus d’insuffisance hépatocellulaire, la production d’apo B-100 n’est plus assurée et l’on peut observer une hypobêtaliprotéinémie (effondrement des VLDL et des LDL) particulièrement inquiétante chez l’enfant nouveau-né (parce qu’associée à une grave carence en vitamine E). Dans ces états, on peut également observer une diminution de production d’apo A-I et (surtout) d’apo A-II, accompagnant une diminution des HDL plasmatiques (alors que la consommation chronique d’alcool en quantités modérées est associée à des taux élevés d’HDL).

 

Le profil lipoprotéinémique le plus souvent observé dans l’insuffisance hépatocellulaire chronique résulte d’une réduction d’activité de la LAT et de la CETP, et est caractérisé par une diminution des VLDL et des HDL (qui sont pauvres en cholestérol estérifié et en HDL3). La concentration des LDL est souvent normale, mais celles-ci sont enrichies en triglycérides et appauvries en cholestérol estérifié. La dénutrition aggrave souvent la réduction du cholestérol qui représente un index pronostique intéressant.

 

La cholestase est généralement associée à une concentration augmentée de tous les composants lipidiques du plasma : triglycérides, cholestérol (mais la fraction libre), et phospholipides, ces deux derniers refluant dans la circulation avec la bile. L’activité réduite de la lipase hépatique entraîne une augmentation des IDL (liée à une diminution de leur catabolisme) et une augmentation des HDL2 par rapport aux HDL3 (liée à une diminution de la rétroconversion). Enfin, l’association à la cholestase d’une réduction d’activité LCAT aboutit à la formation d’une lipoprotéine particulière, la lipoprotéine X, qui est trouvée dans la fraction de densité des LDL, et consiste en un assemblage de phospholipides et de cholestérol avec des apo C et de l’albumine.

 

4.         Métabolisme des vitamines et micronutriments

 

Nous ne considérerons ici que les altérations (carences ou surcharges) en vitamines et oligo-éléments rencontrés dans le cadre des hépatopathies.

 

a. Vitamines hydrosolubles

 

Des carences en vitamines hydrosolubles sont couramment rencontrées chez les malades présentant une insuffisance hépatocellulaire, généralement en association avec l’alcoolisme et la dénutrition. La carence en acide folique est associée à l’anémie mégalocytaire. La carence en thiamine (vitamine B1) est fréquente chez les alcooliques et est la cause du syndrome de Wernicke-Korsakoff, de la cardiopathie du béribéri, et probablement de la polyneuropathie. Des troubles neurologiques, hématologiques et dermatologiques sont souvent liés à une carence en pyridoxine (vitamine B6) et à une altération de son métabolisme.

 

Il convient de contrôler ces 3 vitamines chez les malades alcooliques (en présence ou non d’une insuffisance hépatocellulaire) et de considérer leur supplémentation.

 

b. Vitamines liposolubles

 

Les carences en vitamines liposolubles sont généralement rencontrées dans les pathologies cholostatiques où elles sont causées par une malabsorption des graisses. La vitamine A doit généralement être supplémentée (5.000 - 15.000 Ul/j) chez les cirrhotiques non alcooliques ; par contre, il convient d’être prudent dans les pathologies alcooliques où la toxicité de la vitamine A est augmentée (cf. plus loin).

 

La carence en vitamine D est associée à l’ostéoporose et à l’ostéopénie fréquemment présentes chez les cirrhotiques. Cependant, la supplémentation (100-300 µg/j de 25-OH D3) n’améliore pas toujours ces altérations osseuses. La carence en vitamines E (a-tocophérol) peut avoir des conséquences dramatiques (altérations neurologiques et rétiniennes) dans l’hépatopathie sévère du nouveau-né. Bien que le rôle important de la vitamine E comme agent protecteur contre les dégâts peroxydatifs soit bien établie, on ne dispose pas actuellement de suffisamment de données que pour recommander sa supplémentation en routine dans la cholestase de l’adulte.

 

La carence en vitamine K est connue depuis longtemps pour être responsable d’un allongement du temps de prothrombine, et l’efficacité de la supplémentation est bien étayée.

 

c. Les oligo-éléments

 

Une surcharge en cuivre est rencontrée non seulement dans la maladie de Wilson, mais aussi dans les états cholostatiques. Une surcharge en fer est rencontrée dans l’hémochromatose génétique, mais aussi dans la cirrhose alcoolique (cf. plus loin), les maladies hémolytiques, et les malades en hémodialyse chronique (du moins avant l’utilisation régulière de l’érythropoïétine). Ces métaux (cuivre et fer) représentent de puissants agents prooxydants qui peuvent induire ou aggraver les dommages liés à la peroxydation lipidique.

 

Une carence en zinc est fréquemment rencontrée dans les hépatopathies alcooliques. Rappelons-nous du rôle important du zinc dans les synthèses protéiques, ainsi que de son influence sur le maintien de l’immunité cellulaire.

 

B.        LA FONCTION BILIAIRE

1.         Métabolisme de la bilirubine

a. Origines de la bilirubine

 

La bilirubine résulte du catabolisme d’hémoprotéines dans le système réticulo-endothélial.

 

L’hémoglobine libérée lors de la destruction physiologique des globules rouges, en est la source principale (± 80%). Environ 20% de la bilirubine provient d’hémoprotéines d’origine hépatique ou rénale (catalase, peroxydase, myoglobine, cytochrome P450, ...), et moins de 3% de la bilirubine provient d’une érythropoïèse inefficace (érythrocytes détruits dans la moelle avant leur libération).

 

b. Métabolisme normal de la bilirubine

 

La bilirubine se lie avec une forte affinité à l’albumine. La bilirubine étant liposoluble et liée à l’albumine ne passe pas dans les urines même si sa concentration sérique est élevée.

 

Le foie est l’unique organe qui a la capacité d’éliminer la bilirubine de la circulation sanguine. La bilirubine est captée par les cellules parenchymateuses du foie alors que l’albumine reste dans le plasma.

 

Dans l’hépatocyte, la bilirubine est liée à la ligandine et est transportée jusqu’au réticulum endoplasmique où elle est conjuguée à de l’acide glucuronique par l’UDP-glucuronosyl-transférase ce qui conduit à la transformation séquentielle de la bilirubine en dérivés mono- et diglucuroconjugués. Cette conjugaison peut être induite par le phénobarbital.

 

La bilirubine conjuguée est à nouveau transportée par une ligandine jusqu’au pôle canaliculaire de l’hépatocyte où elle est excrétée par un transporteur actif. Ce transporteur a une capacité limitée ce qui entraîne une limite à la captation de l’hémoglobine par l’hépatocyte. 85% de la bilirubine conjuguée est excrétée dans la bile, le reste reflue dans le sang.

Dans l’intestin, la bilirubine conjuguée subit un catabolisme par des enzymes d’origine bactérienne et la majeure partie de la bilirubine est transformée en urobilinogènes. Le cycle entéro-hépatique de la bilirubine est mineur. Les urobilinogènes fécaux sont transformés en stercobiline qui donne aux selles leur couleur caractéristique. Une faible partie des urobilinogènes est réabsorbée par l’intestin. Une fraction est éliminée dans les urines.

 

Les glucuronides de la bilirubine sont solubles dans l’eau et apparaissent dans les urines lorsque le niveau plasmatique est augmenté.

 

c. Pathologie du métabolisme de la bilirubine

 

(1)   Production augmentée de la bilirubine

 

En cas d’hémolyse, les quantités de bilirubine produites dépassent les capacités de captation des hépatocytes et conduit à une accumulation de bilirubine non conjuguée dans le sang. Il n’y a pas de bilirubine (urines jaunes) dans les urines.

 

(2)   Déficit en glucuronyl transférase

 

Un déficit en glucuronyl transférase conduit à une accumulation dans le sang de bilirubine non conjuguée. Un tel déficit est observé dans les maladies de Gilbert (fréquente) et de Crigler-Najjar (rare).

 

(3)   Défaut du transport canaliculaire de la bilirubine conjuguée

 

La nature exacte du défaut est mal connue. On observe une accumulation de bilirubine directe et conjuguée. Ils surviennent dans la maladie de Dubin Johnson (rare) et la maladie de Rotor (très rare).

 

(4)   Obstruction biliaire

 

On observe une augmentation du taux de bilirubine portant principalement sur la fraction conjuguée. De la bilirubine conjuguée est présente en grande quantité dans l’urine (urines porto).

 

(5)   Altération des hépatocytes (hépatite, cirrhose)

 

Les hépatocytes continuent à conjuguer la bilirubine, mais l’excrétion est diminuée ou abolie. Comme dans le cas précédent, de la bilirubine s’accumule principalement sous forme conjuguée avec présence d’une bilirubine conjuguée.

 

BIOCHIMIE DES ICTERES

ETIOLOGIE

BILIRUBINEMIE

BILIRUBINURIE

Hémolyse

Ý non conjuguée

Absente

ß Glucuronyl-tr.

Ý non conjuguée

Absente

Hépatite

Ýmixte

Présente

Obstruction

Ýmixte

Présente

 

 

2.         Métabolisme des acides biliaires

a. Métabolisme normal

 

Le foie synthétise de l’acide cholique et désoxycholique à partir du cholestérol. Cette synthèse est contrôlée par la quantité de sels biliaires réabsorbée au niveau de l’iléon. Elle est inversement proportionnelle à la quantité d’acides biliaires traversant le foie par unité de temps. Ces acides sont conjugués (à la taurine et à la glycine) et éliminés dans la bile sous formes de sels de Na. Après le repas, des quantités importantes de sels biliaires passent dans l’intestin. 80% de ces sels biliaires sont déconjugués et réabsorbés au niveau de l’iléon. Ce cycle entéro-hépatique se produit plusieurs fois par jour. Il explique que bien que le pool des sels biliaires soit peu important (2 à 3 g), 25 à 30 g de sels biliaires sont sécrétés dans la bile par 24 heures. Les acides biliaires sont indispensables à la digestion et à l’absorption des graisses alimentaires. Ils sont nécessaires à la sécrétion de la bile par l’hépatocyte.

 

Les sels biliaires non absorbés dans l’iléon sont déconjugués et déshydroxylés par les bactéries du côlon produisant de l’acide déoxycholique, de l’acide lithocholique et de l’acide ursodésoxycholique.

 

b. Pathologie

 

D’une manière générale, une augmentation du taux de sels biliaires dans le sérum et les urines apparaît dans les affections hépatiques (obstruction des voies biliaires et destruction des hépatocytes). Certains sels biliaires, et notamment l’acide lithocholique, sont hépatotoxiques et provoquent des lésions hépatocellulaires dans les rétentions biliaires prolongées.

 

Les sels biliaires sont responsables du prurit observé dans les troubles de la sécrétion biliaire. Lorsque l’obstruction est incomplète, l’administration orale d’un chélateur des sels biliaires, la cholestyramine, diminue le prurit.

 

L’absence de sels biliaires dans l’intestin provoque une stéatorrhée par défaut de formation de micelles.

 

3.         La sécrétion biliaire

 

La formation de la bile (600 ml/24 heures) est la conséquence de la sécrétion active de composés organiques et inorganiques (bilirubine, acides biliaires, phospholipides, minéraux, glutathion). Cette sécrétion active est suivie de la filtration osmotique d’eau et d’électrolytes.

 

La sécrétion biliaire comprend :

·      Une sécrétion hépatocytaire et canaliculaire.

·      Une sécrétion canalaire par l’épithélium des voies biliaires.

 

a. La sécrétion hépatocytaire et  canaliculaire (400 ml/24 heures)

 

(1)     Dépendante des acides biliaires

 

Elle comprend trois étapes :

·      La captation (via des transporteurs) par la membrane sinusoïdale de l’hépatocyte.

·      Le transport intracellulaire jusqu’au pôle canaliculaire de l’hépatocyte.

·      La sécrétion canaliculaire (via des transporteurs).

 

(2)   Indépendante des acides biliaires

 

Elle est liée à la sécrétion active de glutathion et d’autres composés organiques ou minéraux (bilirubine, phospholipides, …) via également des transporteurs.

 

b. La sécrétion canalaire (200 ml/24 heures)

 

Elle est riche en bicarbonates et influencée par la sécrétine qui active un transporteur localisé au niveau de la cellule épithéliale biliaire.

 

Chacun des systèmes de transport impliqués dans la sécrétion biliaire peut être altéré par régulation négative (exemple : médicaments, cytokines, endotoxine, …) ou des mutations  et entraîner des hyperbilirubinémies ou des cholestases.

 

III.      FOIE ET ALCOOL

A.        CONSIDERATIONS GENERALES

 

L’incidence et la prévalence des hépatopathies alcooliques varient considérablement entre les pays, mais représente dans nos pays occidentaux un important problème de santé publique, puisque la majorité (environ 65%) des pathologies sont causées par l’alcool. Il faut noter d’importantes différences interindividuelles dans la tolérance à l’alcool, et notamment en fonction du sexe. On considère généralement que le risque de développer une pathologie commence avec une consommation moyenne de 40 g/j chez l’homme et de 20 g/j chez la femme.

 

Les trois types de lésion hépatique causée par l’alcool sont : la stéatose, l’hépatite, et la cirrhose. Il existe fréquemment une association entre les différents types de lésions, et des manifestations pathologiques extra-hépatiques ne sont pas rares. Ces lésions ne sont généralement pas causées par l’éthanol lui-même, mais par des composés résultant de son métabolisme.

 

B.        METABOLISME DE L’ALCOOL

 

La quantité d’alcool atteignant le foie par unité de temps est influencée par la vidange gastrique, l’absorption par l’intestin grêle proximal, et l’extraction hépatique à partir du sans portal. Notons que l’alcool se distribue dans les compartiments liquidiens de l’organisme (le fait que ceux-ci sont nettement plus limités chez la femme explique la tolérance réduite), et n’est pas déposé dans les tissus périphériques.

 

Le métabolisme de l’alcool est caractérisé par deux étapes oxydatives qui surviennent essentiellement au niveau du foie. Elles peuvent être résumées comme suit :

 

ETHANOL ® ACETALDEHYDE ® ACETATE

 

1.         Production d’acétaldéhyde

 

La première étape, amenant à la formation du dérivé toxique l’acétaldéhyde, est catalysée par trois enzymes : l’alcool déshydrogénase (cytosolique), le système enzymatique microsomal CYP 2EI lié au cytochrome P450 ou (« microsomal enzymatic oxidative system » ou MEOS), et la catalase (peroxysomale). Dans des conditions de consommation d’alcool faible ou modérée, celui-ci est converti en acétaldéhyde, surtout par l’alcool déshydrogénase (ADH) :

ADH

CH3CH2OH + NAD+ ®® ® ® ® ® ®  CH3CHO + NADH + H+

 

Nous reviendrons plus tard sur l’importance potentielle d’une production importante de NADH dans le cytosol.

 

L’activité de l’ADH n’est pas stimulée, mais apparaît au contraire être inhibée par l’alcool. Cependant, les alcooliques chroniques présentent souvent une tolérance accrue à la consommation de quantités importantes, liée à une clairance accélérée à l’éthanol à partir du sang. Ceci résulte de l’induction du MEOS, dont l’activité (et celle d’autres enzymes microsomales) est fortement stimulée. Le système CYP 2EI réalise la conversion de l’éthanol en acétaldéhyde comme suit :

 

MEOS

CH3CH2OH + NADPH + H+ ®®®®®®®® CH3CHO + 2 H2O2 + NADP+

 

L’action de la catalase, qui reste quantitativement très limitée, ne sera pas détaillée.

 

2.         Dégradation de l’acétaldéhyde

 

La dégradation de l’acétaldéhyde en acétate s’effectue sous l’action de deux acétaldéhydes déshydrogénase (ALDH), l’une cytosolique (ALDH1), l’autre mitochondriale (ALDH2) nettement prédominante :

 

ALDH

CH3CHO + NAD+ + H2O ®®®®®®®CH3COO- + NADH + 2H+

 

Différents facteurs peuvent inhiber le fonctionnement de l’ALH, et, en réduisant la conversion de l’acétaldéhyde en acétate, augmenter la concentration locale en acétaldéhyde.

 

L’alcool lui-même pourrait perturber l’action de l’ALDH. Des antibiotiques (le céfamandole) possèdent également cette propriété et leur utilisation doit être assortie de précautions. L’activité ALDH est diminuée dans les pathologies hépatiques, qu’elles soient d’origine alcoolique ou non. Enfin, on connaît depuis longtemps l’importance des différences individuelles et raciales aux effets de l’alcool. Ces différences sont notamment liées au polymorphisme du gène et de la protéine ALDH2. Une mutation de ce gène (ALDH2*2), communément rencontrée chez les asiatiques (> 50%), inhibe l’action de l’enzyme et maintient un taux élevé d’acétaldéhyde. Cette mutation peut être associée à une activité augmentée de l’ADH, et engendrer lors de la prise d’alcool, des effets secondaires importants, comme un flush, une hypotension et une tachycardie (accumulation d’acétaldéhyde). En général, le type d’isoenzyme ALDH détermine le comportement des individus vis-à-vis de l’alcool, en induisant une répulsion chez ceux présentant une forme moins active. Il s’agit d’un mécanisme protecteur car ces individus présentent un risque accru de dégâts hépatiques.

 

C.        FACTEURS RESPONSABLES DES LESIONS HEPATIQUES

1.         L’acétaldéhyde

 

L’acétaldéhyde est le facteur le plus impliqué dans le développement des lésions hépatiques. Sa toxicité peut s’exprimer directement ou indirectement.

 

De façon directe, l’acétaldéhyde perturbe le fonctionnement mitochondrial, provoquant ainsi une altération du métabolisme oxydatif, et à terme la nécrose cellulaire. Notons que cette toxicité mitochondriale augmente la peroxydation lipidique, induisant ainsi la formation d’autres aldéhydes, comme la malondialdéhyde. Par ailleurs, ces perturbations diminuent l’activité ALDH2, et réduisent le catabolisme de l’acétaldéhyde.

 

L’acétaldéhyde, comme d’autres aldéhydes, peut se lier à différentes protéines cellulaires et former des « adducts ». Ces « adducts » perturbent le fonctionnement des protéines impliquées. Par exemple, la liaison à la tubuline inhibe la formation de microtubules et altère ainsi la sécrétion de protéines, tandis que la liaison à l’actine entraîne une augmentation des dégâts hépatocellulaires. La formation d’ « adducts » induit la synthèse de collagène au niveau des cellules de Ito (cf. plus loin). Enfin, ces composés, en modifiant la conformation des protéines (notamment au niveau des membranes cellulaires), peuvent représenter des néoantigènes qui entraînent la formation d’anticorps dirigés contre eux. On assiste alors au développement d’une réaction immunitaire dirigée contre le foie.

 

2.         Production de NADH dans le cytosol

 

La production cytosolique de NADH qui y est normalement présent en quantité très faible, modifie le rapport NAD+/NADH (LI : ~ 1000) et le potentiel rédox. Ceci stimule les réactions de réduction. La conversion massive de pyruvate en lactate entraîne une acidose lactique, et inhibe la gluconéogenèse ce qui peut résulter en une hypoglycémie sévère si les dépôts de glycogène ont été consommés. Par ailleurs, ces modifications du potentiel rédox induisent une hyperuricémie et favorisent la formation des triglycérides et le développement de la stéatose. Elles peuvent également être impliquées dans l’inhibition de synthèse de la testostérone et la diminution des performances sexuelles (sans diminution de la libido) dans les états éthyliques.

 

3.         Formation d’acétate

 

Alors que l’alcool et l’acétaldéhyde restent essentiellement dans le foie, l’acétate peut être exporté vers les tissus extra-hépatiques pour y servir de substrat énergétique. Au niveau hépatique, l’acétate entraîne une dégradation accrue de l’ATP et une déplétion énergétique des cellules. Ceci résulte en une augmentation de la production de radicaux libres, notamment via l’induction du métabolisme de l’hypoxanthine par la xanthine oxydase. Par ailleurs, la formation d’acétate au niveau du foie stimule la cétogenèse et la lipogenèse, augmentant le risque de stéatose.

 

4.         Peroxydation lipidique

 

Il est maintenant bien acquis que la peroxydation lipidique joue un rôle dans les hépatopathies alcooliques, mais son importance reste encore mal précisée. Ces peroxydation représente un déséquilibre entre la production de radicaux libres (qui intervient physiologiquement dans de nombreux processus cellulaires) et les mécanismes antioxydants protecteurs. La consommation d’alcool augmente la production de radicaux libres et diminue le potentiel antioxydant.

 

La production de radicaux libres est stimulée par l’activation des enzymes microsomaux (cytochrome P450) ainsi que par l’activation du système xanthine oxydase par la production d’acétate. Par ailleurs, des métaux comme le fer sont connus pour être de puissants agents prooxydants. Le contenu en fer du foie est souvent augmenté chez les alcooliques et l’acétaldéhyde facilite la libération du fer à partir de la ferritine. Enfin, notons que l’activation des cellules de Küpffer stimule la production de radicaux libres survenant de façon normale dans le métabolisme de ces macrophages.

 

La diminution du potentiel antioxydant est due à une réduction des mécanismes enzymatiques (qui agissent en convertissant les radicaux libres), comme la superoxyde dismutase (SOD) et la glutathion peroxydase, dont le fonctionnement est altéré de façon non spécifique dans l’insuffisance hépatique, ainsi qu’à la déplétion en agents non enzymatiques (qui agissent en captant les radicaux libres), comme la vitamine E, la vitamine C, le sélénium et le glutathion (agissant surtout au niveau intracellulaire).

 

La peroxydation lipidique provoque des altérations importantes au niveau des membranes cellulaires qui modifient le métabolisme normal des hépatocytes, et un clivage (non spécifique) de l’ADN qui se traduit par une aggravation des dommages hépatiques. Enfin, notons que les aldéhydes provenant de la peroxydation lipidique inhibent l’activité ALDH dans les mitochondries, ce qui maintient des concentrations élevées en acétaldéhyde.

 

D.        PERTURBATIONS DU METABOLISME HEPATIQUE

1.         Métabolisme énergétique

 

On observe souvent chez les alcooliques une augmentation des dépenses énergétiques liée à la production de cytokines pro-inflammatoires (cf. plus loin). Par ailleurs, le métabolisme oxydatif élevé de l’alcool (qui consomme beaucoup d’O2) et la déplétion d’énergie induite par la production d’acétate peuvent entraîner un état d’hypoxie qui va accentuer sévèrement les effets toxiques de l’alcool.

 

2.         Métabolisme des lipides

 

Le principal résultat de la consommation d’alcool est le développement d’une stéatose hépatique. Les principaux facteurs précipitant ou aggravant celle-ci sont :

·      l’épargne d’oxydation des acides gras qui sont disponibles pour la ré-estérification.

·      La modification du potentiel rédox et la prolifération microsomale (avec activation enzymatique) qui stimulent la formation de triglycérides.

 

Cette formation accrue de triglycérides entraîne une augmentation de la production de VLDL, et rappelons à cet égard que l’alcoolisme est la cause la plus fréquente d’hypertriglycéridémie. Toutefois, la sécrétion des VLDL est débordée par la production de triglycérides qui s’accumulent ainsi dans les hépatocytes. Par ailleurs, notons les valeurs élevées d’HDL-cholestérol fréquemment trouvées chez les consommateurs d’alcool, avec une prédominance d’HDL2 lorsque leur conversion en HDL3 sous l’action de la lipase hépatique est compromise.

 

3.         Métabolisme des hydrates de carbone

 

Rappelons simplement le risque d’hypoglycémie lors de la consommation abondante d’alcool, notamment dans le contexte d’un état de jeûne prolongé entraînant la mobilisation prématurée des dépôts de glycogène.

 

4.         Métabolisme des protéines

 

On observe souvent chez les alcooliques chroniques une concentration plasmatique abaissée pour l’albumine et les protéines viscérales. En fait, ceci n’est pas le résultat d’une réduction de la synthèse, mais bien d’une diminution de la sécrétion causée par les difficultés de formation des microtubules. Par ailleurs, la dégradation des protéines intracellulaires par protéolyse dans les lysosomes est également perturbée. La conjugaison de ces facteurs explique l’accumulation de protéines dans les hépatocytes, entraînant leur gonflement (« ballooning ») et à terme leur nécrose.

 

Notons également une diminution de synthèse (cette fois) des glycoprotéines et donc des apoprotéines liée à un défaut de la glycolysation au niveau du système de Golgi.

 

5.         Synthèse de collagène

 

La consommation chronique d’éthanol entraîne une fibrose hépatique causée par le dépôt de collagène au niveau des espaces de Dissé et des hépatocytes environnants. Ce collagène est notamment produit par les cellules de Ito (cf. anatomie pathologique) dans les régions périsinusoïdales. Des « adducts » d’acétaldéhyde stimulent la synthèse de collagène par des cellules de Ito activées. L’activation des cellules est induite par des dérivés de la peroxydation lipidique, ainsi que par le « transforming growth factor » (TGF) b1 (cf. plus loin). Par ailleurs, leur prolifération est stimulée par différentes cytokines comme l’interleukine-1 (IL-1), le TNFa, le « platelet derived growth factor » (PDGF), l’ « epidermal growth factor » (EGF).

 

D’autres facteurs paraissent favoriser la production de collagène et le développement de la fibrose. Citons notamment l’hypoxie, les carences nutritionnelles fréquemment associées à l’alcoolisme, ainsi que l’augmentation du contenu en fer des hépatocytes.

 

6.         Production de cytokines

 

La production de nombreuses cytokines est associée à la présence de lésions hépatiques chez les alcooliques, mais le fait de savoir si leur libération est causée directement par l’alcool ou résulte d’un effet non spécifique lié au développement d’une pathologie n’est pas bien précisé.

 

La concentration de cytokines inflammatoires (IL-1, TNFa, IL-6, IL-8) est nettement augmentée dans le foie et dans le plasma lors d’hépatites alcooliques aiguës, et ce, en relation directe avec la sévérité de l’atteinte. Lors de la régression du processus pathologique, la concentration d’IL-6 et d’IL-8 se normalise rapidement alors que celle d’IL-1 et de TNFa se maintient à des taux élevés de façon prolongée. Cette stimulation de la production de cytokines inflammatoires peut être causée par des radicaux libres, l’hypoxie intralobulaire et par l’arrivée au foie d’endotoxines traversant une barrière intestinale à la perméabilité augmentée.

 

Les « transforming growth factor » (TGF) sont impliqués dans la fibrinogenèse à partir des cellules de Ito stimulées. Leur production semble être plus en rapport avec le développement de la maladie qu’avec un effet direct de l’alcool. Ils possèdent aussi des propriétés immuno-suppressives.

 

Nous avons déjà mentionné l’effet du PDGF sur la prolifération des cellules de Ito. Son rôle in vivo est suggéré par la présence de substances « PDGF-like » dans le liquide d’ascite.

 

7.         Régénération hépatique

 

Divers facteurs participent à altérer la régénération du foie chez les malades alcooliques, comme on l’observe en clinique après des résections hépatiques. Il semble bien que les modifications de composition (et de structure) des membranes plasmatiques des hépatocytes (résultant notamment de la peroxydation lipidique et de la formation d’ « adducts » sur les protéines membranaires) jouent un rôle déterminant en perturbant le fonctionnement normal des ligands et des récepteurs, ainsi que l’expression des protéines G. Le résultat est une réponse inadéquate aux facteurs hépatotrophiques, comme les mitogènes et co-mitogènes ainsi que les protooncogènes agissant habituellement sur les cellules hépatiques.

 

8.         Conséquences de l’activité accrue du système microsomal

 

En dehors de la peroxydation lipidique déjà discutée, l’induction d’activité du système microsomal augmente la production et hépato-toxicité de l’acétaldéhyde. Par ailleurs, cette induction enzymatique augmente nettement la sensibilité du foie aux solvants organiques et à certains médicaments (par exemple paracétamol) mais aussi à des agents carcinogènes. Elle augmente également la toxicité de la vitamine A et la dégradation de plusieurs micronutriments.


CHAPITRE II : METHODES D’EXPLORATION
EN PATHOLOGIE HEPATIQUE

I.         APPROCHE BIOCHIMIQUE DE LA PATHOLOGIE HEPATIQUE

A.        LES TESTS HEPATIQUES CONVENTIONNELS

1.         Indice de captation, conjugaison, et excrétion hépatique

a. Bilirubine et dérivés de la bilirubine

 

La bilirubine réagit avec certains sels de diazonium pour former des asodérivés colorés.

 

La bilirubine conjuguée réagit directement avec le colorant, tandis que la bilirubine non conjuguée doit être séparée de l’albumine pour réagir. Cette séparation peut être obtenue par de la caféine.

 

 

INTERPRETATION D’UNE HYPERBILIRUBINEMIE.

Ý BILIRUBINE NON CONJUGUEE

 

Enzymes hépatiques normaux

Ý BILIRUBINE CONJUGUEE ET NON CONJUGUEE

Enzymes hépatiques anormaux

Ý réticulocytes

Réticulocytes N.

CYTOLYSE ou CHOLOSTASE

HEMOLYSE

MALADIE DE GILBERT

 

 

 

b. Acides biliaires

 

Ils peuvent être estimés quantitativement au moyen d’un dosage radio-immunologique.

 

Les principales indications de leur détermination sont :

·      L’estimation de la sévérité d’une affection hépatique parenchymateuse chronique (cirrhose, hépatite chronique).

·      L’estimation du pronostic (survie) chez les cirrhotiques.

 

2.         Indice de lésions hépatocellulaires (Cytolyse)

a. Aspartate-(AST) et alanine aminotransferase (ALT)

 

L’AST (ou ASAT), également appelée transminase oxalo-acétique glutamique (GOT ou SGOT), car elle catalyse la réaction : aspartate + a-oxoglutarate ® oxalo-acétate + glutamate. Elle est retrouvée dans le cytoplasme et les mitochondries de nombreux tissus comme le foie, le myocarde, les muscles squelettiques et les globules rouges.

 

L’ALT (ou ALAT), également appelée transminase glutamique pyruvate (GPT ou SGPT), car elle catalyse la réaction : alanine a-oxoglutarate ® pyruvate + glutamate. Elle est confinée au cytoplasme et les concentrations les plus élevées sont retrouvées dans le foie.

 

 

ENZYMES INTRA CELLULAIRES

Concentration dans les organes (par ordre croissant)

ALT

AST

¡ GT

LDH

CPK

Foie

Rein

Cœur

Muscle

Cœur

Foie

Muscle

Rein

Pancréas

Foie

Rein

Pancréas

Voies biliaires

Muscle

Foie

Rein

Myocarde

Ganglions. GR.

Rate

Cœur

Pancréas

Muscle (MM)

Cœur (MB)

Cerveau (BB)

 

 

Lorsque les tissus sont lésés, avec une augmentation de la perméabilité membranaire et de la nécrose cellulaire, ils libèrent ces enzymes dans le sang.

 

 

ENZYMES LIBERES DANS LE SANG

Pathologies concernées

ALT

AST

¡ GT

LDH

CPK

Cytolyse hépat.

Infarctus myoc.

Hypothyroïdie

Infarctus Myoc.

Cytolyse hépat.

Pancréatites

Nécrose muscles

Hypothyroïdie

Cytolyse hépat.

Cholostase

Pancréatites

Aff. rénales

Infarctus Myoc.

Nécrose muscles

Cytolyse hépat.

Aff. hématol

Pancréatites

Aff. rénales

Infarctus Myoc.

Nécrose muscles

 

 

INTERPRETATION D’UNE AUGMENTATION DES TRANSAMINASES

 

ALT

AST

PAL

¡ GT

CPK

CYTOLYSE

­­­

­­

N

­­

N

CHOLOSTASE

­

­

­­­

­­­

N

INFARCTUS MYOCARDE

­­

­­­

N

N

­­­

 

 

En pathologie hépatique, le rapport ASAT/ALAT est <  sauf dans les cas suivants :

·      Hépatite alcoolique.

·      Evolution d’une hépatite chronique vers une cirrhose.

Atteinte hépatique aiguë sévère.

 

b. Lactate déshydrogénase (LDH)

 

Les LDH sont retrouvées dans le cytoplasme de nombreux tissus. Leur spécificité est donc faible, mais la détermination des isoenzymes permet d’augmenter cette spécificité. En effet, l’isoenzyme LDH5 est augmentée de façon préférentielle dans les affections hépatiques. Néanmoins, l’existence d’autres enzymes facilement dosables dans le sang, plus sensibles et plus spécifiques a limité l’intérêt du dosage de la LDH ou même de la LDH5 dans les affections hépatiques.

 

3.         Indice de lésions canalaires ou enzymes de cholestase

a. Phosphatases alcalines (PAL)

 

Il s’agit d’un ensemble d’enzymes dont l’électrophorèse permet de séparer des isoenzymes de différentes origines.

 

Le taux de PAL est au-dessus des valeurs de référence de l’adulte durant la période néonatale, mais aussi durant la phase de croissance osseuse c’est-à-dire l’adolescence, en cas de maladie de Paget, d’ostéomalacie ou de métastases osseuses. Les PAL augmentent également à partir du troisième mois de grossesse (PAL d’origine placentaire) pour atteindre des valeurs doubles des valeurs usuelles chez l’adulte, en fin de grossesse.

 

L’activité des PAL totales sériques augmente dans de nombreuses maladies hépato-biliaires, mais les taux les plus élevés sont retrouvés en cas d’obstacles à l’écoulement de la bile. Dans ces cas, l’élévation des PAL n’est pas liée à un défaut d’excrétion hépatique de l’enzyme, mais bien à une augmentation de synthèse notamment sous l’action des acides biliaires. De même ces acides biliaires solubilisent les PAL membranaires qui atteignent le plasma par régurgitation paracellulaire ou par endocytose transcellulaire.

 

b. g Glutamyl transférase

 

La gGT est une glycoprotéine qui catalyse le transfert du groupe gGlutamyl à partir des peptides gGlutamyl, comme le glutathion, sur d’autres peptides, acides aminés ou l’eau.

 

Elle se retrouve dans toutes les membranes qui ont une activité de sécrétion ou d’absorption élevée (activité maximale dans le rein, le foie et le pancréas).

 

Chez le sujet normal, l’activité sérique de gGT est principalement d’origine hépatique. Les valeurs de référence varient selon la technique utilisée, mais sont plus élevées pour le sexe masculin et sont très vite élevée en période néonatale et chez l’enfant jusqu’à l’âge d’un an. Il faut savoir qu’environ 5% de la population présente une activité sérique en gGT supérieure à la normale sans affection sous-jacente retrouvée.

 

Le taux de gGT augmente dans toutes les maladies hépatiques, c’est donc un test très sensible mais ayant une faible valeur diagnostique.

 

ETIOLOGIES D’UNE ELEVATION DES gGT sériques

Avec ­ des PAL

Avec ­ des ALAT et ASAT

Isolée

CHOLOSTASE

 

Intra ou extra-hépatique

CYTOLYSE

 

Aiguë ou chronique

Sujet normal

Médicaments inducteurs enzymatiques (Barbit.)

Alcoolisme

Hyperthyroïdie

Parasitoses

 

 

Son utilisation dans la prise en charge de sujets alcooliques est largement répandue. En effet, probablement induite par l’alcool, la gGT voit son activité sérique augmenter dans cette population. Néanmoins, il existe une mauvaise corrélation entre la consommation d’alcool et l’activité sérique de la gGT.

 

c. Leucine aminopeptidase (LAP) et 5’nucleotidase (5’nase)

 

Ces deux enzymes sont présentes dans tous les tissus humains, mais seules certaines affections hépatiques, et la grossesse pour la LAP alors d’origine placentaire, provoquent une augmentation de leur activité dans le sang. Le dosage de la g-glutamyl transférase a largement supplanté leur dosage.

 

Leur utilisation principale reste la confirmation qu’une élévation des PAL est bien d’origine hépatique.

 

4.         Indice de synthèse hépatique

 

Le foie synthétise de très nombreuses protéines circulantes. Leur concentration ne dépend pas seulement de ce niveau de synthèse, mais aussi de nombreux facteurs extra-hépatiques : demi-vie des protéines individuelles, leur catabolisme, leur volume de distribution.

 

a. Protéines totales

 

Les altérations du taux des protéines totales sont peu spécifiques, elles peuvent apparaître dans nombre d’affections non hépatiques. De ce fait, l’estimation du taux des protéines totales n’a que peu de valeur en hépatologie.

 

b. Electrophorèse des protéines

 

On observe des modifications de l’électrophorèse dans certaines situations (par exemple élévation de la bande des gGlobulines dans l’hépatite chronique active), mais cette analyse a un faible intérêt diagnostic en hépatologie.

 

c. Albumine et g globulines sériques

 

Une diminution du taux d’albumine avec élévation du taux de gamma-globulines est observée dans les insuffisances hépatiques chroniques (cirrhoses).

 

d. Préalbumine

 

C’est une protéine qui se lie à des iodothyronines et une molécule de retinol binding protein (RBP). En raison de sa courte demi-vie (1,9 j), ses modifications sont plus précoces que celles de l’albumine (demi-vie : ± 20 j). Il faut toutefois se souvenir que la préalbumine comme l’albumine est une protéine « négative » de la phase inflammatoire : elle voit ses concentrations diminuer lors d’une phase inflammatoire, ce qui en limite son utilisation dans de nombreuses situations. C’est également un marqueur de l’état nutritionnel.

 

e. Immunoglobulines

 

On observe une augmentation des IgA dans les cirrhoses, des IgG dans les hépatites chroniques et des IgM dans la cirrhose biliaire primitive.

 

f. Temps de prothrombine (PT) et dosage du facteur V

 

Le PT, ou temps de QUICK (anciennement PTT), permet d’évaluer la voie intrinsèque de coagulation (facteurs I, II, V, VII, IX et X), c’est-à-dire d’évaluer des facteurs de coagulations synthétisés par le foie. Sa valeur est exprimée en pourcentage de la normale. SI la fonction hépatiques est déficiente, le temps de prothrombine sera allongé. Des déterminations successives peuvent être utilisées pour suivre la progression de la maladie ou pour évaluer le risque hémorragique d’un patient.

 

Le PT est allongé ans les troubles de la résorption de la vitamine K (cholostase, stéatorrhées). L’administration parentérale de vitamine K corrige le PT en cas de malabsorption de la vitamine K mais pas en cas d’insuffisance de synthèse hépatique. Une manière plus sophistiquée, mais non utilisées en routine clinique, de diagnostiquer la cause d’un allongement du PT consiste à doser le facteur V dont la production ne dépend pas de la vitamine K.

 

g. Cholinestérase

 

C’est une enzyme qui hydrolyse une variété d’esters de la choline. Les concentrations diminuent dans les affections hépatiques, et surtout la cirrhose, en étant le reflet d’une diminution de synthèse hépatique.

 

En cas de polymorphisme génétique, des taux bas peuvent être observés et ceci est détectable par un trouble de l’inhibition de l’activité cholinestérasique par la dibucaïne ou le fluorure.

 

h. Cholestérol sérique

 

Le taux de cholestérol est, en général, augmenté en cas de cholostase et diminué en cas d’insuffisance hépatique, mais il existe de nombreuses causes non hépatiques d’hyper ou d’hypocholestérolémie ce qui limite l’intérêt de la détermination du taux de cholestérol en pathologie hépatique.

 

B.        LES TESTS QUANTITATIFS EXOGENES

1.         Principes

 

Les tests hépatiques « conventionnel » apportent des renseignements sur l’intégrité du foie et sur la formation de la bile, mais peu donnent une information sur la fonction hépatique. Diverses substances exogènes peuvent elles être utilisées pour explorer le fonctionnement global du foie. Ces substances évaluent soit la capacité de synthèse hépatique (administration d’un substrat et suivi de la formation du produit synthétisé), soit la capacité de clairance hépatique. Par analogie à la clairance rénale, la clairance hépatique reflète la quantité du composé extrait de la circulation générale par le foie par unité de temps, relative à la concentration du composé dans le sang atteignant le foie. La quantité extraite peut être calculé : Cl hépatique = flux sanguin x extraction hépatique.

 

En pratique, tous les tests exogènes reflètent la perfusion hépatique, la capacité fonctionnelle et les échanges hépatocyte-sang. Mais certains tests dépendent principalement de la perfusion hépatique (clairance du galactose à faible dose, du vert d’indocyanine), tandis que d’autres dépendent initialement de la capacité fonctionnelle hépatique (clairance du galactose à forte dose, de la caféine, déméthylation de l’aminopyrine).

 

Mais en pratique, ces deux types de tests donnent des résultats moins différents que la théorie le laissait prévoir. Il existe une hétérogénéité des fonctions métaboliques hépatiques de telle sorte que la clairance d’un seul composé n’évalue que partiellement ce métabolisme, il existe une réserve fonctionnelle hépatique énorme, et enfin il existe aussi une intertrication des altérations fonctionnelles et des shunts.

 

2.         Valeur clinique des tests exogènes

a. Indice diagnostique

 

Il existe une grande variabilité individuelle des résultats chez les sujets normaux, mais pas intraindividuelle, ce qui permettrait plutôt d’interpréter des résultats sériés chez un même individu. Ces tests ne permettent pas, bien entendu, de porter un diagnostic étiologique, ils évaluent la réserve fonctionnelle hépatique.

 

b. Indice de sévérité et pronostic de la cirrhose

 

On pourrait croire que ces tests puissent apporter une information pronostique indépendante d’autres facteurs comme le score de Child-Pugh, mais ceci est controversé (voir chapitre sur la cirrhose). Une étude longitudinale, c’est-à-dire des prélèvements sériés dans le temps pour un même patient, semble être une approche d’avenir.

 

II.        L’IMAGERIE

A.        L’ECHOTOMOGRAPHIE

 

L’utilisation d’ultrasons permet d’explorer la morphologie du foie, des vaisseaux hépatiques et des voies biliaires de manière non invasive et pour un prix de revient inférieur aux autres procédés. Cette méthode permet de déceler des lésions focales, liquides et solides et des anomalies d’échostructure du parenchyme hépatique. Des quantités peu importantes d’ascite sont décelées avant l’apparition de signes cliniques. Il est en outre possible d’évaluer, avec l’aide du Doppler, le calibre des vaisseaux ainsi que la présence et la direction d’un flux et éventuellement d’évaluer son débit et sa vitesse.

 

B.        LA TOMODENSITOMETRIE

 

Ce procédé complète d’échotomographie. Il fournit des renseignements sur le volume et la densité du foie. Après injection rapide de produit de contraste et acquisition de coupes précoces, il peut détecter des tumeurs hypervascularisées et permet l’exploration des vaisseaux hépatiques.

 

C.        LA RESONANCE MAGNETIQUE

 

Ce procédé récent peut être utile lorsque des méthodes classiques ne permettent pas un diagnostic certain, notamment en cas de lésion focale. Il permet aussi l’exploration des vaisseaux hépatiques.

Dans les surcharges en fer, le foie apparaît foncé si on le compare au muscle.

 

Des techniques récentes permettent la projection spatiale de l’arbre biliaire et pancréatique sans injection de produit de contraste pour autant qu’il y ait dans les structures bilio-pancréatiques, assez de liquide non circulant.

 

D.        LA CHOLANGIO-PANCREATOGRAPHIE ENDOSCOPIQUE ET LA CHOLANGIOGRAPHIE TRANSPARIETALE

 

La localisation précise d’une cause de cholostase nécessite souvent l’opacification radiologique de l’arbre biliaire et des canaux pancréatiques. Les méthodes utilisées seront décrites en détail dans le chapitre consacré aux voies biliaires.

 

E.        L’ANGIOGRAPHIE

 

L’injection sélective de produit de contraste dans le tronc coeliaque ou même dans l’artère hépatique permet dans un premier temps de visualiser les artères, dans un deuxième temps les capillaires (phase parenchymateuse) et dans un troisième temps, les veines. Les « masses » hépatiques sont visualisées et leur irrigation éventuelle précisée.

 

L’angiographie permet la caractérisation de lésions vasculaires hépatiques, la mise en évidence de fistules artério-biliaires ou artério-portales et complète souvent la mise au point d’une hypertension portale, particulièrement avant chirurgie.

 

Une cavographie complétée par une opacification des veines sus hépatiques peut être réalisée.

 

III.      LA LAPARO(COELIO)SCOPIE

 

La laparo(coelio)scopie permet d’explorer, sous anesthésie locale, la cavité péritonéale, la morphologie du foie (taille, anomalies de couleur et de surface) et de détecter les signes d’hypertension portale.

 

Des biopsies peuvent être prélevées sous contrôle visuel avec possibilité d’électrocoagulation en cas d’hémorragie.

 

IV.       LA BIOPSIE HEPATIQUE ET LA CYTOPONCTION

 

L’absence de corrélation parfaite entre les résultats des tests biologiques et la morphologie du foie rend nécessaire la réalisation de biopsies hépatiques non seulement pour préciser le diagnostic d’une affection hépatique et sa sévérité mais également pour en surveiller l’évolution. Ces biopsies peuvent être réalisées soit à l’aveugle, soit au cour d’une laparoscopie, soit par voie trans-jugulaire. Ces examens se font en ambulatoire après contrôle de la coagulation (PT > à 50%, APTT dans les normes, Plaquettes > 50.000/mm³) sauf pour la biopsie trans-jugulaire. En cas d’ascite, une vidange préalable à l’examen est indispensable. Après biopsie à l’aveugle ou par laparoscopie, il est indispensable de surveiller le rythme cardiaque et la tension artérielle afin de déceler la survenue éventuelle d’une hémorragie.

 

La biopsie aveugle est surtout indiquée dans les lésions diffuses du foie ou dans le cadre d’une mise au point d’une altération des tests hépatiques. Une échographie doit être réalisée au préalable.

 

La biopsie transveineuse est réalisée par abord jugulaire droit. Elle peut être réalisée en cas de troubles de l’hémostase et permet la mesure simultanée du gradient sus hépatique.

 

La cytoponction sous contrôle échographique ou tomodensitométrie permet de faire des prélèvements à l’aiguille fine destinés à une étude cytologique. Ce procédé est surtout utile au diagnostic des lésions focales.


CHAPITRE III : MANIFESTATIONS CLINIQUES :
LES GRANDS SYNDROMES

 

Les manifestations cliniques des maladies hépatiques comportent 3 grands syndromes :

·      L’insuffisance hépatique.

·      La cholostase.

·      L’hypertension portale.

 

Une seule maladie peut comporter l’association de plusieurs syndromes (insuffisance hépatique et hypertension portale dans la cirrhose, cholostase et insuffisance hépatique dans la cholostase chronique).

 

I.         L’INSUFFISANCE HEPATIQUE

 

L’insuffisance hépatique est l’ensemble des signes liés à la diminution, voire à l’arrêt, des fonctions de synthèse hépatocytaire.

 

A.        L’INSUFFISANCE HEPATIQUE CHRONIQUE

 

Les principales étiologies de l’insuffisance hépatique chronique sont reprises dans le Tableau suivant.

 

ETIOLOGIES DE L’INSUFFISANCE HEPATIQUE CHRONIQUE

Etiologies

Exemples

Pathologie parenchymateuse

 

 

Pathologie vasculaire

 

 

Pathologie cholestatique sévère

Cirrhoses

Hépatite chronique sévère

 

Syndrome de Budd Chiari

Maladie veino-occlusive

 

Cirrhoses biliaires

 

L’insuffisance hépatique chronique peut n’entraîner aucune manifestation clinique. Son diagnostic repose alors sur des anomalies biologiques. La symptomatologie est disparate et dépend en grande partie de l’intensité et de la durée de l’insuffisance hépatique.

MANIFESTATIONS CLINIQUES DE L’INSUFFISANCE HEPATIQUE CHRONIQUE SEVERE

 

Exemples

1.   Asthénie et malnutrition

2.    Ictère

3.   Troubles neuropsychiques

4.   Ascite

5.   Troubles rénaux

6.   Manifestations cutanées

 

 

7.   Signes endocriniens

 

 

8.   Troubles hématologiques

9.   Manifestations cardio-vasculaires et

      pulmonaires

 

10. Susceptibilité aux infections

 

 

Encéphalopathie hépatique

 

Syndrome hépatorénal

Angiomes stellaires

Erythème palmaire

 

Hypogonadisme, gynécomastie

Aménorrhée, stérilité

 

Epistaxis, purpura, hémorragies

­ débit cardiaque, ¯ T.A.

Syndrome hépato-pulmonaire

 

Péritonite bactérienne spontanée

 

1.         Asthénie et malnutrition

 

Elles sont liées à la diminution des apports, à l’anorexie, à la malabsorption, aux troubles du métabolisme des nutriments et à l’augmentation des besoins nutritifs (chez l’alcoolique).

 

2.         Ictère

 

L’insuffisance hépatique peut être responsable d’un ictère de degré variable.

 

Une certaine corrélation existe entre l’intensité de l’ictère et la gravité de l’insuffisance parenchymateuse. Cette donnée n’est cependant pas absolue. Dans la cirrhose par exemple, l’ictère peut être absent. Sa présence est néanmoins un signe de mauvais pronostic.

 

3.         Encéphalopathie

 

a. Définition

 

L’encéphalopathie hépatique représente l’ensemble des manifestations neuropsychiques secondaires à l’arrivée au cerveau de substances neurotoxiques produites par l’intestin et non catabolisées par un foie malade ou passant dans la circulation générale en raison d’anastomoses porto-caves.

 

b. Pathogénie

 

Ammoniac : l’ammoniac, produit dans le côlon à partir des protéines sous l’influence des enzymes bactériennes, n’étant plus métabolisé en urée par le foie malade ou shunté, arrive dans le cerveau et est détoxifié dans les astrocytes en glutamine ce qui induit un oedème cérébral.

 

Récepteur GABA/Benzodiazépine

Il existe au niveau cérébral un récepteur GABA (acide gamma-amino-butyrique) benzodiazépine qui, lorsqu’il est occupé, entraîne un influx de chlore et une inhibition de la neurotransmission.

 

L’activation peut être induite par le GABA lui-même (produit dans l’intestin) ou des benzodiazépines endo- ou exogènes.

 

Manganèse : une accumulation de manganèse dans le globus pallidus pourrait être responsable de signes extrapyramidaux, s’observant souvent en cas d’encéphalopathie hépatique.

 

c. Manifestations cliniques

 

Une encéphalopathie peut apparaître sur un terrain d’hépatopathie chronique au stade de cirrhose ou dans l’évolution d’une insuffisance hépatocellulaire aiguë grave.

 

Il existe deux formes d’encéphalopathie :

Aiguë : Elle peut être spontanée (de mauvais pronostic) ou déclenchée par un facteur précipitant : infection, hémorragie, troubles électrolytiques, excès de protéines, constipation, benzodiazépines.

Chronique : Cette forme est en rapport avec les shunts porto-systémiques naturels ou créés chirurgicalement. On peut observer des fluctuations neuro-psychiques selon l’apport de protéines dans l’alimentation.

 

Si on classe la symptomatologie en fonction du degré de gravité des manifestations, on décrit classiquement 4 stades :

stade 1 : apathie, irritabilité ou au contraire jovialité inadaptée, diminution del’attention et impossibilité de réaliser des calculs simples (addition, soustraction).

stade 2 : désorientation dans le temps, comportement inadéquat, modification de la personnalité, confusion.

stade 3 : somnolence, état stuporeux, désorientation sévère.

stade 4 : coma.

 

La recherche des signes et tests suivants facilite la confirmation de l’origine hépatique des symptômes précités :

·      L’astérixis est démontré en provoquant une extension du poignet, l’avant-bras étant tenu immobile. Les doigts sont écartés les uns des autres. En cas d’encéphalopathie, on observe, de façon plus ou moins fréquente, des mouvements de flexion-extension des articulations métacarpo-phalangiennes.

·      Le fétor hépatique ou haleine de foie cru, correspond à l’exhalation d’une substance probablement d’origine intestinale.

·      Les tests de piste : ces test plus complexes et plus sensibles que le test de l’étoile consistent à faire relier par un trait soit 25 cercles numérotés de 1 à 25, soit un chiffre à une lettre (1-A, 2-B, 3-C) de 1 à 13 (A à M) et de calculer le temps nécessaire pour réaliser ce travail correctement.

 

d. Diagnostic paraclinique

 

L’association d’un syndrome neurologique non systématisé et de signes en faveur d’une hépatopathie suggère fortement le diagnostic d’encéphalopathie hépatique.

 

Parmi les examens complémentaires on retiendra :

·      L’électroencéphalogramme : cet examen met en évidence une diminution plus ou moins importante de la fréquence du rythme alpha normal (8 à 13 cycles par seconde) remplacé par des ondes lentes de haut voltage. Ce type de tracé peut être observé dans diverses altérations de type métabolique (urémie, acidose respiratoire) et être observé précocement avant toute manifestation clinique ou biologique.

·      Le dosage du NH3 artériel : observée dans des conditions techniques précises, le taux d’ammoniaque artériel augmente dans les maladies hépatiques chroniques ou aiguës sévères, mais il existe une mauvaise corrélation entre le taux d’ammoniaque et le degré de l’encéphalopathie.

·      Le bilan biologique hépatique. Il mettra en évidence des signes d’insuffisance hépatique (diminution de l’albuminémie, du temps de prothrombine, etc...).

 

e. Diagnostic différentiel

 

Le coma peut ressembler à tous les autres types de coma métabolique. Il convient également d’exclure d’autres causes de coma, comme la méningite suppurée, l’hémorragie méningée et l’hématome sous-dural survenant à la suite d’un traumatisme.

 

Des symptômes neuropsychiques peuvent également survenir chez les alcooliques présentant soit un delirium tremens, soit une encéphalopathie de Wernicke. En cas de delirium tremens, on observera en général une hyperactivité motrice continue, des hallucinations et de l’insomnie. L’encéphalopathie de Wernicke s’accompagne de paralysie des nerfs oculomoteurs, de strabisme et de troubles de l’équilibre.

 

L’utilisation de diurétiques chez les cirrhotiques peut entraîner de l’hyponatrémie. Cette altération peut engendrer des symptômes neuropsychiques en l’absence de coma hépatique. Il s’agit le plus souvent d’apathie, de somnolence, de céphalées et d’hypotension. Outre une hyponatrémie, une augmentation du taux de l’urée est fréquente.

 

f. Traitement

 

·        L’apport protéique sera diminué, mais il ne doit pas tomber en dessous de 60 g de protéines par jour. En général, les protéines végétales sont mieux tolérées, et des suppléments d’acides aminés branchés per os sont préconisés si l’on veut augmenter l’apport protéique sans aggraver l’encéphalopathie.

·        Les antibiotiques non résorbables

La néomycine  et le métronidazole (Flagyl â) sont efficaces. Ils ne peuvent être prescrits que durant de courtes périodes à cause de leur toxicité. Ils détruisent la flore bactérienne productrice d’ammoniaque.

·        Les disaccharides non digestibles

Le lactulose, (Bifitéral â), a progressivement remplacé la néomycine responsable d’effets secondaires relativement fréquents. Le lactulose est métabolisé dans l’intestin. Les lactates formés favorisent l’excrétion fécale de l’ammoniaque. Le lactitol (Portolac â) est un dissacharide de deuxième génération se présentant sous forme de poudre en sachets. La dose doit être ajustée en vue de provoquer deux selles semi-liquides par jour. Lactulose et Lactitol peuvent être administrés en lavements en cas d’hémorragie ou de manque de collaboration du malade.

 

4.         Ascite

 

L’ascite peut survenir brutalement à la suite d’une dégradation rapide de la fonction parenchymateuse comme par exemple au décours d’une hémorragie, d’une infection, d’une débauche éthylique. Elle peut apparaître progressivement après une période plus ou moins prolongée de ballonnement.

 

Cf. § IV L’ASCITE.

 

5.         Syndrome hépato-rénal

 

Le syndrome hépato-rénal est une insuffisance rénale fonctionnelle progressive par vasoconstriction avec oligoanurie survenant chez des patients cirrhotiques décompensés. Il peut être favorisé par l’administration non contrôlée de diurétiques. On n’observe aucune lésion anatomique des reins et leur transplantation à des sujets exempts d’affection hépatique est suivie d’une restauration de la fonction rénale.

 

Le syndrome hépato-rénal est caractérisé par une oligurie et une élévation de la créatininémie (> à 1,5 mg/dl) avec absence d’amélioration suite à l’arrêt des diurétiques et à la perfusion d’1 l 500 d’expanseur plasmatique et en dehors d’un contexte d’état de shock, de déshydratation, d’infection ou de prise de médicaments néphrotoxiques. Le sédiment urinaire est en général banal. En fonction de ces données, il est généralement aisé de différencier ce syndrome d’autres causes d’insuffisance rénale comme par exemple, la nécrose tubulaire aiguë secondaire à une hémorragie ou à une infection ou à une insuffisance rénale prérénale (par déshydratation).

 

Le traitement est, en général, décevant en dehors de la transplantation hépatique et de la combinaison d’expanseurs plasmatiques et de glypressine (dérivé de la vasopressine).

 

6.         Manifestations cutanées

a. Angiomes stellaires

 

Il s’agit de lésions sous-cutanées, punctiformes, formées d’une artériole centrale d’où partent de petits vaisseaux ressemblant à des pattes d’araignées.

 

b. Erythème palmaire

 

Ce signe consiste en une rougeur pommelée, localisée sur les éminences thénar et hypothénar ; il n’est pas spécifique : il peut être observé dans l’arthrite rhumatoïde et dans les maladies fébriles chroniques. Il est dû à une vasodilatation des capillaires sous-cutanés.

 

7.         Signes endocriniens

 

Chez l’homme, on observe une féminisation caractérisée par une gynécomastie, une perte de phanères (pilosité à caractère féminin), associée à une augmentation du taux d’oestrone. En outre, un hypogonadisme est responsable d’une atrophie testiculaire. Celle-ci est associée à une diminution du taux de testostérone. Une impuissance est également fréquente. Ces manifestations sont principalement observées dans la cirrhose.

 

Chez la femme, la diminution d’oestradiol et de progestérone provoque la perte des caractères sexuels secondaires comme la graisse pelvienne et mammaire ainsi que la suppression des ovulations. On note en outre une diminution de sécrétion des gonadotrophines.

 

8.         Troubles hématologiques

 

Les manifestations des altérations de l’hémostase dans l’insuffisance parenchymateuse hépatique sont diverses : épistaxis, purpura, hémorragies digestives, fibrinolyse post-opératoire.

 

De multiples facteurs interviennent :

·       La réduction de la synthèse des facteurs de coagulation : II, V, VII, IX et X. La synthèse du fibrinogène est également diminuée mais est plus résistante que celle des autres facteurs.

·       Une coagulation intravasculaire disséminée : la nécrose hépatique peut provoquer une activation de l’hémostase, en même temps qu’une diminution de la clairance des facteurs activés. Une consommation locale du fibrinogène, des plaquettes et d’autres facteurs se manifeste. La fibrinolyse locale provoque la formation de produits de dégradation du fibrinogène. Le résultat final de ces altérations consiste en hémorragies. Ce type de coagulopathie est caractérisé par une diminution du fibrinogène plasmatique, une hypoplaquettose, une diminution des facteurs de coagulation.

·       Une fibrinolyse primaire : ce mécanisme plus rare peut intervenir dans des situations aiguës (trauma, interventions). L’activation de la fibrinolyse peut résulter d’une diminution de la clairance hépatique d’un activateur du plasminogène libéré par exemple au cours d’une intervention.

·       Une cholostase peut aggraver la situation en réduisant l’absorption intestinale de la vitamine K dont dépend la synthèse des facteurs II, VII, IX et X.

·      L’insuffisance hépatique chronique peut, par ailleurs, entraîner des modifications des globules rouges, blancs et des plaquettes.

 

Avant le traitement d’une hémorragie, il convient d’en préciser le(s) mécanisme(s) responsable(s). Une carence en vitamine K sera corrigée par l’administration parentérale à la dose de 10 mg/jour. En général, ce traitement sera peu efficace à cause de l’insuffisance parenchymateuse hépatique. Les mécanismes responsables d’une coagulation intravasculaire disséminée doivent être recherchés et traités: infection, choc, déshydratation. Les transfusions de plaquettes sont efficaces pour une courte période. On a également recommandé l’utilisation de plasma frais congelé ou de concentré de complexe prothrombinique (facteurs II, VII, IX et X) avant un acte invasif.

 

9.         Altérations cardio-vasculaires et pulmonaires

 

a. Cardio-vasculaires

 

L’insuffisance hépatique chronique provoque un état d’hypercinésie cardiaque, conséquence de la diminution des résistances vasculaires périphériques. Ce syndrome se manifeste par de la tachycardie, une augmentation du débit cardiaque et une baisse de la pression artérielle diastolique.

 

b. Pulmonaires

 

Dans environ 30% des cas de cirrhose, on observe une hypoxémie artérielle en l’absence de toute affection cardio-pulmonaire organique. Elle se manifeste par de la dyspnée parfois aggravée en position assise (platypnée) et de la cyanose. C’est le syndrome hépato-pulmonaire.

 

Dans les cas graves, cette vasodilatation pulmonaire excessive provoque un shunt artério-veineux et une altération des mécanismes de ventilation-perfusion.

 

10.       Sensibilité aux infections

 

En présence d’une pyrexie chez un cirrhotique ou d’une cirrhose décompensée, il convient d’éliminer une cause infectieuse bactérienne.

 

B.        INSUFFISANCE HEPATIQUE AIGUE SEVERE

 

L’insuffisance hépatique aiguë sévère représente l’ensemble des manifestations cliniques associées à une dysfonction hépato-cellulaire brutale et sévère (PT < 50%), survenant dans un foie préalablement normal.

 

En cas de survie, la structure et les fonctions hépatiques redeviennent normales.

Les causes de l’insuffisance hépatique sévère sont reprises dans le tableau suivant :

 

 

ETIOLOGIE DE L’INSUFFISANCE HEPATIQUE AIGUE SEVERE

 

Exemples

Virus (± 70%).

 

Médicaments et toxiques.

 

 

 

 

Vasculaires.

 

 

 

Diverses.

A, B, B delta, C, Herpès….

 

Paracétamol, INH, acide valproïque.

Halothane et dérivés.

CCl4.

Amanite phalloïde.

 

Syndrome de Budd-Chiari.

Maladie veino-occlusive.

Hypoxie.

 

Métastases, leucémies, lymphomes.

Stéatose aiguë gravidique.

Maladie de Wilson.

Syndrome de Reye.

 

1.         Manifestations cliniques

 

Elles sont similaires à celles observées en cas d’insuffisance hépatique chroniques et comprennent surtout :

 

a. Ictère

 

Une certaine corrélation existe entre le degré d’ictère et la gravité de l’insuffisance hépatique.

 

b. Encéphalopathie

 

Une encéphalopathie est une manifestation reflétant toujours la gravité de l’insuffisance hépatique. Elle peut se développer endéans les 2 semaines (hépatite fulminante) ou au-delà des 2 semaines (hépatite subfulminante) suivant le début de l’ictère. Contrairement à ce qui se passe dans l’encéphalopathie de l’insuffisance chronique (où les shunts porto-cave jouent un rôle important), le facteur : oedème cérébral joue ici un rôle prépondérant entraînant une hypertension intracrânienne.

 

Les signes cliniques seront ceux de l’encéphalopathie (grade I à IV) et de l’oedème cérébral : convulsion, rigidité musculaire, mouvements de décérébration et de décortication, anomalies des réflexes pupillaires.

 

c. Coagulopathie

 

On note une réduction des facteurs de coagulation synthétisés par le foie (PTT, facteur V) ainsi qu’une éventuelle coagulation intravasculaire disséminée (æ fibrinogène, æ plaquettes, ä produits de dégradation du fibrinogène).

 

d. Autres manifestations

 

On peut aussi observer une hypercinésie circulatoire systémique, un syndrome hépatopulmonaire, un syndrome hépatorénal et une susceptibilité excessive aux infections ainsi qu’une hypoglycémie (liée à la diminution des réserves de glycogène).

 

2.         Traitement

 

Tout patient atteint d’une insuffisance hépatique sévère doit être hospitalisé en unité de soins intensifs où l’on préviendra et traitera les complications de l’insuffisance hépatique aiguë et un contact doit être pris avec un centre de transplantation.

 

Une attention particulière doit être apportée à la détection et au traitement d’un oedème cérébral. En cas d’hypertension intracrânienne, on propose l’administration de mannitol à 20% (1g/kg de poids) pour autant qu’il n’y ait pas d’insuffisance rénale. Si une perfusion de 1 à 2 l de dextrose I.V. est généralement suffisante, la survenue d’une hypoglycémie peut rendre nécessaire l’utilisation de concentrations plus élevées (20 à 50%). Parallèlement, des doses suffisantes d’électrolytes, et particulièrement de potassium, seront administrées. Les indications habituelles de dialyse sont applicables aux insuffisances rénales associées à cette situation.

 

Une coagulopathie peut nécessiter l’administration de plasma frais congelé, de plaquettes et de vitamine K (seulement s’il y a un syndrome hémorragique ou avant un acte invasif). Le maintien d’un pH gastrique au-dessus de 5 (par les anti H2) évite les épisodes d’hémorragies gastriques.

 

Il convient de maintenir une Pa CO² à 4-4,5 Kpa par une ventilation appropriée.

On surveillera particulièrement la survenue d’épisodes septiques en vue d’utiliser l’antibiothérapie indiquée. Une désinfection intestinale est recommandée.

 

L’acétyl-cystéine IV est indiquée dans le traitement de l’insuffisance hépatique sévère induite par le paracétamol à hautes doses et pour combattre l’hypoxie cellulaire car elle apporte la cystéine nécessaire à la synthèse du glutathion.

 

Dans la plupart des cas, seule la transplantation hépatique peut sauver le malade. La sélection des patients prend en compte des données cliniques (degré d’encéphalopathie) et biologiques (importance de l’élévation de la bilirubinémie et de la chute du PTT).

 

II.        LA CHOLOSTASE

 

On désigne sous de nom de cholostase l’ensemble des manifestations liées à la diminution ou à l’arrêt de la sécrétion biliaire. Comme les altérations sécrétoires isolées de la bilirubine ne répondent pas à la définition de la cholostase, elles seront traitées séparément.

 

A.        ANATOMOPATHOLOGIE

1.         Cholostase obstructive (extra ou intra-hépatique)

 

L’obstruction des voies biliaires intra et extra-hépatiques aboutit à une stase de la bile qui s’accumule en périphérique de l’acinus de Rappaport, à la fois dans les hépatocytes et dans les canalicules biliaires situés entre les hépatocytes. L’accumulation dans les canalicules distend ces derniers, formant en coupe de petits amas arrondis de bile appelés thrombus biliaires, tandis que l’accumulation intracellulaire augmente la pression osmotique du cytoplasme produisant des cellules ballonnées (4 à 10 fois plus grands que les hépatocytes normaux) que l’on qualifie de cellules en dégénérescence spumeuse. Au niveau de l’espace porte apparaît, après quelques jours, un oedème important qui s’accompagne d’un infiltrat marginal de polynucléaires et d’une prolifération de petits canaux biliaires de néoformation. L’ensemble se fibrose progressivement ; le pontage des espaces portes agrandis peut réaliser une dissection nodulaire du foie (cirrhose biliaire secondaire). Les lésions hépatocellulaires ne s’observent qu’après une cholostase prolongée. La levée de la cholostase permet d’observer la régression des lésions hépatiques potentiellement réversibles.

2.         Cholostase non obstructive

 

Dans la cholostase dite fonctionnelle, la cause se situe au niveau des hépatocytes eux-mêmes ou des canalicules biliaires. Le plus souvent, cette cholostase n’est qu’une des manifestations d’un trouble profond du parenchyme hépatique (hépatite virale, hépatite éthylique, ...).

 

B.        CLASSIFICATION ET ETIOLOGIE

1.         La cholostase obstructive extra-hépatique

 

La cholostase extra-hépatique est secondaire à une obstruction des voies biliaires extra-hépatiques. Les causes les plus fréquentes de cholostase extra-hépatique sont la lithiase, les tumeurs du pancréas et la pancréatite chronique.

 

2.         La cholostase obstructive intra-hépatique

 

Elle est due à une obstruction des voies biliaires intrahépatiques (cf. tableau).

 

3.         La cholostase non obstructive

 

Elle est due à un arrêt de la formation de la bile au niveau des hépatocytes. Les causes les plus fréquentes sont les hépatites et la cirrhose biliaire primitive (cf. tableau).

 

C.        MANIFESTATIONS CLINIQUES

 

A l’inverse des atteintes parenchymateuses, l’état général est ben conservé au début de la maladie. Il évolue en fonction de la cause de la cholostase et s’altère rapidement si l’origine est cancéreuse.

 


ETIOLOGIE DE LA CHOLOSTASE

 

A. CHOLOSTASE EXTRA-HEPATIQUE

1. Lithiase cholédocienne.

2. Tumeurs.

*ampullome vatérien, cancer des voies biliaires

*cancer du pancréas

3. Pancréatite chronique.

4. Lésions inflammatoires des voies biliaires.

*sténoses post-opératoires

*cholangite sclérosante

*atrésie des voies biliaires (enfant.)

5. Parasitoses : ascaris, distomatose, échinococcose.

 

B. CHOLOSTASE INTRAHEPATIQUE

a) avec obstruction mécanique.

1. Métastase hépatiques

2. Cancer primitif du foie...

3. Cholangiocarcinome

4. Cholangite sclérosante

5. Maladie polykystique du foie

b) sans obstruction mécanique

1. Hépatites (médicamenteuses, virales, toxiques, bactériennes)

2. Cirrhose biliaire primitive

3. Cholostase post-opératoire aiguë bénigne

4. Grossesse

5. Cholostase idiopathique récurrente bénigne

6. Granulomatoses (tuberculose, sarcoïdose)

7. Alimentation parentérale

8. Hémopathies (lymphomes)

 

 

1.         Ictère

 

L’ictère est une manifestation essentielle mais inconstante de la cholostase. Intense et progressif dans les obstacles complets (cancers extra-hépatiques, pancréatites chroniques), il peut être fluctuant (lithiase cholédocienne) à peine ébauché, ou totalement absent (certains cholostases intrahépatiques).

 

L’ictère cholostatique s’accompagne d’une surcoloration des urines et, éventuellement, d’une décoloration des selles.

 

2.         Prurit

 

Le prurit et les lésions dermatologiques de grattage qui l’accompagnent sont avec l’ictère les principales manifestations cliniques de la cholostase. Le prurit peut précéder l’ictère de plusieurs mois ou années (cirrhose biliaire primitive), de quelques semaines (cholostases néoplasiques intrahépatiques) ou apparaître en même temps que l’ictère (hépatite, cholostase extra-hépatique).

 

On considère que la rétention des sels biliaires est responsable de ce symptôme. En faveur de cette hypothèse, l’utilisation des chélateurs des sels biliaires, la cholestyramine, diminue le prurit.

 

3.         Malabsorption

 

Une stéatorrhée par déficience de sels biliaires dans la lumière intestinale se développe proportionnellement à l’intensité de l’ictère lorsque celui-ci se prolonge. Il en résulte une carence en vitamines liposolubles et en calcium. La carence en vitamine D et en calcium est responsable d’une ostéoporose et d’une ostéomalacie. Des douleurs osseuses, des fractures et des tassements vertébraux en constituent l’expression clinique. La carence en vitamine K est le plus souvent subclinique.

 

D.        LOCALISATION DE LA CHOLOSTASE

 

Les manifestations biologiques de la cholostase sont indépendantes du siège de l’obstruction. Il faut donc se tourner vers d’autres arguments pour le diagnostic.

 

            (1) arguments cliniques

·      Vésicule distendue : présence d’un obstacle biliaire sous le cystique.

·      Triade température, douleur, ictère : angiocholite.

·      Ictère cholostatique progressif : néoplasie.

 

            (2) arguments d’imagerie

·      Echographie.

·      Cholangiographie RMN.

·      Cholangiographie rétrograde per-endoscopique.

·      Cholangiographie trans-hépatique.

·      Histologie hépatique.

 

E.        TRAITEMENT

1.         Traitement de la cause de cholostase

 

Les lésions biliaires et pancréatique seront traitées soit chirurgicalement, soit endoscopiquement (cf. pathologie biliaire et pancréas).

 

2.         Traitement des conséquences de cholostase

a. Diététique et carences vitaminiques

 

L’apport calorique doit être suffisant. Des triglycérides à chaîne moyenne (absorbés sans devoir passer par la phase micellaire) seront préconisés en cas de stéatorrhée.

 

Les vitamines liposolubles (A, D, K) seront administrées, souvent à titre de prévention d’une carence par malabsorption.

 

b. Carence calcique

 

Des suppléments de calcium sous forme de lait écrémé, de fromage blanc et de carbonate de calcium (1,5 g/jour) sont indiqués.

 

c. Prurit

 

La cholestyramine (Questran â : 6 à 10 g par jour au début, la dose d’entretien étant 3 g), est le médicament le plus efficace. Les effets secondaires consistent en nausées et en stéatorrhée. La cholestyramine peut interférer avec l’absorption intestinale de vitamine K et de certains médicaments comme la digitoxine.

 

L’acide ursodéoxycholique (Ursochol â, Ursofalk â 10 à 20 mg/jour) reconstitue un pool de sels biliaires moins toxiques. Outre son effet sur le prurit, il améliore la biologie et l’histologie.

 

III.      L’HYPERTENSION PORTALE

 

Il existe une hypertension portale lorsque le gradient de pression entre la veine porte et la veine cave est supérieur à 6 mm de Hg. Les symptômes de l’hypertension portale résultent essentiellement du développement d’une circulation collatérale court-circuitant le foie et formée de veines dilatées.

 

A.        ETIOLOGIE

 

L’hypertension portale est presque toujours due à un obstacle situé sur la circulation porto-hépatique. Cet obstacle peut siéger en dessous du foie sur la veine porte (bloc infrahépatique), dans le foie (bloc hépatique) ou au-delà du foie (bloc suprahépatique). Suivant la position du bloc par rapport au sinusoïde, on parlera de bloc pré-sinusoïdal, de bloc sinusoïdal ou de bloc post-sinusoïdal.

 

 

Figure 5.

 

 

ETIOLOGIES DE L’HYPERTENSION PORTALE

Type de bloc

Exemple

Caractéristiques

1. Blocs infra-hépatiques

Thrombose portale

 

 

 

 

Invasion tumorale porte

 

Compression extrinsèque

Syndromes myélo-prolifératifs

Déficits en antithrombine III, protéines C, protéine S

Pylephlébite

 

Hépatome

 

Pancréatopathies

Foie = normal

Gradient* = normal

2. Blocs hépatiques

Pré-sinusoïdal

 

 

 

Sinusoïdal

 

 

Post-sinusoïdal

Schistosomiase

Cirrhose biliaire primitive

Fibrose congénitale

 

Cirrhose alcoolique

Intoxication à la vit. A

 

Hépatite alcoolique

Maladie veino-occlusive

Foie = anormal

Gradient* = normal

 

 

Foie = anormal

Gradient* ä

 

Foie = anormal

Gradient* ä

3. Blocs supra-hépatiques

Budd-Chiari primitif

 

 

 

Budd-Chiari secondaire

Syndrome myélo-prolifératif

Hémoglobinurie paroxystique nocturne

 

 

Hépatome, cancer rénal

Foie = anormal

Gradient* = normal

Veinographie anormale

 

* Déterminé par la différence entre la pression sus hépatique bloquée et libre.

 

1.         Les blocs infrahépatiques

 

Ils peuvent résulter :

·      De thromboses portales et spléniques survenant au cours de syndrome myélo-prolifératifs ou comme complication d’une infection dans le territoire porte. Chez l’enfant, la phlébite de la veine ombilicale peut se compliquer de thrombose porte.

·      D’une compression de la veine porte ou de la veine splénique par une tumeur, un kyste, etc. Dans cette catégorie, nous pouvons ranger les hypertensions portales secondaires aux pancréatites et aux tumeurs pancréatiques. Ces lésions peuvent provoquer une sténose de la veine splénique. L’hypertention portale est, dans ce cas, segmentaire et limitée au territoire splénique.

Dans certains blocs infra-hépatiques, une circulation collatérale porto-portale s’établit. Elle est formée d’un réseau de veines dilatées entourant la veine porte (cavernome portal). Les conséquences métaboliques de ce type d’hypertension portale sont moins importantes.

 

2.         Les blocs hépatiques

 

Les cirrhoses, quelle que soit leur étiologie, sont dans notre pays la cause la plus fréquente d’hypertension portale. Le bloc est surtout sinusoïdal et partiellement post-sinusoïdal.

 

3.         Les blocs supra-hépatiques

 

Le syndrome de Budd-Chiari (thrombose ou compression des veines sus-hépatiques) résulte le plus souvent d’un syndrome myélo-prolifératif, plus rarement d’une compression par une tumeur hépatique ou rénale.

 

4.         L’excès de flux sanguin portal

 

Se voit dans les cas de fistule artério-veineuse entre l’artère hépatique et la veine porte ou entre l’artère et la veine splénique.

 

B.        MANIFESTATIONS CLINIQUES

1.         La circulation collatérale

 

L’obstacle à la libre circulation du sang portal provoque la dérivation de ce sang vers les veines formant des communications entre les systèmes cave et porte. Ces veines se dilatent pour former des réseaux variqueux.

 

a. Dérivation supérieure

 

La conséquence clinique la plus importante de l’hypertension portale est le développement de varices gastriques (cardio-tubérositaires) et oesophagiennes. Celles-ci peuvent, si le gradient dépasse 12 mm de Hg, se rompre, provoquant des hémorragies digestives parfois massives. Outre leurs conséquences hémodynamiques, ces hémorragies digestives aggravent l’insuffisance hépatique et peuvent provoquer l’apparition d’un coma hépatique. La mortalité des hémorragies par rupture de varices oesophagiennes chez les cirrhotiques se situe entre 40 et 70%.

b. Dérivation antérieure

 

Le développement inconstant d’une circulation collatérale par le ligament rond vers les veines ombilicales provoque l’apparition d’un réseau veineux superficiel péri-ombilicial désigné sous le nom de « tête de méduse » ou de syndrome de Cruveilhier et Baumgartner (s’il existe un souffle associé). Le courant y est centrifuge à partir de l’ombilic alors que dans l’obstruction de la veine cave inférieure, la circulation collatérale part latéralement de l’aine vers le gril costal avec un flux sanguin de bas en haut.

 

c. Dérivation inférieure

 

Elle draine le sang de la veine mésentérique inférieure vers le rectum (varices) et les veines hémorroïdales (hémorroïdes).

 

d. Dérivation postérieure

 

Elle provoque une augmentation de débit à travers les anastomoses pléno-rénales préexistantes et contribuent à la formation de varices gastriques (cardio-tubérositaires).

 

2.         L’ascite

 

Cf. ascite.

 

3.         L’encéphalopathie

 

L’association de shunts intra ou extra-hépatiques et d’une insuffisance hépatocellulaire aboutit à une encéphalopathie.

 

4.         La splénomégalie

 

Elle est secondaire à la congestion et à l’hyperplasie du tissu réticulo-endothélial. Souvent asymptomatique, elle peut être responsable d’hypersplénisme qui se caractérise par une anémie, une leucopénie et une hypoplaquettose. L’hypersplénisme serait lié à des phénomène de stase, de séquestration et de phagocytose. Une splénomégalie peut être observée dans les affections hépatiques en dehors de toute hypertension portale (hépatite virale, mononucléose infectieuse).

 

5.         La gastropathie hypertensive

 

Cette gastropathie est une manifestation fonctionnelle spécifique de l’hypertension portale. L’aspect endoscopique est celui d’un réseau réticulé blanchâtre accompagné de plaques érythémateuses et de pétéchies. Cette gastropathie est responsable de 10 à 20% des saignements digestifs compliquant l’hypertension portale.

 

C.        DIAGNOSTIC

 

Plusieurs méthodes peuvent être utilisées pour confirmer l’existence d’une hypertension portale et pour déterminer son origine.

 

1.         Endoscopie

 

La fibroscopie permet la visualisation des varices oesophagiennes et gastriques ainsi que les gastropathies d’hypertension portale. La laparoscopie permet de visualiser des dilatations des veines épiploïques. En outre, elle est utile pour confirmer ou infirmer l’existence d’une lésion hépatique.

 

2.         Imagerie

 

L’échotomographie éventuellement couplée au Doppler est utilisée pour son caractère non invasif. Elle permet de visualiser la circulation collatérale, d’évaluer le diamètre de la veine porte et la vitesse du flux, de déceler la présence d’ascite ou d’une splénomégalie. La RMN est une méthode prometteuse pour l’évaluation des vaisseaux.

 

3.         Mesure de la pression portale

 

La méthode habituellement utilisée pour mesurer la pression portale consiste en une détermination de la pression régnant dans les sinusoïdes hépatiques. A cet effet, un cathéter est introduit par voie périphérique et conduit sélectivement dans une veinule sus-hépatique. S’il obstrue complètement cette veinule, il permet une mesure de la pression sinusoïdale (pression sus-hépatique bloquée). La pression post-sinusoïdale ou pression sus-hépatique libre s’obtient en retirant progressivement le cathéter. La différence entre ces deux pressions constitue le gradient sus-hépatique (N£ 6 mm de Hg). Celui-ci est élevé en cas de cirrhose éthylique (bloc sinusoïdal et post-sinusoïdal) mais pas dans les hypertensions portales pré-sinusoïdales (bloc infra-hépatique ou schistosomiases par exemple).

4.         Visualisation radiologique de la circulation portale

 

Elle confirme l’hypertension portale (visualisation de la circulation collatérale et, éventuellement, flux portal centrifuge), permet la mise en évidence de la localisation du bloc portal et démontrer l’existence éventuelle de lésions (thromboses, compressions) des vaisseaux portes. Tous ces renseignements sont indispensables pour poser les indications des thérapeutiques chirurgicales. Cette visualisation se fait par artériographie sélective mésentérique et/ou coeliaque (le temps de retour veineux visualise la circulation porte).

 

D.        TRAITEMENT

 

Le traitement de l’hypertension portale est, en général, limité à la prévention ou au contrôle de l’hémorragie par rupture de varices oesophagiennes. Plus rarement, on sera amené à traiter l’ascite ou l’hypersplénisme.

 

1.         Prévention primaire

 

Les malades ayant des varices oesophagiennes à haut risque de rupture mais qui n’ont jamais saigné seront traités par des médicaments : bêta-bloquants non sélectifs (propranolol) qui diminuent le débit cardiaque et le débit collatéral portosystémique. Ils diminuent le risque d’hémorragie et ont un effet bénéfique sur la survie.  En cas de contre-indication, on proposera des ligatures endoscopiques.

 

2.         Traitement de l’hémorragie aiguë

 

Le but est de contrôler l’hémorragie, prévenir la récidive et réduire la mortalité.

 

a) Réanimation

 

La correction de l’hypovolémie par des  colloïdes est indispensable. Des transfusions de sang sont parfois nécessaires. Leur volume sera aussi limité que possible (il faut obtenir un hématocrite optimum de 25-30%) afin d’éviter d’induire une récidive hémorragique.

 

La résorption massive d’ammoniaque résultant de la dégradation par la flore intestinale du sang présent dans le tube digestif, joue un rôle important dans le coma hépatique. Pour prévenir cette résorption, il faut évacuer le sang au moyen de lavements et administrer du lactulose ou du lactilol (cf. traitement de l’encéphalopathie).

 

Une infection bactérienne étant fréquente chez le cirrhotique qui saigne, une antibiothérapie empirique est préconisée.

 

b) Drogues vasoactives

 

La somatostatine et la glypressine (un analogue de la vasopressine) sont des vasoconstricteurs splanchniques.  Administrées par voie veineuse dès l’admission et pendant quelques jours, couplées au traitement endoscopique, elles contribuent à l’arrêt de l’hémorragie.

 

c) Traitement endoscopique

 

On utilise la sclérose (produit sclérosant injecté dans et autour de la varice qui saigne), les ligatures (varice aspirée dans un cylindre et mise en place d’une ligature élastique à sa base) ou les colles biologiques (surtout indiquées en cas de varices gastriques).


 


Figure 6

 

La sonde de Linton est utile en cas d’exsanguination.

Le ballon unique, en forme de poire, est gonflé avec 600 ml d’air et la sonde est mise en traction (1 kg). La durée de la compression ne doit pas dépasser 12 heures.

En cas d’hémorragies réfractaires au traitement endoscopique on peut envisager la réalisation d’un shunt intra-hépatique par voie jugulaire (pour les patients Child B ou C c’est-à-dire ayant une mauvaise fonction hépatique)) ou un traitement chirurgical (si Child A c’est-à-dire ayant une bonne fonction hépatique).

 
En cas d’exanguination, on utilisera la sonde de Linton (fig. 6).

 

3.         Prévention de la récidive hémorragique

 

Celle-ci étant fréquente, on recommande après contrôle de l’hémorragie initiale, d’entreprendre un programme d’éradication des varices par de séances répétées de ligatures endoscopiques couplées à un traitement médicamenteux par bêta-bloquants non sélectifs (propranolol).

 

4.         Hémorragie réfractaire ou récidivante malgré les drogues vasoactives et le traitement endoscopique

a) Le shunt porto-cave par voie transjugulaire en cas de cirrhose Child B ou C

 

Figure 7

Une prothèse est placée par voie transjugulaire entre une veine sus-hépatique et la branche droite de la veine porte, ce qui permet de décomprimer le système porte.

 

 

 

 

 

 

 

 

b) Traitement chirurgical : en cas de cirrhose Child A

 

Deux types d’interventions peuvent être réalisés : les anastomoses porto-caves et les transplantations hépatiques.

 

Figure 8

Parmi les anastomoses porto-caves, l’anastomose porto-cave termino-latérale est la plus anciennement utilisée.

Techniquement assez aisée à réaliser, elle assure une bonne décompression portale mais se complique à long terme d’encéphalopathies (30%) parfois invalidantes (17%).

 

 

 

 

 

L’anastomose spléno-rénale proximale (implantation après splénectomie du bout proximal de la veine splénique dans la veine rénale).

 

Figure 9

Elle permet de réaliser une dérivation porto-cave partielle. Elle se complique moins souvent d’encéphalopathie mais est moins efficace dans la prévention des hémorragies.

 

 

 

 

 

 

L’anastomose mésentérico-cave (interposition d’une prothèse en Téflon d’un calibre de 8 mm entre la veine mésentérique et la veine cave).

 

Figure 10

 

Elle assure une bonne protection contre les hémorragies au prix d’une fréquence raisonnable d’encéphalopathie. Elle a l’avantage, par rapport à l’anastomose porto-cave latéro terminale, de ne pas rendre plus complexe une transplantation hépatique ultérieure.

 

 

 

 

 

 

Lorsque l’obstacle siège sur la veine splénique, la splénectomie supprime totalement l’hypertension portale. Il en va de même de la cure chirurgicale des anévrismes artério-veineux du système portal.


La transplantation hépatique est le meilleur traitement définitif puisqu’elle assure un traitement à la fois de l’insuffisance hépatique et de ses complications.

 

IV.       L’ASCITE

A.        PATHOGENIE

 

L’ascite ne se développe généralement que lorsque deux conditions sont réunies :

·      Une hypertension portale.

·      Une maladie hépatique.

 

Dans l’hypertension portale isolée, comme par exemple chez certains malades atteints de blocs infra-hépatiques, l’ascite est peu fréquente et modérée. Une rétention hydrosodée isolée provoque un anasarque et non une simple ascite : c’est l’hypertension portale qui localise la rétention hydrosodée au péritoine.

 

L’augmentation de la résistance portale dans l’hypertension portale est due à des raisons mécaniques (réduction de l’espace vasculaire par fibrose, capillarisation des sinusoïdes ou hypertrophie des hépatocytes) et à des raisons fonctionnelles (vasoconstriction liée à une prolifération des myoblastes, hypersensibilité à la sérotonine ou augmentation des substances vasoconstrictrices telles que l’endothéline 1). L’augmentation de la pression portale n’est pas seulement liée à une augmentation des résistances mais est aussi déterminée par une augmentation du débit efférent portal splanchnique qui vise à compenser les effets d’une vasodilatation dans le but de maintenir à tout prix la vascularisation hépatique. Cette vasodilatation est induite par une quantité excessive de substances vasodilatatrices (glucagon, substance P, oxyde nitrique, ...). Cette vasodilatation s’accompagne de phénomènes compensateurs : une augmentation du débit splanchnique et périphérique (circulation hyperdynamique) et une stimulation du système rénine-angiotensine-aldostérone avec rétention hydrosodée.
Dans la cirrhose compensée, cette rétention hydro-sodée est inhibée dès que le remplissage vasculaire est restauré. Dans la cirrhose décompensée, l’état de remplissage suffisant tendant à compenser la vasodilatation ne peut plus être atteint, l’hyperactivation de la rétention se poursuit avec décompensation ascitique et ses répercussions rénales (insuffisance rénale et syndrome hépato-rénal).

 

B.        MANIFESTATIONS CLINIQUES

 

On note une augmentation du volume de l’abdomen associée à une prise de poids ainsi qu’une matité des flancs encadrant la sonorité préombilicale.

 

Une infection du liquide d’ascite peut survenir spontanément (environ 10%) ou être secondaire à des ponctions : il s’agit de la péritonite bactérienne spontanée. Le plus souvent, il s’agit de cirrhoses décompensées. Les organismes responsables sont généralement des bacilles gram négatifs. La symptomatologie consiste en douleurs abdominales, pyrexie et sensibilité de l’abdomen à la palpation.

 

C.        DIAGNOSTIC

 

L’échographie permet de déceler la présence de 200 ml d’ascite et est donc l’examen de choix pour le diagnostic.

 

 

CAUSES D’ASCITE

1. TRANSSUDAT

               (PROTEINES < 30 G/L)

 

2. EXSUDAT

               (PROTEINES ³ 30 G/L)

 

 

 

 

 

3. CHYLEUSE (LACTESCENTE)

CIRRHOSE

INSUFFISANCE CARDIAQUE GLOBALE

 

NEOPLASIE

TUBERCULOSE

INSUFFISSANCE VENTRICULAIRE DROITE

PERICARDITE CONSTRICTIVE

PANCREATITE

SYNDROME DE BUDD-CHIARI

 

COMPRESSION OU OBSTRUCTION DES VOIES LYMPHATIQUES

 

En vue de préciser la cause de l’ascite, outre les données cliniques, l’examen du liquide d’ascite obtenu par ponction est fondamental. Il comporte les éléments suivants :

·      aspect : un liquide trouble plaide en faveur d’une infection bactérienne du liquide. Une ascite sanglante est en général associée à une affection cancéreuse. Une ascite chyleuse correspond à une obstruction des lymphatiques et est en général secondaire à une tumeur maligne ou à un lymphome.

·      examen microscopique : dans une infection bactérienne, le taux de leucocytes est supérieur à 500/mm³, et le taux de polynucléaires est supérieur à 250/mm³. Dans la tuberculose, on observe une prédominance lymphocytaire.

·      examen bactériologique : outre les cultures habituelles (10 ml d’ascite dans un flacon à hémoculture), qui mettent en évidence un germe gram négatif dans 2/3 des cas et un pneumocoque dans 1/3 des cas, on recherche la présence de B.K.

·      cytologie : la recherche de cellules malignes exige l’utilisation de colorations spéciales et éventuellement de l’immunocytochime compte tenu des difficultés à différencier les cellules néoplasiques des cellules endothéliales.

·      examen chimique : la mesure du taux de protéines permet de séparer les liquides d’ascite en transsudats (moins de 30 g de protéines/l) et exsudats (plus de 30 g de protéines par litre). Une imprécision existe entre 20 et 30 g/l.

 

La mesure du gradient de concentration albumine sérique/albumine ascitique est en corrélation avec la pression portale et peut aider au diagnostic différentiel de la cause d’ascite. Il est inférieur à 11 g/l lorsque la pression portale est normale et supérieur à 11 g/l dans les ascites dues à une hypertension portale.

 

Le dosage de la LDH peut éventuellement être utile dans les cas litigieux. En effet, lorsque son taux dans le liquide d’ascite excède de façon importante le taux sanguin, on peut suspecter soit une affection cancéreuse, soit une tuberculose.

 

D.        TRAITEMENT

1.         Traitement médical

 

Le principe général du traitement est de réduire les apports en sodium et d’en favoriser l’excrétion urinaire.

 

Si la rétention hydro-saline est modérée, le traitement peut être commencé ambulatoirement. En cas d’ échec (± 80% des cas) le malade doit être hospitalisé. Le traitement peut être considéré satisfaisant si une perte de poids de 1kg/j est obtenue lorsqu’on observe de l’ascite et des oedèmes et de 500 g par jour lorsqu’il n’y a que de l’ascite.

 

Le régime comportera un maximum de 1 à 2 g de sel (40 à 80 mEq de Na) par jour, en évitant d’excéder la quantité excrétée dans l’urine. Cette réduction des apports en sel peut être obtenue en excluant les aliments salés et en supprimant toute adjonction de sel aux aliments.

Une restriction hydrique (maximum 1 l à 1,5 l/jour) n’est indiquée que chez les patients présentant une hyponatrémie et chez ceux dont le poids augmente malgré le traitement médical.

 

Le repos au lit peut favoriser la mobilisation des liquides en augmentant la perfusion rénale.

 

TRAITEMENT DE L’ASCITE

1. Régime sans sel (40 à 80 mEq/j) et repos au lit.

 

2. Diurétiques

Spironolactone (Aldactone â) (100-400 mg/j)

Furosémide (Lasix â) (40-120 mg/j)

 

3. Ascite réfractaire

Paracentèse + Albumine (8 g/l)

Shunt intra-hépatique par voie trans-jugulaire

 

Des diurétiques doivent être fréquemment associés aux mesures diététiques. La présence d’une insuffisance rénale représente une contre-indication à l’utilisation des diurétiques. Les électrolytes sanguins doivent être contrôlés 2 fois par semaine.

 

Plusieurs groupes de diurétiques sont disponibles. Les diurétiques agissant sur le tube distal, inhibent la réabsorption du sodium et la sécrétion de K+ et de H+. Ils réalisent donc une épargne de potassium. Parmi ceux-ci, l’antagoniste de l’aldostérone (Aldactone â) est le plus souvent utilisé. Les diurétiques agissant sur la branche ascendante de Henle inhibent le transport actif des chlorures et provoquent parallèlement une natriurèse et une perte de potassium. On range dans cette catégorie le furosémide (Lasix â).

 

Il convient de choisir en premier lieu un diurétique à action distale en vue de réduire l’hyperaldostéronisme. L’Aldactone sera très souvent efficace pour autant que la fonction rénale soit normale. La dose initiale est de 100 mg par jour. L’action peut ne se manifester qu’après 2 ou 3 jours. Les doses ne sont donc augmentées que tous les 3 jours. Dans certains cas, une dose de 400 mg/j peut être indispensable. Des substituts de potassium ne sont pas indiqués au cours du traitement à l’Aldactone. En cas d’échec, il convient d’ajouter du furosémide à doses croissantes en commençant par 40 mg tous les deux jours. Cette dose peut être augmentée dans les cas rebelles jusqu’à 120 mg/j. Si le traitement donne un résultat positif, des instructions sont données au patient pour qu’il surveille son régime et son poids régulièrement. La restriction sodée peut être moins stricte à partir du moment où le traitement se révèle efficace. Il faut régulièrement ajuster la dose de diurétiques.

 

2.         Complications du traitement médical

 

Les effets secondaires du traitement diurétique sont dus principalement aux désordres hydro-électrolytiques et de l’équilibre acido-basique qu’ils peuvent engendrer. Ils peuvent être le point de départ d’une encéphalopathie ou d’une insuffisance rénale.

 

3.         Ascite réfractaire

 

En général, la cirrhose est sévère. Les paracentèses (vidange d’ascite) associées à des perfusions d’albumine sont indiquées dans des ascites importantes et réfractaires, lorsque le traitement aux diurétiques se révèle inefficace ou contre-indiqué.

 

 


CHAPITRE IV :
LES HEPATITES VIRALES

 

Six virus spécifiquement responsables d’hépatites (virus hépatotropes) sont actuellement connus (A, B, C, D, E, G).

 

D’autres virus du groupe de l’herpès peuvent occasionnellement provoquer une hépatite : mononucléose infectieuse, cytomégalovirus, herpès. La fièvre jaune est une affection virale d’origine tropicale.

 

I.         ANATOMOPATHOLOGIE

 

D’un point de vue morphologique, l’hépatite virale est une affection nécrosante qui après une phase initiale aiguë peut guérir avec ou sans séquelles ou évoluer sur un mode chronique.

 

A.        HEPATITES AIGUES

 

Le tableau combine une atteinte diffuse des hépatocytes et une infiltration inflammatoire à prédominance de cellules mononucléées.

 

L’atteinte hépatocytaire peut se manifester par une ballonisation des cellules dont le contour s’arrondit tandis que le cytoplasme et le noyau se clarifient et par une nécrose acidophile qui conjugue un cytoplasme acidophile et un noyau pycnotique ou karyorrectique. Certaines cellules nécrotiques se transforment en corps acidophiles ovoïdes que l’on trouve dans les lames hépatocellulaires et dans les sinusoïdes (corps de Councilman). La nécrose est souvent focale et prédomine en périphérie de l’acinus. Elle peut s’étendre et devenir confluante.
Concomitamment à la nécrose, se manifestent des phénomènes de régénération sous forme de mitoses, cellules plurinucléées et d’hépatocytes basophiles, de petite taille, qui en s’empilant forment des lames pluristratifiées.

 

La réaction inflammatoire est essentiellement mononucléée, constituée de lymphocytes et de macrophages. Elle s’étend d’une manière diffuse dans l’acinus mais est plus marquée aux endroits de nécrose focale. Les espaces portes sont entrepris. Ils sont élargis, de contour irrégulier. Les cellules de Kuppfer sont hyperplasiques et montrent des images de phagocytose.

La cholostase survient tardivement dans l’évolution. Elle se manifeste par des thrombus biliaires.

 

B.        HEPATITE FULMINANTE

 

La nécrose hépatique massive entraîne une destruction étendue du parenchyme s’accompagnant de collapsus de la trame de réticuline. Les lésions sont irrégulièrement dispersées dans le foie, respectant certaines zones. Les foyers nécrotiques peuvent former des ponts entre les structures portes et centrolobulaires voisines (bridging necrosis) ou s’étendre à des lobules entiers voire à plusieurs lobules contigus (nécrose multilobulaire).

 

C.        HEPATITES CHRONIQUES

1.         Hépatites chroniques en général

 

Environ 10% des hépatites virales B et 50 à 80%n des hépatites virales C peuvent évoluer vers un stade chronique. Quel que soit l’agent étiologique, l’image reste similaire et se caractérise par une atteinte diffuse d’un processus inflammatoire nécrosant et fibrosant. Les lésions se concentrent sur les espaces portes et la zone péri-portale. L’atteinte lobulaire est plus inconstante.

La classification actuelle des hépatites chroniques est basée sur :

·      Le grande de la nécro-inflammation (absent, modérée, sévère).

·      Le stade de la réaction fibreuse (absente, modérée, sévère).

 

 

 


Figure 12

2.         Aspect particulier aux hépatites B et C

 

Dans l’hépatite B on peut observer des modifications d’un certain nombre d’hépatocytes dont tout ou partie du cytoplasme se clarifie en prenant un aspect granulaire (image en verre pilé). Cet aspect est lié à des modifications du réseau microtubulaire et à l’accumulation d’antigènes viraux (antigènes de surface de l’hépatite B). On peut mettre ces derniers en évidence par des réactions immuno-cytochimiques.

 

Les lésions de l’hépatite C se distinguent par la fréquence de l’atteinte lobulaire, par une distribution segmentaire et focale de l’inflammation portale avec formation d’agrégats lymphoïdes portaux, par une stéatose modérée et par des lésions de petits canaux biliaires.

 

D.        CIRRHOSE POST NECROTIQUE

 

Certaines hépatites chroniques actives évoluent rapidement ou insidieusement vers une cirrhose. Celle-ci se caractérise par une fibrose mutilante.

 

Les nodules de régénération sont souvent plus volumineux que dans la cirrhose alcoolique.

 

II.        EPIDEMIOLOGIE ET EVOLUTION SEROLOGIQUE

A.        VIRUS A (Virus à ARN)

 

La transmission se fait par voie féco-orale par l’eau ou les aliments (salades, fruits, mollus-ques, huîtres) contaminés par des matières fécales. Avec l’amélioration des conditions socio-économiques le pourcentage de sujets adultes ayant rencontré le virus A diminue : il est actuellement inférieur à 50%.

 

La période d’incubation est de 15 à 45 jours (moyenne 4 semaines). La virémie est de trop courte durée et d’importance trop faible pour être détectable de façon routinière. La présence de virus dans les selles atteint un maximum et diminue très rapidement avant même que les symptômes cliniques ne soient apparus.

 

Figure 13

 

La présence d’anticorps Anti-HAV (Hépatite A Virus) dans le sérum peut être observée entre la phase aiguë et la phase de convalescence. Alors que dans d’autres affections virales, l’ascension du titre survient endéans deux à trois semaines, dans l’hépatite A le laps de temps peut être plus long (4 à 6 semaines).

 

La détermination des deux classes d’anticorps (anti-HAV-IgM et anti-HAV-IgG) permet d’établir avec plus de précision le stade d’évolution de la maladie. En effet, les anticorps de la classe IgM surviennent environ vers la 4e semaine. Dans les semaines qui suivent, ce rapport va diminuer et après quelques semaines (8 à 12), seuls les anticorps de la classe IgG sont prédominants, persistent ad vitam et sont associés à une immunité à long terme.

 

B.        VIRUS B (Virus à ADN)

 

La transmission se fait essentiellement par voie sexuelle ou par le sang :

·      Percutanée via le sang ou les dérivés du sang (fibrinogène, facteurs anti-hémophiliques) : transfusion, hémodialyse, seringue des toxicomanes, contact d’une érosion cutanée avec du sang contaminé (personnel médical et paramédical), matériel insuffisamment stérilisé (tatouages, soins dentaires).

·      Sexuelle : homo et hétérosexuels.

·      Périnatale ou verticale : lors de l’accouchement d’une mère infectée.

·      Familiale ou horizontale : entourage proche d’un sujet infecté.

 

La période d’incubation varie de 30 à 180 jours et est, en moyenne, de 75 jours.

 

Trois antigènes du virus de l’hépatite B ont été mis en évidence :

·      l’antigène de surface : HBsAg.

·      L’antigène nucléaire : HBcAg (« core » antigen ; antigène de nucléocapside).

·      L’antigène e : HBeAg (sous unité de l’HBcAg).

 

L’HBcAg reste dans le foie, les deux autres pouvant se trouver dans le sang. A chacun de ces trois antigènes correspond un anticorps (anti-HBs, anti-HBc, anti-HBe). Tous trois sont utilisés en routine clinique.

 

 

 

Figure 14a

 

HEPATITE

 
HEPATITE

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Figure 14b

L’HBsAg apparaît dans le sérum de 2 à 8 semaines avant le début clinique et biologique de la maladie. Au cours d’une hépatite simple il disparaît en général après quelques semaines, mais il persiste durant des mois voire des années chez 10% des malades. Des anticorps antiHBs apparaissent dans le sang 4 à 5 mois après. l’infection.

Ils atteignent un taux maximum vers le 12ème mois puis décroissent progressivement en plusieurs années. Leur apparition peut être considérée comme un signe de bon pronostic témoignant de la guérison de l’infection. L’anti-HBs peut aussi apparaître, sans infection préalable, après immunisation active (vaccination).

 

L’antigène HBe apparaît en même temps que l’HBsAg mais sa présence est plus fugace. Il témoigne d’une phase de réplication virale et indique que le malade est contagieux.  L’anticorps anti-HBe apparaît quelques semaines après le début de la maladie dans les cas favorables mais pas dans les infections chroniques.

 

L’antigène HBc n’est pas présent dans le sérum. L’anticorps anti-HBc apparaît plus précocement que l’anti-HBe. Les IgM anti-HBc disparaissent en quelques semaines, alors que les IgG persistent durant des années. L’anti-HBc est absent chez les sujets vaccinés.

 

L’ADN viral B, détectable dans le sang, est considéré comme un marqueur de réplication virale et donc d’infectivité.

 

Le virus B mutant est caractérisé par une mutation au niveau de la région pré-core avec incapacité de sécréter l’AgHBe mais poursuite de la réplication virale (ADN positif).

 

Le tableau suivant résume la signification des divers marqueurs de l’hépatite B.

 

 

INTERPRETATION DES MARQUEURS DE L’HEPATITE B

HBsAg

HBeAg

HBcAc

HBcAc IgM

HBeAc

HBsAc

Interprétation

 

-

-

-

-

-

-

Absence de contact avec le virus

 

+

+

+

+

-

-

Hépatite aiguë (début).
Contagieuse

 

+

-

+

+

+

-

Hépatite aiguë (fin). Non contagieuse

 

-

-

+

-

+

-

Hépatite aiguë en voie de guérison

 

-

-

+

-

+

+

Antécédents d’hépatite B

 

-

-

-

-

-

+

Etat post vaccination

 

+

+

+

+ ou -

-

-

Hépatite chronique (début)

 

 

C.        VIRUS d (virus à ARN)

 

C’est un virus défectif, dépendant du virus B pour sa réplication.

 

La transmission peut se faire de personne à personne ou par voie parentérale. Cette transmission se fait soit à l’occasion d’une infection simultanée avec le virus B (co-infection) soit lors d’une surinfection chez un malade porteur du virus B.

 

Au cours de l’infection aiguë l’antigèned est détecté transitoirement, suivi de l’anticorps d. Au cours de l’infection chronique, les meilleurs marqueurs sont l’anti d sérique et l’antigène d dans le foie.

 

D.        VIRUS C (virus à ARN)

 

La transmission se fait par le sang ou par du matériel souillé par du sang contaminé.

 

·      Percutanée par le sang ou les dérivés du sang, les aiguilles contaminées (toxicomanes) ou par des piqûres accidentelles.

 

·      Sexuelle. Le risque est moins grand que pour le virus B (de l’ordre de 5%).

 

·      Interfamiliale horizontale via du matériel contaminé par du sang infecté.

·      Verticale de la mère à l’enfant (de l’ordre de 5%).

 

·      Inconnue (40%).

 

La durée de la période

 

Figure 15

Le diagnostic du virus C se fait par la recherche de l’anticorps anti-VHC. Ce test ne se positive qu’après 2 mois et est donc rarement présent au stade aigu. L’apparition d’anticorps anti VHC ne témoigne pas de la guérison de l’infection.

 

 

 

 

L’ARN du virus C peut être détecté par PCR dans le sang et signe une réplication virale. Cette mesure est utile pour le diagnostic d’une hépatite aiguë C (avant la positivation des anti VHC) ou pour le suivi de l’efficacité du traitement anti-viral.

 

E.        VIRUS E

 

Le virus de l’hépatite E est transmis par voie féco-orale comme le virus de l’hépatite A. Il est responsable d’épidémies principalement en Asie et au Moyen Orient.

 

F.        VIRUS G

 

Le virus de l’hépatite G est transmis par voie sanguine et apparaît peu pathogène.

G.        AUTRES VIRUS

1.         Mononucléose infectieuse (EBV)

 

Cette maladie est provoquée par le virus herpétique d’Epstein-Barr (EBV). Elle se présente surtout chez les adolescents et les jeunes adultes. Elle est associée à une augmentation des anticorps IgM contre les antigènes viraux d’Epstein-Barr. La réaction de Paul et Bunnel garde une grande valeur diagnostique. L’atteinte hépatique de la mononucléose infectieuse est généralement modérée et ressemble à celle des autres hépatites virales. Un ictère n’est présent que dans 10% des cas, une splénomégalie dans 50% des cas.

 

2.         Cytomégalovirus (CMV)

 

Ce virus peut être isolé de l’urine et de la salive et peut être transmis par transfusion sanguine. L’atteinte hépatique peut n’être qu’un élément d’une maladie diffuse chez les patients immuno-déprimés. On observe une augmentation du taux d’anticorps fixant le complément ainsi que des anticorps anti-IgM.

 

3.         Fièvre jaune

 

Cette infection endémique en Amérique du Sud et en Afrique Centrale est due à un arbovirus du groupe B et est transmise par des moustiques infectés. D’autres hépatites virales de ce type existent (fièvre de Lhassa, fièvre d’Ebola, etc...).

 

 

DIAGNOSTIC ETIOLOGIQUE DE L’HEPATITE VIRALE AIGUE

VIRUS

MARQUEURS VIRAUX

Hépatite A

Hépatite B

Hépatite B delta (d)

Hépatite C

Hépatite EBV

 

Hépatite CMV

anti HA IgM

HBsAg, Anti-HBc IgM

Ag d, anti d

Anti VHC (après 2 mois)

Paul et Bunnel, anti-EBV IgM

Lymphocytose, lymphocytes atypiques

Anti-CMV IgM

Lymphocytes atypiques

 

III.      MANIFESTATIONS CLINIQUES

 

-         Dans 80% des cas les hépatites virales aiguës sont asymptomatiques.

-         Lorsqu’elles sont symptomatiques, le tableau est assez stéréotypé et identique pour tous les virus responsables.

 

Le tableau comprend alors trois phases.

 

1.         Phase pré-ictèrique

 

Durant quelques jours (2 à 15 jours) le patient se plaint de troubles peu spécifiques : asthénie, anorexie, dégoût des graisses. Une douleur épigastrique est fréquemment notée, parfois assez intense au point de prêter à confusion avec une douleur d’origine vésiculaire. La fièvre est, en général, modérée mais une fièvre augmentant brutalement en intensité (39,5°) peut se présenter durant 1 à 4 jours. Des arthralgies sont souvent présentes ; un rash de type urticarien est plus rare.

 

2.         Phase ictérique

 

La durée de cette phase est très variable. Si, en général, elle est de 2 à 6 semaines, elle peut persister dans de rares cas pendant plus de 3 mois. Les symptômes de la phase préictérique ont tendance à s’amender sauf de l’asthénie. L’ictère atteint son maximum en quelques jours au-delà desquels l’appétit redevient normal. Une hépatosplénomégalie peut s’observer. Un amaigrissement se manifeste durant les premières semaines. Les selles sont plus ou moins décolorées avec éventuellement stéatorrhée.

 

3.         Phase post-ictérique

 

Parallèlement au retour de la bilirubinémie à un taux normal, l’ensemble de la symptomatologie disparaît progressivement. Le symptôme le plus rebelle est l’asthénie qui peut persister longtemps.

 

D’autres formes cliniques peuvent exister durant la phase aigüe avec une évolution soit favorable - formes anictériques, cholostatiques ou récidivantes (surtout pour l’hépatite A), formes avec manifestations extra-hépatiques (atteintes neuro-musculaire, hématologique, rénales, rhumatologiques, dermatologiques)- soit défavorable : hépatite aiguë sévère (avec chute du PTT inférieure à 50%) pouvant déboucher sur une hépatite fulminante ou sub-fulminante dans 1% des cas (voir chapire insuffisance hépatique aiguë).

 

IV.       DIAGNOSTIC BIOLOGIQUE

 

La bilirubine est élevée dans les formes ictériques.

 

L’anomalie la plus importante est l’augmentation du taux des transaminases qui est précoce et précède en générale l’ictère. Au cours de l’évolution, elle dépasse souvent de 10 fois la limite supérieure de la normale. Sa régression est variable : des taux légèrement anormaux peuvent persister durant quelques mois après disparition de l’ictère.

 

Le taux de la phosphatase alcaline est normal ou légèrement élevé (2x la normale) sauf dans la forme cholostatique où elle est beaucoup plus élevée.

 

La ¡ GT est élevée (en général 5 à 10 fois la normale).

 

La présence des marqueurs viraux (voir tableau) précédemment décrits est un élément important du diagnostic des hépatites virales et aide grandement au diagnostic différentiel des cytolyses aiguës (cf. tableau).

 

 

CAUSES DE CYTOLYSE AIGUE

ALT > 10 fois la normale

ALT < 10 fois la normale

Causes

Moyens diagnostiques

Causes

Moyens diagnostiques

Hépatite virale (A, B, C, D)

Hépatite médicamenteuse

 

Hépatite autoimmune

Foie hypoxique

 

Migration lithiasique biliaire

 

Budd-Chiari

Maladie de Wilson

Sérologie

 

Contexte clinique – biopsie

Anticorps anti-tissus

Echographie Doppler – biopsie

Echographie – cholangiographie (RMN, rétrograde

Echographie Doppler

Cu urinaire, céruloplasmine

Hépatite virale (C, CMV, EBV)

Poussée aiguë d’une hépatite chronique B

Hépatite médicamenteuse

Hépatite alcoolique

Sérologie

 

Sérologie

 

Contexte clinique, biopsie

Biopsie – biologie

 

 

 

V.        EVOLUTION ET PRONOSTIC

 

L’évolution à long terme est toujours favorable pour l’hépatite A, l’hépatite E, la mononucléose et l’hépatite à cytomégalovirus.

 

Quatre types d’évolution au long courts ont été décrits pour les hépatites B et C : les porteurs asymptomatiques du virus, l’hépatite chronique, la cirrhose, le carcinome hépatocellulaire.

A.        PORTEURS SAINS

 

Il s’agit de sujets porteurs du virus B ou C dans le foie, sans lésions hépatiques associées. Les transaminases sont normales. Au niveau de la sérologie, on observe un HBsAg positif, le plus souvent en l’absence de multiplication virale (HBeAg et ADN VHB négatifs) ou un anti-VHC positif associé à de l’ARN viral positif par PCR.

 

B.        HEPATITE CHRONIQUE

 

Elle se définit par la persistance d’une élévation des transaminases plus de six mois après l’épisode aigu. L’évolution vers la chronicité s’observe dans environ 10% des cas d’hépatite B ainsi que dans environ 50 à 80% des hépatites C. La persistance d’une inflammation hépatique après la phase aiguë est liée soit à une réponse immunitaire inadéquate avec impossibilité d’éliminer les antigènes viraux, soit à un processus auto-immune cytotoxique.

 

La symptomatologie consiste en une lassitude persistante, une gêne de l’hypocondre droit ou du prurit. Des arthralgies peuvent être le symptôme prédominant. Une hépatomégalie peut être présente.

 

L’anomalie biologique constamment retrouvée est l’élévation du taux de transaminases qui est habituellement modérée (entre 1,5 et 5 x la normale). Les transaminases ALT sont supérieures aux AST. La bilirubine n’est élevée et le PTT abaissé qu’en cas d’insuffisance hépatique chronique (associée à une hépatite chronique très active ou avec une cirrhose). Au niveau sérologique, l’hépatite chronique B et l’hépatite chronique C se caractérisent par la persistance pendant plus de 6 mois, respectivement de l’AgHBs (pour la B) et de l’anticorps anti VHC et de la virémie C par PCR (pour la C).

 

L’hépatite chronique B évolue schématiquement en trois phases, parfois suivie d’une réactivation :

·      Une phase de réplication virale (AgHBe +, DNA sérique +) avec une faible activité biologique (transaminases peu élevées) et histologique pouvant durer de 5 à 10 ans (tolérance immune).

·      Une diminution de la réplication virale avec forte activité biologique et histologique. Au moment où intervient la séro-conversion (AgHBe ® anti HBe), des lésions irréversibles de cirrhose peuvent être constituées chez certains patients (clairance immune).

·      Une disparition de la réplication virale (HBeAg -, antiHBe +) ainsi que de l’activité biologique et histologique. (Portage sans réplication virale : le virus B est intégré).

·      Parfois, spontanément ou à l’occasion d’un état d’immunodépression, il y a une réactivation.

 


 


Figure 16

 

Le taux de séroconversion AgHBe ® anti HBe est de l’ordre de 5 à 10% par an.

 

L’hépatite chronique C est souvent asymptomatique et ne se manifeste que par une élévation modérée et fluctuante des transaminases.

 

Les hépatites chroniques virales doivent être différenciées des autres causes de cytolyse.

 

 

CAUSES DE CYTOLYSE CHRONIQUE

 

Exemples

Hépatopathie virale chronique

Hépatopathie auto-immune

Hépatopathie médicamenteuse

Stéato-hépatite alcoolique ou non alcoolique

Hépatopathies métaboliques et génétiques

 

 

Hépatopathies vasculaires

 

 

Hépatopathies cryptogéniques

C, B, Bd

 

INH, Dantrolène, améthyldopa

Obésité, diabète, médicaments

Hémochromatose

Maladie de Wilson

Déficit en a1 antirypsine

Foie cardiaque

Syndrome de Budd-Chiari

Maladie veino-occlusive

 

C.        CIRRHOSE HEPATIQUE

 

L’évolution d’une hépatite chronique vers une cirrhose est observée essentiellement dans deux circonstances : les cas d’hépatites fulminantes subaiguës au cours desquelles une cirrhose peut se développer en quelques mois, et dans les hépatites chroniques avec activité et fibrose importantes au cous desquelles une cirrhose peut se développer en 10 à 20 ans.

 

D.        HEPATOCARCINOME

 

Dans la grande majorité des cas, la cirrhose est une étape préalable au développement du cancer du foie.

 

VI.       TRAITEMENT

A.        MESURES GENERALES

 

Le repos au lit n’est pas conseillé et il faut éviter toute médication car leur métabolisme hépatique est diminué.

 

Le régime doit être équilibré.

B.        MEDICAMENTS

1.         Hépatite aiguë

 

Aucun n’est efficace en dehors de la cortisone pour l’hépatite aiguë A cholostatique et de l’interféron a pour l’hépatite aiguë C.

 

2.         Hépatite chronique

 

Le traitement a pour objectif d’arrêter la multiplication virale (interferon alpha ou analogues nucléosidiques) afin d’éviter l’évolution vers la cirrhose et de stimuler l’immunité cellulaire (interferon alpha).

 

Il est donc logique de traiter l’hépatite virale chronique à un stade précoce, avant l’installation d’une cirrhose.

 

1)         Hépatite chronique B

 

L’interféron alpha  (10 millions d’unités, 3 fois par semaines, durant 4 à 6 mois par voie sous-cutanée) induit une séroconversion HBe chez 40 à 50% des patients porteurs d’une hépatite chronique active B avec multiplication virale (Ag HBe + DNA+).

La disparition de l’antigène HBs est plus rare et plus tardive. Les facteurs permettant d’augurer une réponse favorable au traitement sont : un taux élevé de transaminases, un taux bas d’ADN viral, l’hétérosexualité, le sexe féminin et l’absence d’infection par les virus HIV, delta et B mutant.

 

L’interféron reproduit avec un pourcentage plus élevé les phases 2 et 3 précédemment décrites pour l’évolution de l’hépatite B chronique.  Il est contre-indiqué dans la cirrhose décompensée.

 

La lamivudine (analogue nucléosidique) prise par voie orale est indiquée dans la cirrhose décompensée (avant transplantation), dans l’hépatite chronique évolutive B delta et liée au virus mutant precore.

 

2)         Hépatite chronique C

 

L’interféron a sera proposé (3 millions d’unités 3 x par semaine) associé à la ribavirine (analogue nucléosidique) chez les patients porteurs d’une hépatite chronique C avec activité et fibrose significative à l’histologie et pour autant qu’il n’y ait pas de contre-indication à ces médicaments, pendant 6 à 12 mois ce qui permet d’obtenir une réponse soutenue (c’est-à-dire des ALT normales et une virémie négative 6 mois après l’arrêt du traitement) dans 40% des cas (cf. figure 17).

 

Les facteurs augurant une réponse favorable au traitement sont le jeune âge, l’absence de consommation excessive d’alcool, la contamination non transfusionnelle, l’absence de cirrhose, une virémie basse et un génotype favorable.

 

Hépatite chronique C

traitée par Interferon et Ribavirine

 

 


                                                          

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

                                  

                                                     Figure 17

 

 

VII.     PREVENTION

A.        MESURES D’HYGIENE

 

Pour éviter la transmission de l’hépatite A, les mesures habituelles sont en général inadéquates parce qu’elles sont d’application difficile et que le virus a pu être disséminé avant que le diagnostic soit posé (2 semaines avant l’apparition de l’ictère).

 

En ce qui concerne l’hépatite B et l’hépatite C, des procédures de désinfection adéquates doivent être appliquées à tout le matériel endoscopique ou potentiellement contaminant.

 

Il faut aussi préconiser l’usage personnel exclusif des objets contondants (rasoir, coupe-ongles, brosse à dents, ...) et discuter de l’usage du préservatif chez l’homme.

 

B.        IMMUNOGLOBULINES ET VACCINATION

1.         Hépatite A

 

L’administration d’immunoglobulines spécifiques associées au vaccin (HAVRIX â) est recommandée chez les personnes ayant été au contact d’une hépatite A pour autant qu’elle soit réalisée le plus rapidement possible (endéans les 15 jours de l’exposition au virus).

 

La vaccination est indiquée chez les voyageurs dans des pays à haut risque (hygiène et conditions sanitaires insuffisantes), chez les travailleurs manipulant des denrées alimentaires, chez le personnel des crèches, garderies et services de pédiatrie, chez les toxicomanes et les patients porteurs d’hépatopathie chronique.

 

Le vaccin est une souche inactivée. Deux doses sont administrées chez l’adulte aux temps 0 et 6 à 12 mois plus tard. Un rappel doit être fait 20 ans plus tard.

 

2.         Hépatite B

 

Une prévention par l’association d’immunoglobulines spécifiques anti-HBV et d’un programme de vaccination se justifie pour la prévention d’une transmission périnatale, après piqûre accidentelle et après un contact sexuel avec une personne infectée.

 

Une vaccination universelle est actuellement recommandée, dans le but d’éradiquer l’hépatite virale B dans les 15 ans à venir. Le vaccin actuellement disponible (ENGERIX â) est très efficace. Le schéma classique de la vaccination comporte une dose administrée en intramusculaire dans le deltoïde aux temps 0, 1 et 6 mois. Une injection supplémentaire sera faite à 12 mois chez les sujets à risque. Il est conseillé de suivre la réponse des anti HBs qui doivent être supérieures à 10 mU. Un rappel est conseillé après 5 à 10 ans. En cas de non-réponse au vaccin (obésité, patient âgé ou immunodéprimé, facteurs génétiques), il faut répéter les doses.


CHAPITRE V :
LES HEPATITES TOXIQUES ET MEDICAMENTEUSES

I.         LES HEPATITES TOXIQUES

 

Les lésions hépatiques produites par des substances toxiques surviennent en général, rapidement (1 à 2 jours) après leur administration. Elles sont reproductibles. D’autres organes que le foie peuvent être atteints.


Les lésions observées sont très variables, distribuées de façon uniforme dans tout le lobule allant du simple oedème cellulaire jusqu’à la nécrose cellulaire avec ou sans réaction inflammatoire. De l’infiltration graisseuse est fréquemment observée. Dans certains, lorsque la nécrose n’est pas fatale, on aboutit à un état de cirrhose post-nécrotique ; pour d’autres par contre, ce n’est que la répétition des accidents toxiques qui aboutit à cette situation.

 

A.        L’ALCOOL

 

L’intoxication éthylique aiguë, en dehors d’un éthylisme chronique, ne retentit presque jamais sur le foie. Par contre, l’éthylisme chronique conduit à des lésions hépatiques allant de la stéatose à la cirrhose (voir stéastoses et cirrhoses).

 

B.        L’AMANITE PHALLOIDE

 

Le toxique responsable des lésions et particulièrement de l’hépato-toxicité est la phalloïdine qui a pu être isolée par chromatographie.

 

Dans les 12 heures qui suivent l’ingestion, on assiste à l’apparition de nausées, de crampes abdominales, de diarrhée parfois sanglante et de déshydratation. Des lésions rénales, hépatiques et éventuellement du système nerveux central apparaissent dans les jours suivants, parfois après une amélioration.

 

Les lésions hépatiques comportent une destruction cellulaire massive pouvant entraîner le décès en l’absence de transplantation hépatique.

 

Le tableau clinique des manifestations cliniques est celui d’une cytolyse avec insuffisance hépatique modérée à très sévère.

 

C.        LES SOLVANTS INDUSTRIELS

 

Les hydrocarbures halogénés inhalés ou ingérés accidentellement ou « sniffés » peuvent déterminer une hépatite cytolytique.

 

II.        LES HEPATITES MEDICAMENTEUSES

 

Les 3 étapes du métabolisme des médicaments sont :

 

(1)           La captation par les hépatocytes.

Certains médicaments sont avidement extraits du sang (à plus de 70%) par le foie au premier passage.

Leur clairance est donc essentiellement fonction du flux sanguin hépatique. C’est le cas de la morphine, du propranolol et du Vérapamil dont la dose par prise doit être réduite en cas de cirrhose ou de shunt portosystémique spontané ou chirurgical. Certaines de ces substances à haute extraction sont utilisées pour l’évaluation du flux sanguin hépatique (dextropropoxyphène, lidocaïne, vert d’indocyanine).
D’autres médicaments ont une extraction faible (< 30%). Leur clairance est indépendante du flux sanguin hépatique mais dépend de la fonction métabolique de l’hépatocyte. C’est le principe de l’évaluation de la fonction hépatique par le test respiratoire à l’aminopyrine C14.

 

(2)           La biotransformation dans l’hépatocyte.

Deux mécanismes sont possibles :

·              une oxydation au niveau du cytochrome P450 (= microsome) avec formation d’un métabolite réactif. L’activité microsomiale peut être augmentée par d’autres médicaments ou toxiques (alcool, barbituriques, rifampicine, diphénylhydantoïne) ou diminuée (mutation génétique, kétoconazole, cimétidine).

·              une conjugaison de la substance mère ou du métabolite réactif à une molécule endogène (acide glucuronique, glutathion, acide aminé).

 

(3)           L’élimination du médicament hors de l’hépatocyte vers le sang ou la bile.

L’excrétion biliaire est la plus fréquente.

 

Deux types d’hépatotoxicité médicamenteuse sont possibles lorsque les mécanismes de conjugaison sont dépassés ou lorsque les mécanismes d’induction microsomiale sont exacerbés. L’une correspond à une toxicité prévisible (liée à la dose) par fixation du métabolite réactif sur les protéines cellulaires. L’autre correspond à une toxicité imprévisible (non liée à la dose) par fixation du métabolite réactif sur les protéines cellulaires ou membranaires, formation d’un néoantigène ou haptène et réaction immuno-allergique avec parfois apparition de symptômes d’hypersensibilité (fébrilité, rash, éosinophilie, adénopathies).

 

Selon le type d’action et l’endroit où elle s’exerce, les lésions hépatiques provoquées seront différentes. Elles recouvrent un large spectre résumé dans le tableau suivant.

 

 

LESIONS HEPATIQUES INDUITES PAR LES MEDICAMENTS

 

Exemples

ATTEINTE AIGUE

Hépatite aiguë

Cytolitique

Cholostatique

Granulomateuse

Surcharges

Stéatose macrovacuolaire

Stéatose microvacuolaire

Lésions de type alcoolique

 

ATTEINTE CHRONIQUE

Hépatite chronique / cirrhose

Cholostase / cirrhose biliaire

Cholangite sclérosante

 

LESIONS VASCULAIRES

Sinusoïdales, centro-lobulaires

Veines sus hépatiques

Péliose hépatique

 

LESIONS TUMORALES

Adénomes, hépatome

Angiosarcome

 

 

INH, kétoconazole, paracétamol

Erythromycine, contraceptifs oraux, ac. Clavulanique

Allopurinol, sulfaméthoxazole

 

Corticoïdes, methotrexate

Acide valproïque

Amiodarone

 

 

Méthyldopa, dantrolène

Chlorpromazine, carbamazépine

FUDR, formol

 

 

Vitamine A, méthotrexate, azatioprine, arsenic

Contraceptifs oraux

Stéroïdes anabolisants et androgéniques

 

 

Contraceptifs oraux, stéroïdes anabolisants et androgéniques, chlorure de vinyle.

 

 


CHAPITRE VI :
LES STEATOSES ET LES STEATOHEPATITES

I.         ALCOOLIQUES

A.        HISTOIRE NATURELLE DU FOIE ALCOOLIQUE

 

L’intoxication chronique aboutit au développement de lésions hépatiques dont le terme ultime est la cirrhose. Le risque de développement de lésions hépatiques est proportionnel à la quantité totale d’alcool consommée durant la vie. La dose seuil est de l’ordre de 210 g d’alcool par semaine chez l’homme et de 140 g par semaine chez la femme (10 g d’alcool = 1 verre de vin, 1 verre de bière, 1 verre de whisky). Le risque d’évolution vers la cirrhose est lié à la quantité d’alcool quotidiennement (60 g pour l’homme, 40 g pour la femme) et à la durée de l’intoxication (10 à 20 ans).

 

On peut très schématiquement séparer trois entités anatomo-cliniques :

·      La stéatose hépatique, qui se caractérise par une surcharge lipidique des hépatocytes. Elle peut apparaître rapidement et est réversible au sevrage. Après un certain temps d’évolution, une fibrose apparaît (stéato-fibrose).

·      L’hépatite alcoolique est caractérisée par des lésions hépatocytaires.

·      La cirrhose alcoolique caractérisée par un bouleversement de l’architecture hépatique. La stéatose ne joue aucun rôle dans le développement des cirrhoses. C’est l’hépatite qui constitue l’étape indispensable.

 

Ces 3 types de lésions sont le plus souvent associées à des degrés divers chez le même individu.

 

B.        ANATOMOPATHOLOGIE

1.         La stéatose et la stéato-fibrose

 

L’alcool éthylique est susceptible d’entraîner une surcharge lipidique du cytoplasme hépatocellulaire (stéatose). Les graisses accumulées correspondent en majorité à des triglycérides. La stéatose prédomine dans la zone périphérique (zone 3) de l’acinus. Les lipides s’accumulent en une large vacuole, unique, refoulant le noyau (stéatose macrovacuolaire). La coalescence de macrovacuoles par rupture des parois cellulaires amincies peut provoquer la formation de kystes graisseux.

 

2.         L’hépatite alcoolique

 

L’hépatite alcoolique peut survenir à n’importe quel stade de l’alcoolisme chronique. Elle se caractérise par une combinaison d’atteinte hépatocellulaire, d’inflammation et de fibrose.

 

L’atteinte hépatocytaire se marque par une ballonisation cellulaire pouvant s’accompagner de nécrose acidophile. Certaines cellules lésées renferment dans leur cytoplasme des formations acidophiles, hyalines, de contours irréguliers, géographiques, parfois annulaires. En microscopie électronique, ces corps de Mallory sont constitués d’un agrégat de microfilaments et de substance granulaire ou amorphe. On les observe dans 2/3 des cas d’hépatite alcoolique. Leur spécificité est loin d’être parfaite puisqu’on peut les rencontrer dans d’autres conditions pathologiques (cholostase de longue durée).

 

La réaction inflammatoire est essentiellement constituée par des polynucléaires qui s’accumulent autour des cellules lésées (satellitose) et dans les sinusoïdes adjacents. Les cellules mononucléées sont relativement rares et se rencontrent plutôt dans les cas légers ou lors de la résolution de l’hépatite. L’inflammation portale est, en général, peu marquée.

 

La fibrose constitue un paramètre constant. Elle prédomine dans la zone périphérique de l’acinus. Elle se présente sous deux aspects histologiques imbriqués. La fibrose péri-cellulaire se développe par dépôt de collagène dans l’espace de Disse suite à une transformation fibroblastique des cellules de Ito. Elle entraîne une capillarisation des sinusoïdes qui entrave les échanges métaboliques. La fibrose périveinulaire se développe dans la paroi et autour des veines centrolobulaires.

 

Pour de nombreux auteurs, la fibrose est toujours la conséquence de phénomènes de nécrose inflammatoire (hépatite). Pour d’autres, elle peut s’observer sur un foie stéatosique, indépendamment de toute nécrose (stéato-fibrose).

 

Dans les stades avancés de l’hépatite alcoolique, la fibrose prédomine. Elle réalise des ponts et septa disséquant le parenchyme. Les efforts de régénération cellulaire aboutissent à la formation de nodules ayant perdu l’architecture lobulaire. A ce stade, la distinction histologique avec une cirrhose est ténue. On utilise parfois le terme d’hépatite en transformation cirrhotique.

 

3.         La cirrhose alcoolique

 

Cf. le chapitre « cirrhose ».

 

C.        MANIFESTATIONS CLINIQUES, DIAGNOSTIC, TRAITEMENT

 

1.         La stéatose

 

Le seul symptôme est la présence d’un gros foie mou, lisse, parfois douloureux.

 

Il existe des signes biologique de cytolyse modérée et/ou de cholostase. Une hyperlipémie avec forte élévation des triglycérides s’accompagnant parfois d’une anémie hémolytique peut être observée (syndrome de Zieve).

 

En laparoscopie le foie est clair, jaune chamois lisse. Une biopsie confirme le diagnostic.

 

2.         L’hépatite alcoolique

 

Les signes cliniques habituels sont : des douleurs de l’hypochondre droit, des nausées et des vomissements, un ictère et un syndrome fébrile. Des signes d’aggravation d’une hépatopathie préexistante peuvent apparaître (ascite, encéphalopathie, hémorragies digestives).

 

Les examens biologiques montrent : une hyperleucocytose à polynucléaires neutrophiles, une anémie macrocytaire modérée, une augmentation modérée des transaminases avec un rapport AST/ALT supérieure à 1, une hyperbilirubinémie conjuguée, une élévation des immunoglobulines (en particulier les IGA). Une élévation des phosphatases alcalines et des gammas GT est plus rare.

 

L’échographie ne montre pas d’anomalies caractéristiques, mais peut révéler la présence d’une stéatose d’une cirrhose ou d’une hypertension portale.

 

La biopsie hépatique apporte un diagnostic de certitude.

 

Le diagnostic différentiel doit être fait entre une hépatite alcoolique, une hépatite virale, une angiocholite ou une hépatite médicamenteuse.

 

En dehors de la suppression totale des boissons alcooliques et du traitement de l’ascite et des troubles de l’hémostase, peu de thérapeutiques sont efficaces. Les corticostéroïdes réduisent la mortalité des hépatites alcooliques graves et sont préconisés pour autant qu’il n’y ait pas d’infection.

 

II.        NON ALCOOLIQUES

 

La stéatose non alcoolique peut se présenter sous deux formes : macrovacuolaire et microvacuolaire.

 

1.         Forme macrovacuolaire

 

Les lésions hépatiques sont semblables à celles observées dans la stéatose alcoolique.

 

En dehors de l’alcoolisme, la cause la plus fréquente de stéatose macrovacuolaire, dans les pays industrialisés, est l’excès pondéral. L’intensité de la stéatose n’est pas proportionnelle à l’obésité : on observe des stéatoses importantes chez des malades dont l’excès pondéral est modeste.

 

Les causes plus rares sont le diabète, la carence protidique et la malnutrition, l’hyper-corticisme, l’administration de corticoïdes et la nutrition parentérale.

 

La stéatose macrovacuolaire ne provoque en général aucun symptôme.

 

Les tests hépatiques sont souvent normaux, mais on peut observer une augmentation modérée des transaminases, des phosphatases alcalines et des ¡ GT. La stéatose par excès pondéral est responsable de la moitié des cas d’augmentation asymptomatique des transaminases dans les pays industrialisés.

 

L’échographie montre un foie hyperéchogène de manière homogène ou hétérogène. A la tomodensitométrie le foie est hypodense. Ces modifications ne sont pas constantes et dans certains cas la biopsie est nécessaire pour confirmer le diagnostic.

 

2.         Forme microvacuolaire

 

La cellule prend un aspect spumeux à cause de la présence de vésicules optiquement vides dans les préparations classiques. Le noyau reste central.

 

Parmi les causes de stéatose microvacuolaire on peut citer l’administration de médicaments et la stéatose gravidique.

 

Ce type de stéatose entraîne un dysfonctionnement de l’hépatocyte modéré ou sévère, éventuellement mortel.

 

Le tableau clinique est en général dominé par l’ictère. Il existe une augmentation des transaminases, des phosphatases alcalines et des ¡ GT.

 

LES STEATOSES HEPATITES NON ALCOOLIQUES

Stéatose macro-vacuolaire

 

 

 

 

 

 

 

 

Stéatose micro-vacuolaire

Obésité, boulimie

Alcool

Diabète gras

Médicaments : corticoïdes, méthotrexate, amiodarone

Hépatite C

Carences protidiques

Nutrition parentérale

Hypertriglycéridémie

 

Médicaments : Acide valproïque, AINS, Antiviraux (DDI, AZT)

Alcool

Stéatose gravidique

Syndrome de Reye


CHAPITRE VII :
PATHOLOGIE HEPATIQUE AUTO-IMMUNE

I.         LES HEPATITES AUTO-IMMUNES

 

Les hépatites auto-immunes sont la conséquence d’une réaction auto-immune contre des constituants de la membrane des hépatocytes.

 

Les hépatites auto-immunes de type I sont caractérisées par des anticorps antinucléaires et/ou des anticorps anti-muscles lisses (de type actine) à un titre élevé.

 

Les hépatites auto-immunes de type II sont caractérisées par des anticorps anti-LKM à un titre élevé. Les antigènes correspondants sont des enzymes du cytochrome P450 du réticulum endoplasmique des hépatocytes et de l’épithélium des tubes contournés du rein.

 

La maladie affecte principalement les femmes soit entre 20 et 30 ans soit à la ménopause.

 

Les manifestations cliniques sont généralement superposables à celles des hépatites virales aiguës ou chroniques. Ce type d’hépatite est néanmoins plus fréquemment associé à d’autres maladies auto-immunes (thyroïdite d’Hashimoto, arthrite rhumatoïde, Maladie de Sjörgen). On met fréquemment en évidence le facteur antinucléaire, des anticorps anti-muscle lisse, ou des anticorps anti LKM (liver kidney microsomes) ainsi qu’une hypergamma-globulinémie.

 

La biopsie hépatique montre une infiltration inflammatoire lymphoplasmatocytaire des espaces portes avec « peace meal necrosis » et une fibrose plus ou moins marquée.

 

L’évolution de ce type d’hépatite chronique est fluctuante et est marquée par des épisodes répétés de détérioration aboutissant le plus souvent à une cirrhose. Si le diagnostic différentiel avec l’hépatite chronique B est aisé par l’évaluation des marqueurs sérologiques, la confusion est possible avec une hépatite chronique C dont on connaît également le caractère fluctuant. L’utilisation du marqueur spécifique de l’hépatite C (anti HCV) est un apport important au diagnostic différentiel.

 

Le principe du traitement consiste à administrer durant une période prolongée une association de prednisolone et d’azathioprine après biopsie hépatique démontrant le caractère actif de la maladie. Les indications de ces traitements au long cours, dont on connaît les effets secondaires non négligeables, doivent être pesées en fonction du contexte clinique et de la gravité des symptômes.

 

II.        LA CIRRHOSE BILIAIRE PRIMITIVE

 

La cirrhose biliaire primitive est une inflammation chronique des petites voies biliaires intra-hépatiques responsables d’une cholostase chronique. Une cirrhose caractérisée ne se développe qu’après de nombreuses années d’évolution et le terme de cirrhose est donc mal approprié.

 

La pathogénie de cette affection reste imprécise ; elle est vraisemblablement liée à des troubles immunitaires sous la dépendance de facteurs génétiques et infectieux.

 

Dans la grande majorité des cas (90%), la maladie survient chez la femmes entre 35 et 55 ans. Après une phase asymptomatique de durée variable (parfois plusieurs années), un prurit et un subictère se manifestent. Le prurit peut précéder l’ictère de plusieurs mois. Ce n’est qu’après plusieurs années que l’ictère s’intensifie et que les conséquences classiques de la cholostase sont observées : malabsorption des graisses, ostéoporose et ostéomalacie, xanthomes et xanthélasma. Une association avec d’autres affections auto-immunitaires (maladie de Sjörgen, syndrome de Raynaud, thyroïdite) n’est pas exceptionnelle.

 

L’examen physique est généralement banal au début de l’évolution. Une hépatosplénomégalie peut se développer ultérieurement de même que des signes d’hypertension portale et d’insuffisance hépato-cellulaire (ascite, oedèmes des membres inférieurs, hémorragies cutanées ou digestives, ictère).

 

Le diagnostic précoce de la maladie à la phase asymptomatique repose sur une augmentation du taux de la phosphatase alcaline, de la ¡GT et du taux des IgM.

 

Des anticorps antimitochondriaux (anti M2) sont présents chez plus de 50% des malades avant l’apparition des signes cliniques. Leur fréquence est de plus de 90% à des stades plus évolués de la maladie.

 

La biopsie hépatique montre une cholangite destructive avec infiltration à mononucléaires au niveau des espaces portes et un degré variable de fibrose portale allant jusqu’à la cirrhose.

 

Au cours de l’évolution, le taux de bilirubinémie, resté stable durant plusieurs années, augmente progressivement et est annonciateur de la survenue de la dernière phase de la maladie. Parallèlement, le taux de cholestérol s’élève progressivement et ne diminue qu’en fin d’évolution, en présence d’une insuffisance hépato-cellulaire.

 

La cholostase étant démontrée, il faut différencier celle-ci des autres causes de cholostase. Une cholangiographie rétrograde endoscopique est souvent indiquée. Une biopsie hépatique est indispensable pour confirmer le diagnostic et pour évaluer la sévérité de la maladie.

 

L’évolution fatale est la règle après 10 à 15 ans d’évolution.

 

Actuellement, il n’y a pas de traitement susceptible de modifier le cours évolutif de la maladie vers la cirrhose. Le traitement est symptomatique. On recommande l’administration d’acide ursodésoxycholique en se basant sur la notion de cytotoxicité biliaire des acides biliaires par effet détergent. Celle-ci dépend de la proportion hydrophobique/hydrophilique de chaque sel biliaire. Elle est maximale pour le lithocholate et minimale pour l’acide ursodésoxycholique. L’acide ursodésoxycholique diminue le taux des acides biliaires cytotoxiques. Son administration à la dose de 10 à 20 mg/kg entraîne rapidement une diminution du taux des enzymes de la cholostase et du prurit et retarde l’évolution défavorable.

 

Une transplantation hépatique a transformé le pronostic des formes évoluées de la cirrhose biliaire primitive. Parmi les modèles pronostiques récemment proposés pour déterminer le moment optimal de la greffe, celui de Mayo clinic semble le meilleur. Il fait intervenir des paramètres simples cliniques ou biologiques (âge, bilirubinémie, albuminémie, PT, score d’oedème).

 

III.      LA CHOLANGITE SCLEROSANTE PRIMITIVE

 

La cholangite sclérosante primitive est une inflammation chronique des grosses voies biliaires intra ou extra-hépatiques, évoluant vers la fibrose et provoquant une cirrhose avec hypertension portale et insuffisance hépatique chronique. Elle se développe plus fréquemment chez l’homme, dans la tranche d’âge de 20 à 50 ans. Elle est associée dans plus de 60% des cas à la recto-colite ulcéro-hémorragique. Une transformation néoplasique s’observe dans 10% des cas.

 

La cholangite primitive doit être distinguée des cholangites secondaires à des inflammations d’origine connue (lithiase cholédocienne, sténose bénigne, ...).

 

Le diagnostic se fait par la cholangiographie RMN ou rétrograde et la biopsie hépatique.

 

Le traitement est symptomatique comme dans toute cholostase chronique. La cholestyramine peut apporter un soulagement du prurit et une antibiothérapie est indiquée en présence d’une complication infectieuse. Comme traitement de fond, l’acide ursodésoxycholique a fait ses preuves. Dans les formes extra-hépatiques compliquées de sténoses un traitement endoscopique par prothèse est justifié. Dans les formes intra-hépatiques s’accompagnant d’angiocholite chronique, d’ictère et/ou d’hypertension portale, on proposera une transplantation hépatique.


CHAPITRE VIII :
PATHOLOGIES HEPATIQUES METABOLIQUES
ET GENETIQUES

I.         L’HEMOCHROMATOSE

 

L’hémochromatose est une maladie caractérisée par une surcharge en fer.

 

Elle existe sous deux formes :

 

·       L’hémochromatose primitive d’origine génétique transmise suivant un caractère autosomal récessif. La maladie ne se manifeste que chez une partie des homozygotes. Les hétérozygotes sont indemnes. La surcharge ferrique localisée dans les hépatocytes est due à une exagération de l’absorption intestinale de fer dont le mécanisme est mal connu. La mutation C282Y située sur un gène (dénommé HFE), sur le bras court du chromosome 6 à proximité des gènes HLA de classe I a été découverte récemment.

 

·      L’hémochromatose secondaire au sein de laquelle on range les surcharges liées à des transfusions sanguines répétées ainsi que les hémolyses et les dysérythropoïèse (thalassémie). Une surcharge modérée peut être observées dans la cirrhose particulièrement lorsqu’elle est d’origine alcoolique. Le fer est localisé dans les cellules de Kupffer.

 

Le tableau classique de l’hémochromatose débute vers 40 ans chez les hommes et à la ménopause chez les femmes.

 

L’asthénie et des arthropathies sont souvent les premières manifestations de l’affection. Des douleurs de l’hypocondre droit associées à une hépatomégalie peuvent être observées au début de la maladie. Une mélanodermie, une atteinte cardiaque (troubles du rythme, insuffisance cardiaque), un diabète, une atteinte gonadique et une déminéralisation osseuse sont le reflet d’une atteinte avancée.

 

Les tests biologiques hépatiques sont normaux ou montrent des altérations mineures dans les formes débutantes. Il existe toujours une saturation en fer élevée.

La recherche de la mutation C282Y à l’état homozygote confirme le diagnostic d’hémochromatose génétique. Une biopsie peut être faite pour doser le fer tissulaire et évaluer les lésions histologiques, en particulier la fibrose.

 

La mise en évidence d’une hémochromatose génétique chez un patient doit conduire à la réalisation d’une enquête familiale (ascendants, collatéraux et descendants) par la recherche de signes biologiques de surcharge en fer ainsi que celle de la mutation du gène HFE.

 

Le traitement comporte des saignées hebdomadaires de 500 ml. Ce traitement a d’autant plus de chances d’être efficace qu’il est insaturé précocement. L’évolution du taux de ferritine est un témoin fidèle de son efficacité.

En l’absence de traitement, l’évolution se fait vers la cirrhose et ses complications dont l’hépatome.

II.        LA DEFICIENCE HEREDITAIRE EN ALPHA-1 ANTITRYPSINE

 

Cette affection rare d’origine génétique peut être responsable chez les patients adultes homozygotes d’une hépatite chronique cirrhogène. Les manifestations pulmonaires peuvent dominer le tableau clinique. Le diagnostic est posé par le dosage de l’a1 antitrypsine et le typage phénotypique.

 

L’a1 antitrypsine est synthétisée par le foie et dans une moindre mesure par les monocytes et les macrophages, et elle migre dans la région de a1-globulines à l’électrophorèse des protéines sériques. Sa fonction principale est d’inhiber l’élastase leucocytaires.

 

Les taux normaux sont de 150-350 mg/dl, et augmentent en cas d’inflammation, de grossesse, ou lors de la prise de contraceptifs oraux. Le diagnostic d’un déficit héréditaire hépatique en a1-antitrypsine peut être supposé par la découverte d’une quasi absence de bande en a1-globulines à l’électrophorèse, mais est confirmé par un dosage. L’a1-antitrypsine a un polymorphisme génétique : 90% des caucasiens sont homozygotes pour l’allèle M, les autres allèles étant F, S, Z et nul. La présence de l’allèle Z, particulièrement dans les formes homozygotes, est associée à la maladie. Un phénotypage par une technique de focalisation isoélectrique (séparation des protéines selon leur charge) permet sa mise en évidence.

 

III.      LA MALADIE DE WILSON

 

L’affection est caractérisée par l’accumulation de cuivre dans les tissus, essentiellement le foie, le système nerveux central et les yeux (anneau de Kayser-Fleischer). L’accumulation de cuivre est secondaire à une élimination biliaire insuffisante.

 

Chez l’adulte jeune, l’affection se présente sur le plan hépatique comme une hépatite chronique active ou une hépatite fulminante. La biologie montre une réduction du taux sérique de céruloplasmine ; le cuivre sérique et la cuprurie de 24 heures sont élevés. Le dosage du cuivre hépatique sur prélèvement biopsique confirme le diagnostic.

 

Le dosage de la céruloplasmine sérique, la protéine transporteuse du cuivre, est utile dans le diagnostic d’une maladie de Wilson. Elle n’est pas impliquée directement dans ce trouble autosomique récessif de stockage du cuivre, mais des concentrations basses (< 20 mg/dl) sont retrouvées dans environ 90% des sujets homozygotes et 10% des hétérozygotes. Ce dosage doit être accompagné de celui du cuivre sérique. En effet, la céruloplasmine est une « acute phase protein » positive, mais sont taux augmente aussi sous l’action des oestrogènes ou d’autres molécules comme la phénytoïne, ce qui limite son interprétation si elle est dosée de manière isolée.

 

Les mesures diététiques (peu efficaces vu l’ubiquité du cuivre) consistent à éviter l’absorption d’aliments riches en cuivre, tels que le chocolat, les champignons, les coquillages, le foie et les arachides. La drogue de choix est la D-pénicillamine (Kélatin*) qui augmente l’élimination urinaire de cuivre ou le stocke dans les tissus sous forme non toxique. Le traitement doit être poursuivi durant vie entière. Une interruption de ce traitement peut s’accompagner de poussées évolutives ou fulminantes de l’affection. La transplantation hépatique (qui corrige le trouble métabolique) doit être réservée aux hépatites fulminantes, aux cas d'intolérance médicamenteuse, d'absence de réponse thérapeutique et aux cirrhoses décompensées.

 

IV.       TROUBLES GENETIQUES DU METABOLISME DE LA BILIRUBINE

1.         La maladie de GILBERT

 

C’est la cause bénigne la plus fréquente d’hyperbilirubinémie non conjuguée. Elle atteint 5 à 8% de la population et est transmise de manière autosomique récessive. Le diagnostic est évoqué durant l’adolescence ou chez l’adulte jeune. La plupart des patients sont asymptomatiques ou se plaignent de symptômes non spécifiques (asthénie, nausées, ...).

 

L’ictère se développe lors de périodes de jeûne, de stress, de fatigue, de prise d’alcool, ou d’affection intercurrente. Le taux de bilirubine atteint en général 3 mg/dl, mais peut -être supérieure. Les autres tests hépatiques sont normaux. Il est nécessaire de rassurer le patient et de lui expliquer que la maladie est bénigne et ne nécessite aucun traitement.

 

Les seules techniques réellement diagnostiques sont des techniques chromatographiques permettant de déterminer la quantité relative de bilirubine non conjuguée et de dérivés monoconjugués dans le sérum, mais elles ne peuvent pas être réalisées en routine clinique.

 

2.         Maladie de DUBIN-JOHNSON

 

Il s’agit d’un trouble héréditaire rare (autosomique récessif) du transport canaliculaire de la bilirubine conjuguée. La plupart des patients sont asymptomatiques et le taux de bilirubine est compris entre 2 et 20 mg/dl. Il est important d’en faire le diagnostic afin d’éviter toute investigation inutile. Les tests hépatiques sont normaux. L’examen histologique du foie montre un pigment brun dans les hépatocytes. Cette maladie est bénigne et il n’y a aucune sanction thérapeutique.

 

3.         Maladie de ROTOR

 

Elle représente aussi un trouble de la liaison conjuguée à la ligandine. C’est une maladie bénigne et il n’y a aucun traitement

 


CHAPITRE IX :
PATHOLOGIES HEPATIQUES VASCULAIRES

I.         LE FOIE CARDIAQUE

 

En présence de processus aigus de décompensation cardiaque et en particulier d’états de choc, de troubles sévères du rythme, de coeur pulmonaire aigu ou de cardiomyopathie aiguë, la réduction brutale du débit sanguin est responsable de lésions hépatiques comportant la nécrose centro-lobulaire. Leur gravité dépend de la durée de la réduction du débit cardiaque. Les manifestations cliniques sont caractérisées par un ictère généralement modéré. On relève une augmentation importante des transaminases et une altération du temps de prothrombine. Une insuffisance hépato-cellulaire mortelle peut être observée.

 

Dans la décompensation cardiaque chronique, la péricardite constrictive, l’insuffisance tricuspidienne, l’ictère peut être important ; il est d’origine multifactorielle. Le diagnostic repose sur l’échographie cardiaque, l’écho-Doppler des veines sus hépatiques et la biopsie hépatique. La tension de la capsule hépatique provoquée par l’hépatomégalie brutale rend compte de la sensibilité du foie à la palpation. La présence d’un reflux hépato-jugulaire confirme le diagnostic. En présence d’une pression veineuse élevée, et notamment en cas de péricardite constrictive, de l’ascite peut être observée et être éventuellement de nature exsudative. Ce n’est que lorsqu’une cirrhose, éventualité rarement observée, se développe (en présence de lésions tricuspidiennes ou de péricardite constrictive) que des signes d’hypertension portale se manifestent.

 

II.        LE SYNDROME DE BUDD-CHIARI

 

Il s’agit d’une occlusion des veines sus-hépatiques dont les étiologies peuvent être nombreuses : cf. hypertension portale.

 

Dans les formes aiguës, on observe des douleurs abdominales, des vomissements, une hépatomégalie, du subictère et de l’ascite. Le décès peut survenir rapidement à la suite d’une faillite parenchymateuse. Les formes chroniques, plus fréquentes, provoquent des douleurs, de l’ascite et une hépatomégalie. L’ictère est rare. Les altérations enzymatiques sont généralement peu importantes. L’ascite peut être exsudative.

 

Les procédés suivants permettent de poser le diagnostic :

·         écho-Doppler : l’absence de flux dans la veine sus-hépatique associée à une hépatomégalie plaide en faveur de cette affection ;

·         résonance magnétique nucléaire : cette méthode est intéressante pour l’exploration non invasive des vaisseaux ;

·         biopsie hépatique : une congestion avec hémorragie centro-lobulaire est l’image habituellement observée ;

·        venographie par voie fémorale ou jugulaire.

III.      LA MALADIE VEINO-OCCLUSIVE

 

Elle est caractérisée par un oedème et une fibrose, voire une occlusion des petites veines sus-hépatiques (centro-lobulaires et sublobulaires). Les produits toxiques (alcaloïdes de la pyrrolybdène contenu dans les plantes) ou des médicaments (azathioprine, uréthane, dacarbazine) représentent l’essentiel de l’étiologie.

 

IV.       LA PELIOSE HEPATIQUE

 

L’administration de contraceptifs oraux, de stéroïdes, peut être associée à des dilatations focales des sinusoïdes. Dans la péliose, on observe des cavités remplies de sang dont le diamètre peut varier de quelques mm à plusieurs cm.

 

Une hépatomégalie douloureuse associée à une augmentation des enzymes hépatiques peut être observée. L’arrêt de médicaments responsables provoque souvent une régression des lésions.


CHAPITRE X :
LES CIRRHOSES

I.         ANATOMOPATHOLOGIE

 

Les cirrhoses se manifestent par une induration et par une perte de l’architecture de l’organe dont l’aspect macroscopique devient nodulaire. Elles sont la conséquence d’une destruction chronique progressive du parenchyme hépatique accompagnée d’un fibrose. A l’examen histologique, les nodules, qui sont en remaniement constant suite à la persistance des phénomènes hépatitiques et à la régénération cellulaire compensatrice sont de taille variable suivant l’étiologie et l’évolution. La classification des cirrhoses est difficile. Classiquement, on utilise comme critère de distinction la taille des nodules.

 

Dans la cirrhose micro-nodulaire ou cirrhose de Laënnec, le foie présente un aspect « clouté » provoqué par la formation de petits nodules de la taille d’un acinus hépatique. Le bord du foie devient dur et tranchant. Ces nodules sont séparés par des septa fibreux minces, englobant à la fois des territoires portaux et centro-lobulaires.

 

Dans la cirrhose macronodulaire les nodules sont de taille irrégulière ; certains ne dépassent pas le mm; tandis que d’autres ont des tailles de plusieurs cm. L’aspect macroscopique du foie est extrêmement irrégulier, le bord tranchant est fortement découpé. A l’examen microscopique, l’aspect des nodules est variable ; certains sont composés de nids de cellules ne présentant aucune organisation acinaire tandis que d’autres englobent des acini intacts.

 

Dans la cirrhose de forme mixte on observe une combinaison de la cirrhose micro et macronodulaire.

 

On admet classiquement que la cirrhose de Laënnec est provoquée par l’éthylisme, tandis que la cirrhose macronodulaire est habituellement la conséquence d’une hépatite virale. La réalité est cependant moins simple ; en effet, une cirrhose éthylique, qui au départ est micro-nodulaire, peut après de nombreuses années, suite à des remaniements successifs du parenchyme, prendre un aspect macronodulaire.

 

A l’heure actuelle, la classification morphologique est supplantée par une classification plus précise basée sur l’étiologie.

 

II.        ETIOLOGIE ET CLASSIFICATION

 

Les causes les plus fréquentes de cirrhose sont l’alcoolisme et les hépatites B et C. De multiples autres étiologies sont possibles.

 

 

ETIOLOGIE DES CIRRHOSES

 

Causes

A. PARENCHYMATEUSES

Stéato-cirrhoses

Virales

Auto-immunes

Médicamenteuses

Métaboliques et génétiques

 

 

Vasculaires

 

 

Cryptogéniques

 

B. CHOLOSTATIQUES

Cirrhose biliaire primitive

Cirrhose biliaire secondaire

Cholangite sclérosante

Médicamenteuses

Mucoviscidose

 

Alcool, Obésité, Médicaments (Amiodarone)

C, B, B delta

Trouble immunitaire

INH, Dantrolène, Méthyldopa

Hémochromatose

Maladie de Wilson

Déficit en a1 antitrypsine

Foie cardiaque

Syndrome de Budd-Chiari

Maladie veino-occlusive

Cause indéterminée

 

 

Trouble génétique et immunitaire

Sténose biliaire chronique

Trouble génétique et immunitaire

Chlorpromazine, Ajmaline

Trouble génétique

 

III.      MANIFESTATIONS CLINIQUES ET DIAGNOSTIC

A.        STADE COMPENSE

 

Ce stade représente la période la plus longue dans l’histoire naturelle de la cirrhose. Cliniquement latent, il peut être une découverte au cours d’un examen de routine. Des symptômes peu spécifiques peuvent être présents : asthénie, gêne de l’hypocondre droit. Dans certains cas, les manifestations d’une hypertension portale (hématémèse ou ascite) inaugureront une cirrhose préalablement asymptomatique.

L’examen peut montrer des angiomes stellaires, de l’érythème palmaire et une hépatomégalie avec ou sans splénomégalie. Le diagnostic repose essentiellement sur les éléments apportés par les aspects morphologiques précisés par l’imagerie (échographie + Doppler) et une biopsie hépatique éventuellement couplée à une mesure du gradient veineux hépatique. La présence de varices oesophagiennes sera recherchée par endoscopie.

 

Les tests biologiques peuvent être strictement normaux. Les plus sensibles et les plus fréquemment altérés au stade compensé sont les suivants :

·      Le test de l’aminopyrine C14. La déméthylation de l’aminopyrine C14 (prise par voie orale) par les microsomes hépatiques (cytochrome P450) aboutit à l’élimination du C14 dans l’haleine où il est mesurable. En cas de maladie hépatique, et notamment dans la cirrhose, l’élimination du C14 est diminuée. Les valeurs normales vont de 4,2 à 9,3% en deux heures.

·      Une augmentation du taux d’acides biliaires et une diminution du taux de la cholinestérase.

 

B.        STADE DECOMPENSE

 

Les signes cliniques comportent, en général, la présence d’un ictère, d’une ascite, d’une encéphalopathie et d’une hypertension portale. Les autres complications (voir insuffisance hépatique chronique) sont cardio-vasculaires et pulmonaires, endocriniennes, hématologiques, cancérologiques (hépatocarcinome), certaines sont dues à la sensibilité aux infections et aux médicaments.

 

Les examens biologiques montrent des taux plus ou moins élevés de bilirubine, ainsi qu’une diminution du taux d’albumine et du temps de prothrombine associée à une augmentation des gammas globulines. Le taux de transaminases est fréquemment élevé. Le rapport AST/ALT est supérieur à l’unité. Des manifestations d’hypersplénisme sont fréquentes.

L’imagerie peut montrer un foie hétérogène, aux contours parfois bosselés, et des signes d’hypertension portale.

 

Le diagnostic est confirmé par la biopsie par voie transveineuse.

 

IV.       TRAITEMENT

 

Le régime doit être bien équilibré et comporter 60 g de protéines/jour et 30 à 40 kcal/kg/jour.

 

La cirrhose alcoolique se traite par la suppression de l’alcool, les cirrhoses médicamenteuses par l’arrêt du médicament causal. L’interféron est peu utile pour la cirrhose post-hépatique B et pour la cirrhose post-hépatique C compensées.  La lamivudine est indiquée en cas de cirrhose décompensée avec multiplication virale.

Le traitement des complications a été envisagé antérieurement.

 

L’indication d’une transplantation hépatique dans la cirrhose sera précisée ultérieurement.

 

V.        PRONOSTIC

 

L’évolution de la cirrhose est variable, dépendant en partie de sa cause. On considère que la présence d’une décompensation avec complication de type ictère, ascite, hémorragie digestive, infection bactérienne, encéphalopathie, sont des facteurs de mauvais pronostic.

 

Dans le cas particulier de la cirrhose alcoolique, la poursuite de l’éthylisme ou l’apparition d’une hépatite alcoolique sont des facteurs d’aggravation.

 

Le pronostic de la cirrhose peut être estimé plus objectivement de trois manières :

·          Le test respiratoire à l’aminopyrine .

·          Des tests hépatiques endogènes : acides biliaires et cholinestérase.

·          La classification de Child-Pugh.

 

 

EVALUATION DE GRAVITE D’UNE CIRRHOSE
PARENCHYMATEUSE SELON CHILD-PUGH

Le score de Child-Pugh fait appel à critères cliniques et biologiques.

Pour chacun de 5 critères, une valeur de 1 à 3 est octroyée suivant la sévérité du critère, ce qui permet d’établir un score variant de 5 à 15.

Valeur du critère ®

1

2

3

Encéphalopathie

 

Ascite

 

Bilirubinémie

 

Albumine

 

PTT

0

 

0

 

< 2 mg/dl

 

> 3,5 g/dl

 

> 60%

Modérée

 

Modérée

 

2-3 mg/dl

 

2,8 - 3,5 g/dl

 

40 - 60%

sévère

 

sévère

 

> 3 mg/dl

 

< 2,8 g/dl

 

< 40%

CHILD-PUGH A : score 5 à 6

CHILD-PUGH B : score 7 à 9

CHILD-PUGH C : score 10 à 15

 

 

Les survies à 1 an sont approximativement les suivantes : 90% pour les stades A, 70% pour les stades B et 45% pour les stades C.


CHAPITRE XI :
ABCES, KYSTES ET TUMEURS HEPATIQUES

 

 

Ces lésions ne provoquent pas d’altération fonctionnelle hépatique mais se manifestant par des symptômes liés à la présence d’une masse.

 

I.         LES ABCES HEPATIQUES

A.        LES ABCES A PYOGENES

1.         Etiologie

 

Les abcès pyogènes du foie peuvent résulter des affections suivantes :

·          un infection biliaire (30%) ;

·          une dispersion par voie sanguine via le système porte, d’infections abdominales (diverticulite, appendicite), néoplasie (10%) ;

·          une septicémie généralisée avec envahissement du foie par l’intermédiaire de l’artère hépatique ;

·          une extension directe à partir d’un foyer infectieux voisin (vésicule biliaire, poumon).

 

Leur origine reste imprécise dans environ 50% des cas. Les abcès hépatiques, de taille variable, peuvent être solitaires ou multiples.

 

2.         Manifestations cliniques et diagnostic

 

Le début peut être brusque ou insidieux. Le patient présente des signes d’infection (fièvre souvent oscillante, asthénie, anorexie) et d’une manière inconstante, des douleurs de l’hypocondre droit, parfois irradiées à l’épaule, souvent augmentées à l’inspiration. L’ictère est, par contre, rare et tardif. L’examen révèle une hépatomégalie, une douleur à la percussion de la base de la cage thoracique droite et des signes pleuropulmonaires de la base droite.

 

Les tests hépatiques restent le plus souvent normaux. Il existe une hyperleucocytose et une élévation éventuelle des phosphatases alcalines. La radiographie à blanc révèle parfois une surélévation de la coupole diaphragmatique droite qui peut être déformée. Le diaphragme peut être immobile. Un discret épanchement pleural droit n’est pas exceptionnel. L’échographie et la tomodensitométrie montrent la présence dans le foie d’une masse à contenu liquidien finement hétérogène à contours irréguliers et flous. La paroi devient hyperdense après injection de produit de contraste.

 

3.         Traitement

 

Le traitement comporte, en général, une antibiothérapie spécifique et, éventuellement, un drainage percutané de la cavité abcédée.

 

B.        LES ABCES AMIBIENS

1.         Etiologie

 

Les amibes proviennent d’un foyer ulcéré de la paroi intestinale. Ces ulcérations sont surtout observées dans le caecum ; cependant elles peuvent également atteindre le côlon, le sigmoïde et le rectum.

L’Entamoeba histolytica atteint le foie par voie portale. Les lésions parenchymateuses hépatiques sont secondaires à l’action d’enzymes protéolytiques amibiens. Des abcès solitaires ou plus rarement multiples en sont la conséquence. L’abcès hépatique amibien a, en général, le volume d’une orange et siège, le plus souvent dans la partie antérieure du lobe droit. Son centre contient un pus chocolaté. Initialement, il n’y a pas de paroi individualisée, celle-ci se forme ultérieurement.

L’abcès hépatique amibien peut compliquer une amibiase aiguë ou ancienne. Le temps de latence entre le développement de l’abcès et les lésions intestinales responsables de la dysenterie amibienne peut être très long (jusqu’à 30 ans).

 

2.         Manifestations cliniques et diagnostic

 

Les signes cliniques, biologiques et radiologiques sont les mêmes que dans les abcès non amibiens. Le début de la symptomatologie est habituellement progressif, bien que des manifestations brutales aient été signalées. Les complications principales sont la ruptures de l’abcès soit dans la cavité abdominale, soit dans la cavité pleurale et la formation d’abcès cérébraux par voie sanguine.

La positivité des réactions sérologiques obtenues par immunofluorescence, immunodiffusion ou hémagglutination représente l’élément le plus spécifique en faveur de l’origine amibienne d’un abcès hépatique. La recherche des amibes dans les selles est positive dans les amibiases aiguës. La mise en évidence d’amibes dans le pus de l’abcès est très rare.

Lorsque la suspicion épidémiologique est grande, il est conseillé d’entreprendre le traitement avant d’obtenir le résultat de ces examens qui requièrent un long délai de réponse.

 

3.         Traitement

 

Le traitement de choix de l’abcès hépatique amibien est le metronidazole (Flagyl*) administré à la dose de 750 mg, trois fois par jour durant 10 jours. En vue d’éviter les récidives on conseille de stériliser le tube digestif par un amoebicide de contact (Gabroral* 4/j – 10 jours). L’efficacité du traitement sera évaluée par échographie : la lacune doit disparaître en 1 à 4 mois. Une récidive est observée dans environ 50% des cas. En cas d’échec ou de récidive, la vidange ou le drainage par ponction percutanée sous contrôle endoscopique est la méthode de choix.

 

II.        LES KYSTES HYDATIQUES

 

L’échinocoque est un parasite dont l’hôte définitif est le chien, l’hôte intermédiaire est le mouton, le boeuf et éventuellement l’homme. L’homme se contamine en ingérant des oeufs présents dans les selles du chien, en général, par léchage des mains ou caresse du pelage. Les oeufs dont la coque a été libérée par l’HCI se transforment en larves et celles-ci atteignent le foie par voie porte et y forment des kystes. Dans 20% des cas, les kystes se forment dans les poumons, 10% siègent ailleurs (rate, cerveau).

 

Le lobe droit du foie est atteint préférentiellement (85% des cas). Le kyste hydatique est limité par une enveloppe formée, du dehors en dedans, par :

·         une membrane conjonctive adventice développée par l’hôte (périkyste) ;

·        une cuticule hyaline ;

·        une membrane proligère mince produisant les vésicules filles.

 

1.         Manifestations cliniques

 

Les symptômes subjectifs du kyste non compliqué sont ou absents ou peu spécifiques (anorexie, diarrhée, pesanteur épigastrique ou de la fosse iliaque droite). Parfois, apparaissent du prurit ou des poussées récidivantes d’urticaire, secondaires à une sensibilisation de l’hôte au liquide du kyste. Le plus souvent, c’est l’apparition d’une hépatomégalie chez un sujet ayant vécu dans une région où l’échinococcose est endémique qui fait suspecter le diagnostic. Il n’y a, en général, ni cholostase, ni hypertension portale. La rupture dans le péritoine provoque des signes de prurit et parfois même un choc anaphylactique. La rupture dans les voies biliaires se manifeste par des signes biliaires : angiocholite, ictère par rétention, surinfection de la cavité kystique. Le kyste peut également se rompre dans les organes voisins, poumons, péricarde, côlon, etc.

 

2.         Diagnostic

 

L’échographie et la tomodensitométrie révèlent la présente d’une collection liquidienne. La présence de calcifications de la paroi et de vésicules filles ou de sable hydatique permet-tent d’affirmer la nature hydatique du kyste, mais ces signes manquent dans 10% des cas.

 

Les tests hépatiques sont en général normaux. Une éosinophilie est parfois présente.

La présence d’immunoglobulines anti-échinocoque est quasiment constante. Les IgM disparaissent rapidement après la destruction du parasite tandis que les IgG persistent pendant des années.

 

La ponction est formellement contre-indiquée.

 

3.         Traitement

 

Le traitement est chirurgical et il est réalisé en deux étapes :

 

a. Destruction des scolex

 

Il est, en principe, indispensable de détruire les vésicules filles avant toute ouverture du kyste. Ces vésicules contiennent en effet des scolex susceptibles de se greffer sur le péritoine provoquant une hydratidose péritonéale secondaire. La stérilisation du kyste est traditionnellement obtenue par injection intra-kystique de solutions hypertoniques. Le champ opératoire sera protégé par des compresses imbibées du même sérum. L’efficacité de cette méthode est sujette à caution et il est actuellement recommandé de traiter le malade par de l’albendazole (anti-helmintique) durant plusieurs semaines avant et/ou après l’intervention.

 

b. Elimination du kyste

 

La méthode la plus couramment utilisée consiste en une résection de la partie du kyste saillant à la surface du foie (dôme saillant) ainsi que de la membrane proligère. Les communications vers les voies biliaires seront recherchées et suturées. La cavité résiduelle sera drainée et éventuellement bourrée par de l’épiploon. Une méthode plus agressive (périkystectomie) comportant la résection non seulement du kyste mais aussi du périkyste peut également être utilisée. De réalisation plus délicate, elle permet d’obtenir des cicatrisations plus rapides. L’hépatectomie n’a que des indications exceptionnelles.

 

III.      LES TUMEURS HEPATIQUES

 

Ne seront reprises dans ce chapitre que les tumeurs les plus fréquentes.

 

A.        LES KYSTES NON PARASITAIRES

1.         Kystes simples

 

Ce sont des lésions congénitales très fréquentes (3% des individus). Ils sont formés à partir de l’épithélium biliaire mais ne communiquent pas avec les voies biliaires. Leur taille va de quelques mm à plusieurs cm. Ils peuvent grandie, mais la croissance est lente.

 

Ces kystes sont asymptomatiques sauf s’ils atteignent une grande taille ce qui est très rare.

 

L’échographie suffit en général au diagnostic. Elle montre la présence d’une masse ronde anéchogène à parois très fines. La tomodensitométrie confirme la nature liquidienne de la lésion et son caractère avasculaire.

 

Les kystes biliaires de petit volume ne nécessitent ni surveillance, ni traitement.

 

2.         Maladie polykystique

 

La polykystose hépato-rénale est une maladie héréditaire rare. Les kystes rénaux précèdent les kystes hépatiques et provoquent une hypertension et une insuffisance rénale. Chez les malades survivant à l’affection rénale (transplantés), des kystes hépatiques multiples peuvent se développer. Leurs seuls symptômes sont dus à un effet de masse. Le traitement comporte des hépatectomies partielles et des fenestrations des kystes restants.

 

B.        L’HEMANGIOME DU FOIE

 

Il s’agit d’une tumeur vasculaire, de type caverneux, probablement congénitale. Sa fréquence est d’environ 4%. La croissance de la tumeur est, en général, très lente.

 

De petite taille, il est en général asymptomatique et est découvert fortuitement au cours d’une laparotomie, d’une laparoscopie, d’un examen échographique ou tomographique. Plus volumineux, il se manifeste sous la forme d’une tumeur palpable, molle et parfois accompagnée d’un souffle. Les hémangiomes volumineux peuvent se rompre spontanément ou à la suite d’un traumatisme. De la thrombopénie ou de l’afibrinogénie peuvent survenir à la suite de coagulation à l’intérieur de la tumeur.

 

A l’échographie on trouve une masse pleine, hyperéchogène. En tomodensitométrie la masse est hypodense sans contraste, et après injection de produit de contraste elle s’opacifie lentement de façon centripète. Des images caractéristiques sont obtenues en résonance magnétique nucléaire. La réalisation d’une biopsie est classiquement contre-indiquée mais ses dangers ont été surestimés.

 

Un traitement (hépatectomie) ne sera conseillé que pour les très exceptionnelles tumeurs volumineuses et symptomatiques.

 

C.        L’ADENOME HEPATIQUE

 

Il s’agit d’une tumeur bénigne, généralement unique, souvent encapsulée. Elle est formée de travées plus ou moins régulières, d’hépatocytes normaux ou quasi normaux. En général de petite taille, elle peut exceptionnellement atteindre 20 cm.

Nettement plus fréquent chez la femme que chez l’homme, son apparition est favorisée par la prise de contraceptifs oraux fortement dosés et par les stéroïdes androgènes ou anabolisants.

 

Il peut se compliquer d’hémorragies intratumorales ou péritonéales.

 

Sa transformation en carcinome est exceptionnelle dans les adénomes secondaires à la prise de contraceptifs, plus fréquente après prise d’anabolisants.

 

Les lésions, en général asymptomatiques, sont le plus souvent découvertes fortuitement au cours d’un examen échographique (masse iso ou hypoéchogène) ou tomodensitométrique (masse pleine vascularisée).

 

Un diagnostic de certitude est souvent difficile à établir sur des biopsies et la confusion avec un adéno-carcinome est possible.

 

L’arrêt des contraceptifs ou des anabolisants est recommandé et la grossesse est contre-indiquée. Une résection chirurgicale doit être envisagée sauf s’il existe un risque à la pratiquer.

 

D.        L’HYPERPLASIE NODULAIRE FOCALE

 

Sa fréquence est beaucoup plus grande que celle de l’adénome.  L’hyperplasie nodulaire focale est caractérisée par la présence d’une ou plus rarement de plusieurs tumeurs plus ou moins volumineuses, dont le centre est occupé par une étoile fibreuse qui envoie des prolongements vers la périphérie. L’examen microscopique montre que la tumeur est faite de nodules d’hépatocytes séparés par des bandes de fibrose contenant des néocanaux biliaires. L’hyperplasie nodulaire focale n’est pas une néoplasie mais représente plus probablement une malformation. Elle affecte les deux sexes mais est plus fréquente chez la femme.

 

L’hyperplasie nodulaire focale est en général asymptomatique. Comme l’adénome, elle peut se compliquer d’hémorragies, mais leur fréquence est nettement plus basse que dans l’adénome. La survenue de ces hémorragies serait, selon certains auteurs, favorisée par la prise de contraceptifs oraux. A la tomodensitométrie, deux particularités orientent le diagnostic : l’étoile fibreuse centrale et l’opacification précoce et homogène après injection du produit de contraste. La scintigraphie peut montrer une lésion isocaptante, ce qui n’est pas le cas pour l’adénome.

 

L’abstention ou l’arrêt des contraceptifs est conseillée. Un traitement chirurgical n’est indiqué qu’en cas de complication ou de doute diagnostique.

 

E.        LES TUMEURS MALIGNES PRIMITIVES

1.         Anatomopathologie

 

L’hépatocarcinome est la tumeur maligne du foie la plus fréquente. On distingue plusieurs variétés : localisées sous forme d’une masse unique de taille variable, multinoduclaire, diffuse avec présence de tumeurs multiples. Du point de vue microscopique, l’hépatocarcinome est formé de travées cellulaires pluristratifiées dont les éléments ressemblent aux hépatocytes par l’architecture générale, mais en diffèrent par la taille plus grande et le polymorphisme cellulaire. L’hépatocarcinome a tendance à envahir les branches de la veine porte et plus rarement les veines sus-hépatiques.

 

Le cholangiocarcinome dérive de l’épithélium des voies biliaires ; il est donc un adénocarcinome plus classique. Il est beaucoup plus rare que l’hépatocarcinome. Il peut être associé à la cholangite sclérosante.

Une forme rare de cancer primitif est le carcinome fibro-lamellaire. Il affecte les deux sexes principalement entre 10 et 35 ans, indépendamment des facteurs étiologiques habituels. L’évolution en est lente.
L’hépatoblastome est une tumeur très rare de type embryonnaire rencontrée chez le jeune enfant.

 

2.         Epidémiologie et étiologie

 

Très fréquent en Afrique tropicale, l’hépatocarcinome est rare en Europe. Il existe une prédominance très nette pour le sexe masculin.

 

L’étiologie est dominée par la notion de cirrhose préexistante qui est retrouvée dans plus de 80% des cas. Les taux d’hépatome sont nettement plus élevés par les cirrhoses d’origine virale (20-40% dans l’hépatite B) qu’éthylique (5-15%). Les virus B ou C n’agissent cependant pas comme oncogène, mais indirectement par les phénomènes de régénération qu’ils entraînent. Plus discuté est le rôle de certaines toxines alimentaires provenant du métabolisme de champignons contaminant les céréales (aflatoxine).

3.         Manifestations cliniques

 

Le diagnostic d’hépatocarcinome sera évoqué dans deux circonstances principales :

·        la découverte par échographie d’une tumeur hépatique solide. Il peut s’agir d’une découverte de hasard ou d’un examen réalisé à titre systématique chez un malade atteint d’une affection susceptible de se compliquer d’un adénocarcinome hépatique (cirrhose) ;

·        l’apparition chez un cirrhotique connu d’une douleur de l’hypocondre droit, d’une hépatomégalie grossissant rapidement, d’une ascite réfractaire devenant hémorragique, d’un ictère ou d’une fièvre inexpliquée.

 

4.         Diagnostic

 

L’exploration fonctionnelle hépatique met fréquemment en évidence des signes de cholostase anictérique (augmentation des phosphatases alcalines, et des gamma GT) si le parenchyme hépatique est normal. Chez les cirrhotiques les anomalies habituelles de la cirrhose seront observées.

 

Une augmentation du taux de l’a-foetoprotéine sera observée dans 60% des cas. L’importance de l’augmentation dépend de la taille de la tumeur. Une augmentation du taux d’a-foetoprotéine n’est cependant pas spécifique de l’hépatome malin. Elle peut être observée dans d’autres tumeurs malignes ou au cours d’affections bénignes (hépatite virale, femmes enceintes).

Des syndromes para-néoplasiques peuvent apparaître : polyglobulie, hypoglycémie et hypercalcémie.

 

L’échographie, la tomodensitométrie, la résonance magnétique nucléaire et l’artériographie révèlent la présence d’images suggestives (masse pleine, vascularisée).

 

Une biopsie (sous contrôle échographique ou laparoscopique) sera réalisée sauf si le diagnostic est certain à l’imagerie.

 

5.         Traitement

 

Lorsque la lésion est localisée, mesure moins de 5 cm et n’envahit pas les vaisseaux, une résection (hépatectomie) peut être proposée s’il n’y a pas de cirrhose ou si la cirrhose est du type Child A. Le taux de récidive à 3 ans chez ces malades est d’environ 30% alors qu’il dépasse 70% lorsque la tumeur a plus de 5 cm.  Une transplantation peut aussi être proposée en cas de nodule de moins de 5 cm associée à une cirrhose Child A.

 

Pour les lésions multiples ou en cas de cirrhose Child B ou C, une transplantation hépatique doit être envisagée. Le taux de récidive est de 10% lorsqu’il n’y a pas plus de 3 tumeurs et qu’elles ne dépassent pas 5 cm. Le taux de récidive dépasse 75% dans les cas moins favorables et de ce fait les centres de transplantations refusent en général ces malades.

 

Les autres alternatives de thérapeutiques sont l’alcoolisation sous échographie et la chimio-embolisation (injection intra-artérielle de lipiodol ultra fluide et de cisplatine).

 

F.        LES TUMEURS MALIGNES SECONDAIRES

 

Les métastases néoplasiques peuvent atteindre le foie soit par voie portale, soit par voie artérielle. Les origines les plus fréquentes sont : les tumeurs digestives, pulmonaires ou mammaires.

 

Les métastases sont le plus souvent multiples. Elles se manifestent par la présence dans le parenchyme hépatique de nodules de taille variable, de forme arrondie ; leur nombre et leur taille peuvent être si importants que le foie triple ou quadruple de volume.

Les symptômes sont analogues à ceux des tumeurs malignes primitives. La présence d’un gros foie bosselé doit faire penser à la présence de métastases. Le diagnostic peut être confirmé principalement par échographie, tomodensitométrie et laparoscopie.

 

Une hépatectomie partielle réglée ou à la demande doit être proposée en cas d’atteinte d’un seul lobe ou en présence de métastases aisément réséquables dans les deux lobes, sans récidive locale et sans autre localisation néoplasique de la tumeur primitive. Cette éventualité est malheureusement assez rare. La ligature de l’artère hépatique a été proposée. Elle est basée sur l’observation suivant laquelle les métastases possèdent une vascularisation exclusivement artérielle. Quelques régressions ont été obtenues mais il ne paraît pas que le pronostic ait été nettement modifié. La chimiothérapie par voie générale ou par voie locale (perfusion vasculaire hépatique) a également provoqué des régressions temporaires, son efficacité dépendant de la nature de la tumeur primitive.


La survie est très variable mais dépasse rarement 6 mois.


CHAPITRE XII :
LA CHIRURGIE HEPATIQUE

I.         LES RESECTIONS HEPATIQUES

 

La chirurgie hépatique a considérablement progressé au cours des 20 deniers années. La mortalité réduite et le contrôle de sa morbidité a permis d'élargir ses indications pendant que certains traitements médicaux, endoscopiques et radio-interventionnels supplantaient la chirurgie proprement dite dans l'hypertension portale, certains cholangiocarcinomes du hile, etc….

 

Comme l'ont montré les chapitres précédents, on distingue les segmentectomies, les hépatectomies et les dérivations biliaires.

 

Fig. 18

L'hépatectomie est indiquée surtout pour les tumeurs primitives, les métastases uniques ou isolées et les tumeurs bénignes.

L'anatomie segmentaire fu foie doit être revue pour comprendre les différentes techniques.

Trois arborisations conditionnent les limites de section:

1.      La vascularisation artérielle

2.      L'arbre biliaire

3.      Le réseau confluent sus-hépatique.

Le cas illustré montre un hépatocarcinome sur foie sain situé sur les segments II, III, IV; une lobectomie gauche est insuffisante et une tri-segmentectomie laisserait un segment I probablement mal vascularisé voire envahi.

Il s'agit donc d'une hépatectomie gauche vraie emportant 4 segments.

 

Toutes les variantes peuvent être proposées si l'on respecte le fait que chaque territoire épargné doit être irrigué et drainé.

 

 

 

 

 
 



 


B

 

DB

 

CB

 

AB

 

 

 

 

 

 

 

 

 


Fig.19

 

A.     Hépatectomie droite vraie

B.     Hépatectomie droite élargie au IV

C.     Trisegmentectomie gauche

D.    Hépatectomie gauche

 
II.        LES DERIVATIONS BILIAIRES

 

La cholédoco-entérostomie et l'hépatico-entérostomie consistent à monter une anse grêle sur la voie biliaire extra-hépatique ou intra-hépatique et à restaurer la continuité jéjunale par un montage en Y, au pied de l'anse. Toutes deux favorisent un reflux de la flore intestinale dans les voies biliaires qui peut occasionner l'angiocholite ascensionnelle.

Après l'intervention, la présence d'une aérobilie ( air dans les voies biliaires intra-hépatiques ) démontre la fonctionnalité de l'anastomose. Le principe est le même que l'intervention de Kasaï pour atrésie congénitale des voies biliaires.

 

III.      LA TRANSPLANTATION HEPATIQUE

 

Depuis 1981, date du début de l’utilisation de la cyclosporine en clinique, le nombre annuel de transplantations hépatiques (TH) s’est accru de façon exponentielle tant aux USA qu’en Europe. Malheureusement, une pénurie d’organes se fait sentir et les programmes tournent au ralenti. De ce fait, plus que jamais, se pose pour le clinicien la question de définir au mieux les indications de la TH ainsi que le moment idéal pour inscrire le patient sur une liste d’attente.

 

1.         Indications en fonction d'un syndrome clinique

 

Un prurit féroce et réfractaire à tout traitement médical (ex. : cirrhose biliaire), une raréfaction osseuse avec douleurs osseuses (ex. : cirrhose biliaire), une encéphalopathie hépatique chronique invalidante, une ascite réfractaire (éventuellement traitée dans un premier temps par un shunt intra-hépatique par voie transjugulaire) peuvent constituer des indications en soi.

2.         Insuffisance hépatique globale terminale

a. Fulminante aiguë ou subaiguë

 

Parmi les facteurs pronostiques, retenons le facteur V, le PTT, le degré d’encéphalopathie, le taux de bilirubine, le degré d’acidose (intoxication au paracétamol).

 

b. Chronique

·        Cirrhoses parenchymateuses

 

Certains éléments cliniques (ascite réfractaire, ictère, encéphalopathie réfractaire, hémorragies répétées sur varices, infection répétée du liquide d’ascite) ou biologiques (diminution de l’albuminémie, diminution du PTT, augmentation de la bilirubine) sont des critères utiles. Des scores clinico-biologiques (tels que le score de Child-Pugh) apportent plus d’objectivité.

 

Quelques points spécifiques doivent être relevés :

-          Le problème de la cirrhose alcoolique. Dans notre pays l’alcoolisme est la cause de la cirrhose dans 60% des cas au moins. Cependant, 5 à 15% des cirrhoses alcooliques sont éligibles en vue d’une greffe. On sélectionne les patients susceptibles de rester abstinents après la TH (sobriété de plus de 6 mois avant la greffe, reconnaissance de l’éthylisme par le patient et sa famille, volonté de s’en sortir) et ne présentant pas de complications extra-hépatiques de leur alcoolisme.

-          Le problème de la cirrhose B. En cas de multiplication virale (HBeAg +, DNA +) le greffon se réinfecte par le virus B. On ne soumettra à la TH que les patients sans multiplication virale (HBeAg - ; DNA -) ou infectés par le virus B delta. Une immunoprophylaxie par immunoglobulines spécifiques sera toujours réalisée.

-          Le problème de la cirrhose C. Après TH, le virus C récidive systématiquement sur le greffon. Cependant, les lésions induites sont peu sévères et d’évolution lente.

 

·        Cirrhoses biliaires

 

Les résultats de la TH pour cirrhose biliaire primitive ou cholangite sclérosante sont parmi les meilleurs (plus de 75% de survie à 3 ans) en raison de l’hypertension portale peu importante et de l’absence de défaillance hépatique grave. L’évolution de la bilirubine est un critère important pour décider du moment de la greffe.

 

3.         Insuffisance hépatique sélective

 

C’est l’exemple de l’hyperoxalurie avec un déficit sélectif dans le foie et des complications rénales (greffe combinée foie + rein).

 

4.         Tumeurs ou pseudotumeurs irrésécables

 

Ce groupe comprend les hépatomes sur cirrhose, les cholangiocarcinomes du hile, les métastases de tumeurs endocrines, des tumeurs hépatiques rares (ex. : hépatome fibro-lamellaire) ou des pseudo-tumeurs parasitaires (ex. : échinococcose alvéolaire).

 

Le choix de la TH par rapport à la résection chirurgicale ou des traitements alternatifs non chirurgicaux reste l’objet de controverses.

 

5.         Techniques chirurgicales

 

La technique la plus ancienne est la transplantation orthotopique d’un foie de cadavre.

 

La rareté des donneurs a imposé le développement de nouvelles techniques. Il est possible de réaliser une bipartition du foie ce qui permet la réalisation de deux greffes à partir d’un seul donneur. Le lobe gauche du foie peut être prélevé chez un donneur vivant apparenté.

Au cours d’hépatites fulminantes, il est possible de transplanter en position orthotopique ou hétérotopique un foie réduit ou partagé sans résection du foie du receveur, ce qui permet l’exérèse ultérieure du greffon et l’arrêt de l’immunosuppression après avoir constaté la régénération du foie natif.

 

 

INDICATIONS DE LA TRANSPLANTATION HEPATIQUE

I. INDICATIONS EN FONCTION D’UN SYNDROME CLINIQUE

· Prurit féroce ou réfractaire

· Ascite réfractaire

· Encéphalopathie réfractaire

 

II. INSUFFISANCE HEPATIQUE GLOBALE TERMINALE

· Fulminante aiguë ou subaiguë

· Chronique

*  Parenchymateuse

Alcool, virus B, virus B delta, virus C

Hémochromatose, Maladie de Wilson, déficit en a1 antitrypsine

Hépatite autoimmune, cryptogénique

*  Biliaire

Cirrhose biliaire primitive

Cholangite sclérosante

Cirrhose biliaire secondaire

 

III. INSUFFISANCE HEPATIQUE SELECTIVE

Hyperoxalurie

 

IV. TUMEURS OU PSEUDO TUMEURS IRRESEQUABLES

· Hépatocarcinome sur cirrhose

· Tumeurs vasculaires

· Echinococcose alvéolaire

 

 

 

CONTRE-INDICATIONS DE LA TRANSPLANTATION HEPATIQUE

Age : > 65 ans

Mauvaise compliance, mauvais entourage, atteinte extra-hépatique (cardiaque, cérébrale, pulmonaire, neurologique) sévère et irréversible.

Infection extra-hépatique non contrôlée

Maladie HIV

Néoplasie extra-hépatique

Néoplasie intra-hépatique de grande taille et/ou invasion de gros axes veineux


 


 

SEPTIEME PARTIE :

LES VOIES BILIAIRES

 

 

 

Avec la collaboration : M. DELHAYE


CHAPITRE I : GENERALITES

I.         MANIFESTATIONS CLINIQUES

1.         La colique biliaire

 

La crise de colique biliaire correspond à la distension partielle ou totale de l'arbre biliaire. Elle survient le plus souvent après un repas gras.  La douleur est localisée à l’hypocondre droit ou à l'épigastre. Son irradiation vers l’épaule droite ou plus rarement vers la région rétrosternale est caractéristique.  Elle est continue mais peut présenter des paroxysmes lui donnant une allure intermittente. Elle atteint son maximum en moins d’une heure. Une inhibition respiratoire (impossibilité d’inspirer profondément) et une sensation d’écrasement sont présentes dans plus de la moitié des cas. Il existe parfois des nausées et des vomissements. La crise, non traitée, dure de une à plusieurs heures sans dépasser 24 heures. Elle est rapidement calmée par l’administration d’antispasmodiques. La crise de colique biliaire peut être accompagnée de subictère et de subfébrilité. Les urines peuvent être foncées. L’examen physique montre une sensibilité de l’hypocondre droit et de l’épigastre. Chez certains malades, les symptômes évoquent le diagnostic d’angor, d’ulcère gastro-duodénal ou d’occlusion intestinale.

 

La crise se traite par administration par voie IM ou IV d’antispasmodiques neurotropes (anticholinergiques) ou musculotropes (papavérine). Les opiacés sont contre-indiqués car ils augmentent la pression dans les voies biliaires.

 

2.         L’ictère

 

·        Nu ( obstruction )

 

Le développement progressif d’un ictère franc sans fièvre ni douleur, et possédant les caractéristiques cliniques et biologiques de l’ictère cholostatique, est en général le résultat d’une sténose des voies biliaires. Dans la majorité des cas la sténose est due à une tumeur maligne comprimant ou envahissant les voies biliaires. Plus rarement, il s’agit d’une pancréatite chronique, exceptionnellement d’une lithiase.

 

Le signe de Courvoisier-Terrier (palpation d’une vésicule distendue chez un patient présentant un ictère cholostatique) indique que la lésion obstructive est située en dessous du canal cystique. Ce signe est rare dans la lithiase car les vésicules lithiasiques sont souvent sclérosées et incapables de se distendre. Il est par contre fréquent en cas de néoplasie biliaire ou pancréatique.

 

·        Associé à la fièvre

 

La triade Ictère-Douleur-Fièvre est pathognomonique de l'angiocholite . Celle-çi peut apparaître dans tous les cas où existe un obstacle à l’écoulement de la bile dans la voie biliaire principale.

 

La cause la plus fréquente est la lithiase. Plus rarement, l’angiocholite est secondaire à une ou plusieurs sténoses, à une parasitose (taenia, échinocoque, lambliase) ou à un reflux duodéno-cholédocien.

 

Dans sa forme caractéristique, elle se manifeste par l’association de trois symptômes apparaissant dans l’ordre suivant (triade de Villard) :

1)                 douleur de l’hypocondre droit et de l’épigastre ;

2)                 clochers fébriles avec frissons ;

3)         ictère en général fluctuant, rarement intense.

 

Plus rarement, l’angiocholite se manifeste d’emblée par un choc septique ou un syndrome ictéro-urémigène (insuffisance rénale aiguë compliquant le sepsis d’origine biliaire).

 

L’angiocholite est une affection sévère. Les crises répétées peuvent entraîner la formation de micro-abcès hépatiques et d’une cirrhose biliaire secondaire. Un traitement est donc indispensable. Sa nature dépend de la cause de l’angiocholite.

 

3.         L’hémobilie

 

Elle se manifeste par une triade caractéristique : douleurs de type colique biliaire, ictère, hémorragie digestive.

 

L’hémobilie est, en général, la conséquence de la rupture dans les voies biliaires d’un pseudo-anévrisme développé à partir d’une branche de l’artère hépatique.

 

Les causes les plus fréquentes sont les traumatismes hépatiques, la ponction biopsie du foie, les parasitoses, les tumeurs.

 

4.         La dyspepsie

 

Une symptomatologie foncitonnelle comportant une association de nausées, de vomissements et de tension de l’hémi-abdomen droit est souvent attribuée à une pathologie biliaire (« crise de foie »). Cette éventualité est cependant rare et le plus souvent la symptomatologie résulte d’une colopathie fonctionnelle. De même, la migraine et l’intolérance au chocolat ne sont presque jamais dues à une pathologie biliaire.

 

II.        METHODES D’EXPLORATION

 

Deux examens sont primordiaux dans l’investigation du tractus bilaiire : l’échotographie percutanée et la cholangiographie endoscopique. Cette dernière technique, invasive, tend à être remplacée actuellement par la cholangiographie par résonance magnétique nucléaire dans un but de diagnostic d’une pathologie biliopancréatique. La cholangiographie endoscopique garde cependant toute sa valeur pour l’abord thérapeutique des voies biliaires et pancréatiques.

 

1.         L’échographie et la tomodensitométrie

 

L’échotographie percutanée permet d’apprécier le calibre des voies biliaires, la taille de la vésicule et de déceler la présence de calculs ou de tumeurs. C’est, en général, le premier examen pratiqué en pathologie biliaire.

 

L’échoendoscopie (échographie par voie endoscopique) a une sensibilité significativement meilleure que l’échographie percutanée ou la tomodensitométrie pour le diagnostic de lithiase cholédocienne.

 

Des échogaphies per-opératoires sont pratiquées dans certains centres spécialisés.

La tomodensitométrie a quelques indications spécifiques.

 

2.         Les autres examens radiographiques

a. L’abdomen sans préparation (abdomen à blanc)

 

Il permet de déceler des calculs biliaires radio-opaques, des calcifications dela paroi vésiculaire et la présence d’air dans les voies biliaires  (aérobilie), témoin d’une fistule bilio-digestive ou d’un iléus biliaire.

 

b. La cholécystographie orale

 

La cholécystographie orale, comme premier moyen de diagnostiquer  une lithiase vésiculaire, a été supplantée par l’échographie percutanée.

 

c. La cholangiographie directe

 

L’injection directe d’un produit de contraste dans les voies biliaires permet d’obtenir une excellente opacification de celles-ci. La méthode est utilisable en présence d’une cholostase. Elle a quasi-complètement supplanté les cholangiographies intraveineuses.

 

Plusieurs techniques sont couramment utilisées :

 

(1)       La cholangiographie endoscopique


 

Figure 20

 

 

Elle est réalisée par cathétérisme rétrograde du cholédoque à partir de la papille au moyen d’un duodénoscope. Le taux de réussite est près de 100%.

La cholangiographie endoscopique a l’avantage de permettre dans certains cas, le traitement temporaire ou définitif de la lésion mise en évidence (spinchtérotomie oddienne, extraction de calculs cholédociens, dilataton de sténose). Elle permet en général l’exploration anatomique simultanée des voies biliaires et pancréatiques.

 

 
 


(2)       La cholangiographie transpariétale

Figure 21

Elle se réalise par ponction directe transpariétale d’un canal biliaire. Son taux de réussite est de plus de 95% si les voies biliaires sont dilatées, mais n’est que de 50 à 60% dans le cas contraire.

Elle est un complément utile à la cholangiographie endoscopique en présence d’une sténose totale de la voie biliaire principale.

 
 

 


 


La combinaison des deux méthodes permet la visualisation de la voie biliaire sus et sous-sténotique. En cas d’obstacle sur les voies biliaires, il est indispensable de drainer les voies biliaires par l’une ou l’autre de ces techniques.

 

(3)       La cholangiographie per-opératoire

 

L’injection du produit opaque est faite le plus souvent, par le canal cystique après cholécystectomie pour détecter d’éventuelles lésions hépatico-cholédociennes méconnues (calculs, sténoses, etc…), pour contrôler l’intégrité de la voie biliaire principale en cas d’intervention difficile ou pour déterminer l’anatomie exacte des voies biliaires (qui présentent de nombreuses variations).

d. La cholangio-IRM

 

D’introduction récente cette technique non invasive ne nécessitant pas d’injection (IV ou directe) de produit de contraste ni d’irradiation du patient, permet d’obtenir la cartographie des voies biliaires et pancréatiques de manière quasi aussi précise que par les techniques de cholangiographie directe. Elle a tendance à remplacer toutes les autres méthodes d’investigation diagnostique des afections biliaires et pancréatiques.

 

e. L’angiographie

 

Elle est réservée aux hémobilies. Elle permet non seulement de localiser la source de l’hémorragie, mais éventuellement de traiter celle-ci par embolisation.

 

f. La cholangiographie intra-veineuse.

 

Primitivement l'examen le plus simple pour visualiser les voies biliaires par injection de biligraphine intra-veineuse, la cholangiographie intra-veineuse n'est compétitive que dans quelques centres. Elle exclut les anomalies anatomiques majeures en pré-opératoire. On lui préfère actuellement la cholangio IRM ou le Biliscan, beaucoup plus coûteux et moins accessibles à tous les patients pour des raisons économiques.

 

g. Le bili-scan.

 

Il s'agit de la reconstruction par tomographie spiralée des voies biliaires après injection de biligraphine. Cet examen est réalisable en l'absence d'ictère. Les images anatomiques sont de meilleure qualité.

 


CHAPITRE II : LA LITHIASE BILIAIRE

I.         PATHOGENIE

A.        COMPOSITION DES CALCULS BILIAIRES

 

Il y a deux types principaux de calculs biliaires : les calculs cholestéroliques (qui se forment esentiellement dans la vésicule biliaire) et les calculs pigmentaires (qui peuvent se former dans les voies biliaires). En Europe et en Amérique du Nord, ³ 75% des calculs sont cholestéroliques (purs ou mixtes) et £ 25% sont des calculs pigmentaires. Par contre, en Afrique et en Asie, où la prévalence de lithiases est faible, il s’agit plus souvent de calculs pigmentaires.

Les calculs cholestéroliques purs ne contiennent que du cholestérol. Les calculs cholestéroliques mixtes, les plus nombreux, contiennent en majorité du cholestérol (³ 50% de leur poids), mais aussi une certaine proportion de pigments biliaires. Les calculs pigmentaires sont formés soit de polymères de sels de bilirubine (calculs noirs), soit de bilirubinate de calcium (calculs bruns).

Les deux types de calculs biliaires peuvent contenir du calcium. Lorsque la proportion de calcium dépasse 4% du  poids, les calculs deviennent opaques aux rayons X et visibles à la radiographie sans préparation. La calcification est plus fréquente pour les calculs pigmentaires (> 50%) que pour les calculs cholestéroliques (< 20%).

 

B.        MECANISMES DE LA FORMATION DES CALCULS

1.         Calculs cholestéroliques

a. Composition lipidique de la bile


Figure 22

Représentation de la composition lipidique de la bile en coordonnées triangulaires.

Les concentrations de cholestérol, d’acides biliaires et de phospholipides sont exprimées en % de la somme des 3 composants (en mMoles). La composition d’un échantillon de bile est représentée par un point unique

 
 


Le constituant principal des calculs cholestéroliques est le monohydrate de cholestérol. Le cholestérol est pratiquement insoluble dans l’eau. Dans la bile, il est solubilisé principalement par la formation de micelles qui contiennent des acides biliaires et des phospholipides, ainsi que dans des vésicules de phospholipides.

 

Les micelles sont formés au départ par des agrégats polymoléculaires d’acides biliaires (micelles simples). Dans ces micelles, la partie hydrophobe de la molécule (soit le noyau stéroïdien) est orientée vers l’intérieur et les parties hydrophiles (hydroxyles ou carboxyles) sont orientées vers la périphérie, soit le milieu aqueux. L’addition de phospholipides, qui viennent s’intercaler entre les molécules d’acides biliaires, augmente la taille des micelles, et permet de solubiliser du cholestérol dans la partie centrale hydrophobe, formant ainsi un micelle mixte.

 

La quantité de cholestérol qui peut être solubilisée par un tel système est limitée et dépend des proportions (et de la composition) des acides biliaires et des phospholipides présents. Lorsque la proportion des trois constituants déborde un certain équilibre (appelé la zone micellaire et correspondant à un index de saturation < 1), la bile peut être sursaturée en cholestérol et le cholestérol excédentaire peut alors être solubilisé dans des vésicules phospholipidiques. A noter qu’il existe une zone métastable, dans laquelle l’index de saturation est > 1, mais qui n’entraîne cependant pas immédiatement la formation de vésicules.

 

 

 
Figure 23


 

 


Les vésicules sont des structures sphériques, d’environ 100 nm de diamètre, dont la surface est formée d’une bi-couche de phospholipides entourant un noyau de cholestérol. Ces vésicules se forment probablement à partir de la membrane canaliculaire des hépatocytes sous l’effet d’étergent des sels biliaires. Si la bile n’est pas saturée en cholestérol, le cholestérol et les phospholipides sont incorporés dans les micelles mixtes. Par contre, lorsque celle-ci est sursaturée en cholestérol, du cholestérol reste dans les vésicules qui tendent à s’agréger et à fusionner. La fusion des vésicules donne naissance à des structures multilamellaires, puis aux cristaux de cholestérol. L’apparition de cristaux à partir de la bile sursaturée s’appelle la nucléation, et représente la première étape dans la formation de la lithiase.

 

b. Stades de la formation des calculs

 

On distingue, dans la formation des calculs, un stade chimique, un stade physique, et un stade de croissance.

 

Le stade chimique est défini par la sécrétion, par le foie, d’une bile sursaturée en cholestérol. Le déséquilibre peut résulter, soit d’une augmentation de la sécrétion biliaire du cholestérol, soit d’une diminution de la sécrétion des acides biliaires, soit de l’association de ces deux facteurs. Ce déséquilibre sera aggravé lors de la concentration de la bile dans la vésicule.

 

Les facteurs stimulant la sécrétion de cholestérol dans la bile peuvent être génétiques, acquis, ou iatrogènes. Ces factgeurs peuvent augmenter l’apport de cholestérol au foie ou sa production hépatique (obésité et hyperlipoprotéinémies, perte de poids brutale, oestrogènes,…) ou diminuer sa conversion en acide biliaire ou en ester de cholestérol (progestérone, contraceptifs oraux, fibrates, âge).

 

La sécrétion d’acides biliaires est diminuée dans les maladies ou résections de l’iléon terminal, la cirrhose biliaire primitive et la cholostase chronique, ainsi que des pathologies congénitales perturbant leur production.

 

Le stade physique (ou nucléation ) est défini par la présence, dans la bile, de cristaux microscopiques de cholestérol. La précipitation des cristaux se fait à partir d’une bile sursaturée en cholestérol. La sursaturation est nécessaire, mais non suffisante à elle seule, pour la formation des cristaux : en effet, environ la moitié des sujets normaux, indemnes de lithiase, ont à jeun une bile sursaturée en cholestérol. La précipitation de cristaux de cholestérol à partir d’une bile sursaturée, implique, chez les malades lithiasiques, soit la présence d’un facteur de nucléation absent à l’état normal, soit l’absence d’un inhibiteur de la nucléation (ou agent anti-nucléant) présent à l’état normal. La nature de ce(s) facteur(s) n’est pas bien connue. Les facteurs incriminés pour stimuler la nucléation sont la mucine vésiculaire (qui stimule aussi l’augmentation de taille des particules) ainsi que des IgA et IgM, et des glycoprotéines. Les apolipoprotéines A-I et A-II, ainsi qu’une glycoprotéine, ont été identifiées comme agents inhibiteurs de la nucléation.

 

Le stade de croissance, amenant à la formation des calculs macroscopiques, et leur croissance, se fait par agglomération et additions successives de cristaux. Ce stade est favorisé par une diminution de la mobilité vésiculaire, qui est un facteur très important dans la formation des calculs.

 

c. Facteurs de risque des calculs cholestéroliques

 

Facteurs ethniques. La prévalence des calculs cholestéroliques est très élevée dans certains groupes ethniques (par exemple, les Indiens d’Amérique du Nord), et dans certains pays (pays scandinaves, Chili). Par ailleurs, on retrouve des familles de malades lithiasiques. Ces observations suggèrent qu’un (ou des) trouble(s) métabolique(s) qui est à l’origine de la lithiase choletérolique pourrait avoir une origine génétique.

 

Age et sexe. Les calculs biliaires sont rares avant l’âge de 10 ans. La prévalence et l’incidence atteignent un maximum vers 60 à 70 ans. A tous les âges, la prévalence est deux fois plus élevée chez la femme que chez l’homme. Cette différence, cependant, s’atténue après 70 ans. Entre 50 et 60 ans, la prévalence est d’environ 10% chez l’homme et 20% chez la femme. Cette différence est probablement liée à des facteurs hormonaux, qui influencent la captation hépatique de cholestérol ou sa conversion en esters. Les grossesses favorisent la formation des calculs.

 

Obésité. Chez les personnes dont le poids dépasse de 20% le poids idéal théorique, la prévalence de lithiase est multipliée par deux. L’apport abondant d’acides gras libres au foie stimule la production et la sécrétion de cholestérol. Lors d’un régime amaigrissant strict, on observe à partir des tissus adipeux une mobilisation importante d’acides gras et de cholestérol.

 

Régime alimentaire. La formation de calculs est favorisée par des régimes riches en acides gras polyinsaturés, qui stimulent la captation hépatique de cholestérol. L’effet d’un régime riche en cholestérol n’est pas démontré. A l’inverse, un régime riche en fibres végétales diminue légèrement la saturation biliaire en cholestérol.

 

Médicaments. Une augmentation de la prévalence de la lithiase a été observée avec certains hypocholestérolémiants (les fibrates), avec les oestrogènes, et avec la ciclosporine. Ces médicaments augmentent de façon rapide et transitoire la saturatin de la bile en cholestérol.

 

Maladies intestinales. La prévalence de la lithiase est multipliée par deux à trois au cours des maladies intestinales (notamment la maladie de Crohn), après résection chirurgicale de l’iléon terminal ou après court-circuit jéjuno-iléal pour obésité. Ces états entraînent une malabsorption intestinale des acides biliaires et une réduction de leur pool, qui aboutit à une diminution de leur sécrétion biliaire et à une sursaturation de la bile en cholestérol. Des calculs pigmentaires peuvent aussi se constituer.

 

Mucoviscidose. Cette affection entraîne une malabsorption des acides biliaires liée à l’insuffisance pancréatique, qui est corrigée par les extraits pancréatiques.

 

Autres associations. La prévalence de la lithiase est augmentée au cours de certaines hyperlipoprotéinémies.

 

2.         Calculs pigmentaires

 

Les calculs pigmentaires noirs sont formés principalement de polymères de sels de bilirubine non conjuguée. Ils sont de forme souvent irrégulière. La bilirubine non conjuguée est presque insoluble dans l’eau. Les calculs noirs se forment lorsque la sécrétion dans la bile de bilirubine non conjuguée augmente : c’est le cas, notamment, au cours des hyperhémolyses chroniques ou des cirrhoses.

 

Les calculs pigmentaires bruns sont constitués principalement de bilirubinate de calcium. Ils sont de couleur brune ou orangée. On estime que leur formation est liée à l’hydrolyse de la bilirubine conjuguée dans la bile sous l’effet de b-glucuronidases d’origine bactérienne. La bilirubine non conjuguée libérée par cette hydrolyse se complexe au calcium dans la bile. Ce mécanisme explique pourquoi les calculs de ce type sont principalement observés dans la voie biliaire principale, après une anastomose biliodigestive, ou au cours des maladies congénitales des voies biliaires : dans ces circonstances, il existe fréquemment une infection biliaire. Le bilirubinate de calcium est également le constituant principal de la lithiase intrahépatique fréquente en Extrême-Orient : celle-ci pourrait aussi être liée à une infection biliaire ou, parfois, à une parasitose des voies biliaires.

 

3.         Boue biliaire (ou « sludge »)

 

On désigne sous ce nom un agglomérat de particules de 50 à 100 µm englobées dans un gel de mucus, situé le plus souvent dans la vésicule biliaire, parfois dans des voies biliaires dilatées. Les particules sont des agrégats de cristaux de cholestérol, plus rarement des granules de pigments biliaires. La boue biliaire vésiculaire peut occasionnellement être observée chez des personnes normales à jeun. Plusieurs circonstances favorisent la formation de boue :

1)      la nutrition parentérale totale ;

2)      le jeûne postopératoire après chirurgie abdominale ;

3)      la grossesse.

 

La boue est aussi fréquemment observée chez les patients en réanimation et chez les malades atteints de SIDA.

 

La boue est souvent asymptomatique. Elle peut régresser spontanément après disparition de sa cause, mais peut aussi donner lieu à la formation de calculs.

 

Chez les patients sous nutrition parentérale, la formation de boue peut être prévenue par l’administration régulière de cholécystokinine ou, si cela est possible, par une nutrition entérale associée.

 

4.         Lithiase médicamenteuse

 

Des calculs biliaires peuvent exceptionnellement être formés par des précipités de médicaments excrétés dans la bile.

 

II.        MANIFESTATIONS CLINIQUES

1.         La lithiase vésiculaire simple

 

Des calculs sont présents dans une vésicule par ailleurs normale. Souvent muette (plus de 50% des malades porteurs de lithiase), elle peut provoquer des coliques biliaires.

 

La lithiase vésiculaire sera recherchée par échographie percutanée. Une cholécystographie orale sera pratiquée dans un deuxième temps dans les rares cas où l’on envisage un traitement non chirurgical de manière à déterminer le nombre, la taille des calculs et leur caractère radiotransparent ainsi que la perméabilité du canal cystique.

Chez certains malades, la taille des calculs ne dépasse pas 1 à 2 mm. Cette micro-lithiase se distingue de la lithiase commune par sa plus grande tendance à la migration vers le choledoque et donc à la pancréatite aiguë.

 

La lithiase vésiculaire de longue durée peut provoquer le développement de cancers vésiculaires. Cette éventualité est cependant peu fréquente (moins de 1%).

 

2.         La cholécystite chronique

 

La cholécystite chronique est une inflammation chronique de la vésicule biliaire, généralement secondaire à une lithiase. Elle consiste en une fibrose de la paroi accompagnée parfois d’adhérences avec les organes voisins et évoluant vers une vésicule scléro-atrophique (rétraction scléreuse totale de la vésicule, avec perte de la possibilité d’accumuler la bile).

 

La cholécystite chronique se manifeste surtout par des troubles digestifs variés et peu spécifiques. On relève des coliques biliares dans l'anamnèse.. Parfois des poussées inflammatoires aiguës sont surajoutées au tableau clinique de la cholécystite chronique. Ces poussées aiguës ne doivent pas être confondues avec la cholécystite aiguë. Le signe de Murphy n’est pas présent.

 

L’échographie est caractéristique. La cholécystographie orale ne visualise pas la vésicule dont le pouvoir de concentration est altéré.

 

3.         La cholécystite aiguë

 

La cholécystite aiguë se développe si trois facteurs sont réunis :

·        L’occlusion du canal cystique. Cette occlusion se fait par un calcul dans plus de 95% des cas ; dans les autres cas par un oedème local ou une réaction fibreuse.

·        La présence de bile dans la  vésicule biliaire.

·        L’altération de la vascularisation de la paroi vésiculaire (le blocage d’un calcul dans le canal cystique provoque un spasme ou une sténose de l’artère cystique).

 

Les sels biliaires contenus dans la vésicule biliaire érodent peu à peu la paroi qui s’oedématie. L’exsudation du plasma vers la lumière de la vésicule distend progressivement celle-ci. Cette irritation chimique de la vésicule remanie la paroi qui est congestionnée, cyanotique et épaissie. La vésicule est très distendue et contient un liquide d’aspect purulent. Au bout de 48 à 72 heures, l’infection s’installe : les germes présents normalement dans la bile vésiculaire s’y multiplient. Le phénomène infectieux est donc secondaire et tardif. La perforation de la vésicule enflammée se produit très rarement (moins de 5% des cas) en péritoine libre. En effet, après 72 heures, les adhérences entourant la vésicule sont très abondantes provoquant en cas de perforation la formation d’un gâteau péri-vésiculaire c’est-à-dire d’une péritonite cloisonnée, plutôt que d’une péritonite généralisée.

 

Les symptômes de la cholécystite aiguë sont caractéristiques chez plus de 75% des malades. Au début, ils se manifestent par des coliques biliaires ; cependant, contrairement à ce qui se passe dans la colique biliaire banale, les signes cliniques ne régressent pas spontanément et la douleur n’est pas calmée par l’administration d’antispasmodiques. Après quelques heures, apparaît un syndrome inflammatoire (fièvre, frissons, tachycardie et hyperleucocytose) traduisant la résorption de produits toxiques provenant de la lyse cellulaire. Un subictère l’accompagne parfois (± 25% des cas). L’examen physique révèle soit une vésicule distendue et douloureuse palpable sous le rebord costal (40% des malades), soit une masse mal délimitée douloureuse de l’hypocondre droit (gâteau périvésiculaire), soit encore une défense de l’hypocondre qui ne permet pas de palper la vésicule distendue ou le gâteau.

 

En cas de perforation en péritoine libre, des symptômes de péritonite généralisée apparaissent. Très rapidement, un état de choc s’installe. Il est dû à l’action irritante des sels biliaires sur le péritoine.

 

Le premier examen à demander, pour confirmer le diagnostic de cholécystite aiguë, est l’échographie percutanée. Les signes caractéristiques sont l’augmentation du volume vésiculaire et l’épaississement de la paroi. On notera également une douleur élective accompagnée d’une inhibition respiratoire lors du passage de la sonde échographique devant la vésicule (signe de Murphy échographique).

 

Une cholangiographie endoscopique est  pratiquée en cas d’ictère ou de cholostase et en cas de dilatation de la voie biliaire principale (> 10 mm), démontrée par l’échographie percutanée, pour  déceler la présence de calculs cholédociens (présents dans 50 à 80% des cas) et réaliser leur extraction endoscopique après sphinctérotomie biliaire.  En cas d’altération modérée des tests hépatiques (cytolyse modérée, discrète cholestase) et de dilatation modérée de la voie biliaire principale (8 à 10 mm) une échoendoscopie ou une cholangio-IRM permettra de démontrer la présence éventuelle de calculs choledociens (présents dans 20 à 40% de ces cas) et de réaliser le traitement endoscopique de la lithiase choledocienne si nécessaire.

Enfin lorsque les tests hépatiques sont normaux et le diamètre du cholédoque est £ 7 mm aucun examen d’imagerie complémentaire n’est recommandé, le risque de lithiase cholédocienne associée à la lithiase vésiculaire étant réduit à 2 ou 3%.

 

On observe de plus en plus souvent une forme particulière, et très grave, de cholécystite aiguë, la cholécystite acalculeuse. Sa pathogénie est mal connue. Elle se rencontre chez des malades hospitalisés pour des affections graves (traumatismes, chirurgie majeure, brûlés) et chez des vieillards porteurs de maladies vasculaires périphériques. Les empyèmes et les perforations précoces sont plus fréquents que dans la cholécystite aiguë banale (jusque 70% des cas).

 

4.         La lithiase cholédocienne

 

Une lithiase du cholédoque est présente chez 10 à 15% des patients porteurs d’une lithiase vésiculaire. La fréquence a tendance à augmenter avec l’âge. La lithiase cholédocienne primitive (en l’absence de lithiase vésiculaire) est exceptionnelle.

 

Le nombre de calculs et leur position dans le cholédoque est variable. Dans la forme la plus habituelle de la lithiase cholédocienne, de 1 à 5 calculs occupent le bas cholédoque. Plus rarement, il existe un « empierrement » du cholédoque (plusieurs dizaines de calculs).

 

La symptomatologie de la lithiase cholédocienne est très variable. Elle est totalement asymptomatique chez de nombreux malades. Elle peut provoquer des coliques biliaires. La manifestation la plus évocatrice est l’angiocholite (Triade de Villard).

 

Les examens complémentaires à pratiquer sont l’échographie prcutanée et la cholangiographie endoscopique. Des hémocultures seront demandées dès l’admission.

 

5.         L’iléus biliaire

 

Un volumineux calcul vésiculaire peut irriter progressivement la paroi vésiculaire. Celle-ci s’accole à celle du duodénum. Au bout d’un certain temps se produit une fistule cholécysto-duodénale et le calcul, après passage et migration dans l’intestin grêle, est responsable d’une obstruction de l’iléon terminal.

 

La symptomatologie dominante est celle de l’occlusion grêle mécanique (cf. abdomens aigus).

 

Le diagnostic repose dans la grande majorité des cas sur l’examen d’une radiographie de l’abdomen à blanc qui montre :

1)      des signes d’occlusion limités à l’intestin grêle (niveaux grêles) ;

2)      de l’air dans les voies bilaires (aérobilie) ;

3)      parfois le calcul est visible dans une fosse iliaique.

 

6.         La pancréatite aiguë

 

La lithiase biliaire est la cause la plus fréquente de pancréatite aiguë.

 

7.         L’hydrops vésiculaire

 

Lorsque le canal cystique est obstrué par un calcul et que la vascularisation de la paroi n’est pas altérée, se produit un hydrops. La vésicule biliaire se remplit progressivement d’un liquide clair formé de mucus et de plasma (bile blanche). L’hydrops évolue petit à petit vers une vésicule scléro-atrophique.

L'hydrops touche souvent des patients en réanimation, des patients en dénutrition grave ou les prématurés en nutrition parentérale.

 

Les symptômes sont analogues à ceux de la cholécystite chronique mais une vésicule distendue est palpable et ceci en l’absence d’ictère ou de signes inflammatoires. Le diagnostic sera confirmé par échographie.

 

8.         La lithiase intrahépatique

 

La lithiase intrahépatique est définie par la présence de calculs dans les voies biliaires intrahépatiques, en amont de la convergence des canaux hépatiques.

 

Ces calculs sont très rares dans les pays occidentaux (1 à 2% des lithiases biliaires). En Extrême-Orient, ils peuvent représenter 30 à 50% de la pathologie biliaire lithiasique.

 

Ils sont le plus souvent dus à des anomalies congénitales des voies biliaires favorisant la stase biliaire (comme le syndrome de Caroli qui se caractérise par une dilatation multifocale des canaux biliaires intrahépatiques segmentaires). Certains proviennent d’une migration à partir du cholédoque.

 

Les manifestations cliniques les plus fréquentes sont les douleurs et l’angiocholite. Des abcès hépatiques peuvent se former.

 

Le diagnostic sera  confirmé par échographie percutanée, tomodensitométrie et cholangio-IRM.

 

9.         Le syndrome de MIRIZZI

 

Le syndrome de Mirizzi est une affection rare (1% des cholécystectomies) dues à l’enclavement d’un calcul dans le canal cystique ou l’infundibulum vésiculaire eet au développement d’une sténose du canal hépatique commun par réaction inflammatoire péri-canalaire. Il provoque une dilatation canalaire d’amont et peut entraîner le développement de fistules bilio-biliaires.

Les manifestations cliniques habituelles sont l’angiocholite, la cholécystite aiguë ou l’ictère par rétention de type néoplasique.

Une cholangio-IRM ou cholangiographie endoscopique pré-opératoire est indispensable pour faire le diagnostic.

 

III.      TRAITEMENT

1.         La lithiase vésiculaire asymptomatique

 

On admet généralement que la lithiase vésiculaire asymptomatique ne doit pas être traitée. Il existe quelques exceptions: une chirurgie hépatique concommitante, la présence de lithiases vésiculaires avant une gastroplastie ou une chirurgie anti-reflux, et certains cas de chimiothérapie ou d'immunosuppression grave.

 

2.         La lithiase vésiculaire symptomatique

a. La cholécystectomie

 

Une cholécystectomie est indiquée dans la majorité des cas sans urgence pour autant que la relation formelle soit faite entre la symptomatologie et la lithiase biliaire et qu’il n’existe pas de risque mortel évalué par l'anesthésiste. Plus de 95% des cholécystectomies sont actuellement réalisées par coelioscopie. La mortalité opératoire est de ± 0,2 %.

 

La mise au point pré-opératoire doit comporter une échographie des voies biliaires et une enzymologie hépato-pancréatique complète.

Si l'anamnèse révèle un épisode d'ictère ou si la migration lithiasique est évoquée par la biologie voire l'échographie, une cholangiographie rétrograde par voie endoscopique est impérieuse. Elle sera thérapeutique par sphinctérotomie et extraction de la lithiase cholédocienne.

Le premier geste thérapeutique endoscopique est une sphinctérotomie endoscopique biliaire. Un cathéter muni d’un fil métallique (le sphinctérotome est introduit dans la voie biliaire via le canal opératoire d’un duodénoscope. Une section de la papille, du sphincter commun et d’une portion du sphincter propre du cholédoque est effectuée au moyen d’un courant diathermique passant dans le fil métallique. Les petits calculs s’évacuent spontanément. Les plus gros peuvent être extraits au moyen d’un cathéter à ballonnnet ou d’un cathéter muni d’un panier (anse de Dormia). Dans certains cas, des procédés auxiliaires doivent être utilisés pour les très gros calculs. Les complications de la sphinctérotomie endoscopique (hémorragies, perforations, pancréatites) sont rares et la mortalité de la technique est < à 0,7%.

 


Figure 24


 

 


Si la voie biliaire principale est présumée libre, deux attitudes coexistent:

 

1.      Un examen cholangiographique par IRM, biliscan ou par voie I.V. est réalisé en pré-opératoire. L'examen procure une cartographie de l'arbre biliaire, inbiquant les variations anatomiques nombreuses ou une anomalie congénitale. L'abord coelioscopique notament par des chirurgiens peu expérimentés en chirurgie biliaire ouverte a agravé l'incidence des plaies biliaires iatrogènes.

 

2.      Le chirurgien peut aborder la dissection de la voie biliaire accessoire, sûr de son expertise. S'il veut éviter tout incident inérant à une anomalie anatomique, il cannule le canal cystique avant de ligaturer et fait une cholangio per-opératoire.

 

La sphinctérotomie endoscopique biliaire peut aussi être réalisée après la cholecystectomie (dès le lendemain) si les calculs cholédociens sont découverts en peropératoire.

 

b. L’acide chénodéoxycholique et l’acide ursodéoxycholique

 

Ces deux acides biliaires agissent en augmentant le pool des sels biliaires et en diminuant la sécrétion du cholestérol dans la bile. Leur administration orale quotidienne entraîne, en 12 à 24 mois, une disparition des calculs chez 30% des malades traités. Leurs effets secondaires sont de la diarrhée (qui peut faire arrêter le traitement) et une augmentation transitoire des transaminases. Ces effets secondaires sont moins marqués pour l’acide ursodéoxycholique. L’utilisation de l’acide chénodéoxycholique est déconseillée chez la femme enceinte. Une récidive des calculs est observée chez ± 50% des malades le plus souvent endéans les deux ans qui suivent leur dissolution. L'impact de ce traitement est controversé par les chirurgiens.

 

Les indications de ce traitement sont très strictes :

·        Les calculs doivent être cholestéroliques et donc radiotransparents et leur taille < à 10 mm, le volume lithiasique doit être < 30% du volume vésiculaire.

·        La vésicule doit être fonctionnelle (non exclue) à la cholecystographie orale.

·        Les malades doivent être peu symptomatiques (la dissolution est trop lente en cas de crises fréquentes).

·        Les sujets seront âgés ou à risque opératoire très élevé, non obèses et compliants.

 

c. La lithotritie extra-corporelle

 

Le principe de la lithotritie extra-corporelle est de concentrer une certaine énergie au niveau du calcul pour le fragmenter. Ce résultat est obtenu au moyen d’ondes de choc administrées par voie percutanée et concentrées topographiquement sur le calcul à détruire. Le repérage des calculs et le centrage de tir se font par échographie.

La méthode n’est indiqué que chez des patients symptomatiques présentant 1 à 3 calculs radio-transparents dont la taille est comprise entre 1 et 3 cm. La vésicule doit être fonctionnelle.

La lithotritie doit être associée à un traitement par l’aicde ursodéoxycholique visant à dissoudre les fragments lithiasiques obtenus. Ce type de traitement a tendance à disparaître à l’ère de la cholécystectomie coelioscopique principalement en raison de son efficacité limitée et au nombre important de récidives.

 

3.         La cholécystite aiguë

 

La cholécystite aiguë constitue une indication opératoire quasi absolue. Une cholécystectomie doit être réalisée dans les 24 à 48 heures qui suivent le diagnostic. A l’exception des très rares perforations en péritoine libre, la cholécystectomie ne doit pas être réalisée en extrême urgence.

 

Chez les patients à très-haut risque (décompensation cardiaque, insuffisance respiratoire grave, etc.), la survenue d'une perforation ou d'un choc septique est pratiquement léthale. Une cholécystectomie laparotomique est souvent réalisée plus rapidement sous couverture antibiothérapique.

 

4.         La lithiase cholédocienne

 

La lithiase cholédocienne symptomatique ou non symptomatique doit être traitée.

 

Le traitement de la lithiase cholédocienne sans angiocholite a été envisagé antérieurement.

Les malades présentant une angiocholite seront hospitalisés. Une antibiothérapie adéquate sera instaurée dès l’admission. Le traitement de la lithiase cholédocienne accompagnée d’angiocholite est la sphinctérotomie endoscopique. Celle-ci sera réalisée sans délai. Dans certains cas, un cathéter sera placé dans le cholédoque au moyen du duodénoscope (cathéter naso biliaire). Ce cathéter améliore le drainage de la bile et permet la réalisation des contrôles radiographiques. Dans un temps ultérieur, après disparition des symptômes, on réalise une cholécyhstectomie sauf s’il existe un risque opératoire (moins de 10% des vésicules lithiasiques non réséquées provoquent des cholécystites aiguës).

 

Les lithiases cholédociennes récidivantes ou résiduelles après cholécystectomie seront également traitées par sphinctérotomie endoscopique.

 

5.         L’iléus biliaire

 

L’iléus biliaire représente une indication opératoire formelle. Le calcul présent dans l’intestin sera enlevé par une entérotomie. La cholécystectomie est réalisée d'emblée, les patients étant souvent très âgés.


CHAPITRE III : LES TUMEURS DES VOIES BILIAIRES

 

 

Les tumeurs des voies biliaires sont rares. Elles représentent moins de 1% de la pathologie biliaire.

 

I.         TUMEURS BENIGNES

 

Des polypes peuvent se développer dans la vésicule. Ce sont soit des papillomes soit des adénomes. Ils sont, en général, découverts à l’échographie ou à la radiographie chez des patients dyspeptiques (image lacunaire non mobile intravésiculaire). Une cholécystectomie n’est indiquée qu’en présence de polypes multiples ou si la lésion augmente de taille.

 

II.        TUMEURS MALIGNES

A.        ANATOMOPATHOLOGIE, MANIFESTATIONS CLINIQUES ET DIAGNOSTIC

1.         Vésicule biliaire

 

Environ 80% des tumeurs vésiculaires sont des adénocarcinomes, tandis que les 20% restants sont des carcinomes à cellules indifférenciées ou squameuses. Dans plus de 85% des cas, le cancer est associé à une lithiase vésiculaire mais la fréquence de développement d’une tumeur maligne en cas de lithiase atteint à peine 1%. L’envahissement hépatique est précoce et le pronostic est donc défavorable.

 

Les symptômes sont très tardifs. Les malades se plaignent soit de dyspepsie soit de douleurs de l’hypocondre droit. Un ictère apparaît en cas d’envahissement du pédicule hépatique (50% des cas). Une hépatomégalie et la présence d’une masse hépatique sont observées tardivement. Des tumeurs de petite taille sont quelquefois découvertes lors de l’examen anatomopathologique d’une vésicule réséquée pour pathologie lithiasique.

 

Le diagnostic sera confirmé par l’échographie percutanée, la cholangio-IRM, la cholangiographie endoscopique et/ou percutanée (frottis cytologique de la sténose biliaire associée) et la tomodensitométrie.

 

2.         Voie biliaire principale

 

Les cancers de la voie biliaire principale sont généralement des adénocarcinomes. Les cancers du hile sont les plus fréquents (tumeurs de Klatskin).

 

Le premier symptôme est en général l’apparition d’un ictère par obstruction, éventuellement accompagné d’un signe de Courvoisier-Terrier (si obstacle sous-cystique).

 

Le diagnostic sera confirmé par échographie percutanée, tomodensitométrie, cholangio-RIM et cholangiographie endoscopique ou cholangiographie trans-pariétale (frottis cytologique).

 

3.         Carcinome de l’ampoule de Vater

 

Le cancer de l’ampoule de Vater (ampullome) métastase moins rapidement que les autres cancers des voies biliaires. Son pronostic est donc nettement meilleur. L’ampullome provoque rapidement l’apparition d’un ictère par obstruction. La tumeur se développant dans la lumière duodénale et se nécrosant souvent par places, l’ictère est parfois fluctuant au début de l’évolution de la maladie. Une angiocholite peut apparaître. On relève fréquemment la présence d’une anémie hypochrome et de sang occulte dans les selles. L’examen complémentaire le plus indiqué est la duodénoscopie complétée par une cholangiographie endoscopique et le prélèvement de biopsies éventuellement après sphinctérotomie. L’image caractéristique à la cholangiographie endoscopique est la double dilatation du cholédoque et du Wirsung. Le bilan d’extension locorégionale se fera par tomodensitométrie et échoendoscopie.

 

B.        TRAITEMENT

1.         A visée curative

 

La cholécystectomie, éventuellement associée à une hépatectomie partielle est rarement indiquée en cas de tumeur maligne de la vésicule car elle n’est réalisable que chez ± 10% des malades avec une survie à 5 ans de moins de 5%.

 

Le traitement chirurgical des cancers de la voie biliaire principale haut situés comporte une résection de la voie biliaire, éventuellement accompagnée d’une hépatectomie partielle et complétée par une anastomose hépatico jéjunale sur anse en Y. Il n’est réalisable que chez 30% des malades avec une survie à 5 ans de moins de 25%.

 

Dans le cas de l’ampullome, ou des cancers du 1/3 inférieur du cholédoque, une résection large emportant l’antre, le duodénum et la tête du pancréas sera pratiquée (duodéno-pancréatectomie céphalique ou opération de Whipple : cf. pathologie du pancréas). La survie à 5 ans après une telle intervention atteint ou même dépasse 50%.

 

Les traitements adjuvants sont peu ou pas efficaces.

 

2.         A visée palliative

 

Le traitement palliatif généralement adopté est la pose d’une prothèse biliaire par voie endoscopique et/ou percutanée. Les prothèses biliaires sont des tubes en plastique ou en métal placés au travers de la tumeur. Elles assurent l’écoulement de la bile et font disparaître l’ictère.


 

HUITIEME PARTIE :

LE PANCREAS

 

 

 

Avec la collaboration de B. GULBIS et M. DELHAYE


CHAPITRE I : GENERALITES

I.         MANIFESTATIONS CLINIQUES

1.         La douleur pancréatique

 

La douleur est souvent le premier symptôme des affections pancréatiques. Dans les cas typiques, elle a un siège sus-ombilical à irradiation transverse et surtout transfixiante. Elle est calmée par des attitudes antalgiques caractéristiques : antéflexion, position en chien de fusil, compression de la région sus-ombilicale. Elle est aggravée par les repas.

 

2.         L’ictère

 

Il est de type cholostatique. Une vésicule distendue peut être palpable (signe de Courvoisier Terrier).

 

3.         La sténose duodénale

 

La compression du deuxième duodénum ou son envahissement par une tumeur peut provoquer une sténose duodénale partielle ou totale.

 

4.         La stéatorrhée et le diabète

 

Ces symptômes n’apparaissent que tardivement lorsqu’une partie importante de la glande est détruite.

 

II.        METHODES D’EXPLORATION

A.        ETUDE ANATOMIQUE

 

Les méthodes utilisées sont similaires à celles utilisées pour l’étude des voies biliaires : abdomen à blanc, échographie percutanée, tomodensitométrie, cholangiopancréatographie par résonance magnétique nucléaire (CPRM), cholangiopancréatographie endoscopique (CPE), échoendoscopie.

 

B.        ETUDE BIOLOGIQUE

1.         Enzymes sériques

 

L’hyperamylasémie et l’hyperlipasémie sont des signes biologiques essentiels pour confirmer le diagnostic clinique de pancréatite aiguë mais non totalement spécifiques.

 

a. Amylase

 

Les amylases sont un groupe d’enzymes qui hydrolysent des hydrates de carbone complexes (amylose, amylopectine, …). Les plus fortes concentrations d’amylase sont retrouvées dans le pancréas et les glandes salivaires et ce sont ces fractions que l’on retrouve dans le sérum sous forme d’isoenzyme pancréatique ou salivaire. L’amylase est une petite molécule (55.000 à 60.000 Da) qui est filtrée par les glomérules rénaux et se retrouve dans l’urine.

 

Lors d’une crise de pancréatite aiguë (PA), le taux d’amylase total augmente endéans les 8 h, atteint un maximum vers 12 à 48 h, et retourne aux valeurs basales endéans 3 à 5 jours.

 

En dehors d’une poussée de PA, une augmentation persistante du taux d’amylase sérique, sans élévation concomitante de la lipase doit faire suspecter une macroamylasémie ; en effet, les complexes amylase-IgA ou –IgG ne sont pas filtrés par le glomérule rénal et s’accumulent dans le sérum en pouvant atteindre des valeurs de 6 à 8 fois supérieures aux valeurs de référence. Cette macroamylasémie n’a pas de signification pathologique.

 

L’élévation de l’amylasémie n’est pas totalement spécifique d’une PA car certains syndromes abdominaux (ulcère perforé, obstruction digestive, …) ou d’autres affections (insuffisance rénale, grossesse extra-utérine, …) provoquent également une augmentation du taux d’amylase sérique.

 

b. Lipase

 

La lipase hydrolyse les acides gras à longue chaîne au niveau des esters de glycérol. Cette enzyme est synthétisée et sécrétée essentiellement par le tissu pancréatique et constitue la majeure partie de la lipase sérique. La lipase est une petite molécule (48.000 Da), qui n’est pas retrouvée dans les urines, mais dont le taux sérique peut s’élever légèrement en cas d’insuffisance rénale.

 

Au cours d’une crise de pancréatite aiguë le taux sérique de lipase croît endéans les 2 à 12 h (de 2 à 50 x) et peut persister jusqu’à 14 jours après le but de la symptomatologie clinique. Si la sensibilité de la lipasémie est superposable à celle de l’amylase sérique dans cette affection, sa spécificité est plus grande, son élévation plus ample, parfois plus précoce et surtout plus persistante. Le dosage de la lipasémie est donc un excellent test complémentaire au dosage de l’amylase sérique.

 

2.         Exploration fonctionnelle

a. Tubage duodénal ou pancréatique sélectif

 

On peut recueillir, après stimulation par injection IV de sécrétine et/ou de cholécystokinine, le liquide pancréatique sécrété au niveau du duodénum, ou mieux encore le liquide pancréatique pur récolté via un cathéter introduit dans le canal de Wirsung. Les mesures du volume récolté, des concentrations de bicarbonates et éventuellement d’enzymes après stimulation hormonale permettent le calcul de débits bicarbonatés et d’enzymes. Ces paramètres permettent d’évaluer le stade de l’insuffisance pancréatique exocrine. Ces techniques sont néanmoins très lourdes, invasives et ne sont réalisées que dans des centres spécialisés.

 

b. CPRM après injection IV de secrétine

 

Après injection IV de secrétine, il est possible de visualiser par résonance magnétique le remplissage duodénal suite à la sécrétion pancréatique stimulée et la dilatation transitoire du canal pancréatique principal. Ces investigations sont en cours d’évaluation mais permettront peut-être dans un avenir proche d’estimer la fonction pancréatique exocrine par une technique non invasive.


CHAPITRE II : LES PANCREATITES

 

 

Les pancréatites aiguës (PA) sont caractérisées par des lésions oedémateuses, éventuellement accompagnées de nécroses et d’hémorragies, régressant lorsque la cause déclenchante (lithiase biliaire par exemple) est supprimée. Les pancréatites chroniques (PC) comprotent des lésions inflammatoires chroniques avec destruction du parenchyme pancréatique et fibrose. D’une manière générale, ces lésions s’aggravent progressivement même si la cause est supprimée.

 

I.         LES PANCREATITES AIGUES

A.        ANATOMOPATHOLOGIE

 

Schématiquement, on distingue deux types de pancréatites aiguës :

 

1.         Les PA oedémateuses

 

Elles se caractérisent par une congestion et un oedème du pancréas. L’organe est luisant, tuméfié, turgescent.

 

2.         Les PA nécrotico-hémorragiques

 

Ce sont des formes graves.

 

La glande est tuméfiée, parsemée de taches hémorragiques plus ou moins nombreuses allant jusqu’à la destruction quasi totale du pancréas par un véritable hématome. Les lésions vont, après quelques heures, s’étendre à tout ou partie du péritoine, la stéatonécrose y formant des taches blanches (taches de bougie). Très précocement, il existe une fuite plasmatique dans les tissus péri-pancréatiques et rétro-péritonéaux.

 

b.        ETIOLOGIE

 

Les deux causes principales de pancréatite aiguë sont la lithiase biliaire et l’alcoolisme. La fréquence de ces deux étiologies dépend des populations considérées. L’alcoll est impliqué chez 15% des malades à Hong Kong, chez ± 40% des malades en France et jusqu’à plus de 65% aux USA.

 

1.         Lithiase biliaire

 

On admet qu’une pancréatite biliaire est la conséquence de la migration d’un calcul vésiculaire à travers le canal cystique, le cholédoque et la papille de Vater. Le passage transpapillaire d’un calcul ou sa persistance lorsqu’il est enclavé, déclencherait l’inflammation d’un pancréas antérieurement sain. Les crises peuvent se répéter si l’on ne traite pas la lithiase vésiculaire, mais la maladie n’évolue pas vers une pancréatite chronique sauf en cas d’alcoolisme associé.

 

2.         Alcoolisme chronique

 

La pancréatite aiguë alcoolique est déclenchée par des abus d’alcool. Généralement, la ou les poussées de PA alcooliques surviennent au début de l’évolution d’une pancréatite chronique alcoolique.

 

3.         Causes rares

 

Les autres causes de pancréatites se rencontrent dans moins de 10% des cas. Elles figurent dans le tableau I.

 

 

TABLEAU I : ETIOLOGIE DES PANCREATITES AIGUES

CAUSES FREQUENTES

Lithiase biliaire

Alcoolisme chronique

 

CAUSES RARES

Pancréatites post-opératoires ou post-traumatiques

Interventions biliaires, gastriques ou pancréatiques

Transplantation rénale

Post-endoscopiques après pancréatographie ou sphincterotomie

Tumeurs pancréatiques

 

Causes infectieuses ou parasitaires

Oreillons

Leptospirose

Ascaridiose

Facteurs endocriniens ou métaboliques

Hyperparathyroïdie

Hyperlipémie

Causes médicamenreuses

Corticothérapie

Chlorothiazide, Isothiazide

Immunodépresseurs

Contraceptifs oraux

Pancréatites aiguës idiopathiques

 

C.        PHYSIO-PATHOLOGIE

 

La PA est une auto-digestion enzymatique du pancréas, initiée par l’activation du trypsinogène en trypsine au niveau de la cellule pancréatique acinaire.

 

Le passage ou le blocage d’un calcul dans la papille peut provoquer une brusque augmentation de la pression dans les canaux pancréatiques. Une hyperstimulation pancréatique et d’autres facteurs initiateurs mal connus peuvent entraîner une activation du trypsinogène en trypsine. La trypsine va activer en cascade les proenzymes digestifs présents dans les granules zymogènes des cellules acinaires et par là va conduire à  la destruction des cellules acinaires. Une réponse inflammatoire avec production de cytokines proinflamma-toires (Interleukine 1 et Tumor Necrosis Factor) au niveau du tissu pancréatique d’abord puis au niveau d’autres organes (poumon, foie, rein) survient très précocement (pic de concentration à la 24ème heure par rapport au début des douleurs) et sera responsable des manifestations systémiques sévères survenant 1 à 4 jours plus tard.

 

D.        MANIFESTATIONS CLINIQUES

 

La clinique est dominée par une douleur abdominale aiguë, très intense et angoissante qui débute en général dans la région épigastrique et l’hypocondre gauche et qui diffuse rapidement en irradiant dans le dos de manière transfixiante. La douleur persiste plusieurs heures. Elle est parfois soulagée en position genu-pectorale. Les nausées et vomissements sont fréquents.

 

Dans les formes graves, on peut noter un retentissement hémodynamique (tachycardie, hypotension), pulmonaire (polypnée) et de la température.

 

L’examen de l’abdomen montre le plus souvent un météorisme, une distension abdominale et une tension de la paroi abdominale sans réelle contracture. La matité hépatique est conservée. L’ascite est rare. Un iléus paralytique peut être associé. Il existe souvent un contraste entre l’intensité de la douleur et un examen physique pauvre.

 

Il existe des formes suraiguës dominées par le développement rapide d’un état de choc et des formes atténuées qui se traduisent uniquement par une douleur transitoire mais qui peuvent secondairement évoluer vers une forme grave.

 

Dans plus de la moitié des cas les symptômes sont moins caractéristiques et peuvent ressembler aux affections suivantes :

·        Une cholécystite aiguë

·        Un infarctus mésentèrique

·        Une occlusion intestinale

·        Un infarctus myocardique inférieur

·        Une rutpure d’un anévrysme de l’aorte abdominale

·        Une détresse respiratoire

·        Une oligo-anurie.

 

E.        COMPLICATIONS

 

Dans 15 à 30% des cas, la pancréatite aiguë s’accompagne de nécrose du parenchyme pancréatique. Cette nécrose peut se surinfecter et évoluer vers un abcès ou phlegmon qui se constitue en général à partir du 8ème-10ème jour après le début de l’épisode aigu. Les manifestations cliniques comportent de la fièvre, de la tachycardie, des vomissements et une douleur d’intensité variable. Les abcès pancréatiques peuvent fistuliser vers le péritoine, vers un organe creux du tube digestif (estomac, côlon par exemple) ou vers un vaisseau sanguin provoquant ainsi une hémorragie intra-abdominale. Des hémorragies digestives peuvent survenir. Elles s’expliquent par la présence d’ulcérations digestives uniques ou multiples, par des troubles de la coagulation et, mais plus rarement, par le développement d’une hypertension portale.

 

La nécrose pancréatique peut s’organiser sous la forme d’un pseudo-kyste. Le pseudo-kyste est secondaire à une rupture partielle ou totale du canal pancréatique provoquant un passage extra-canalaire de liquide pancréatique. Ce liquide s’accumule dans un « kyste » intra ou extrapancréatique dépourvu de paroi épithéliale, entouré d’un tissu de granulation et d’une paroi fibreuse. Ces kystes se développent entre 1 et 6 semaines et sont plus fréquents (30%) dans les PA alcooliques que dans les PA biliaires (5%). Les manifestations cliniques comportent par ordre de fréquence : la reprise des douleurs, des nausées avec vomissements, le développement d’une masse palpable (50% des cas), plus rarement un ictère, une ascite ou un épanchement pleural. Dans environ 50% des cas, les pseudo-kystes qui apparaissent après une pancréatite aiguë, régressent spontanément endéans les 6 semaines de l’épisode aigu.

 

Des complications à distance peuvent également survenir parmi lesquelles :

·        Une insuffisance rénale aiguë

·        Des épanchements pleuraux séro-sanglants en amylase

·        Un syndrome de détresse respiratoire

·        Des complications cardiaques

·        Des troubles neuro-psychiques (encéphalopathie pancréatique)

·        Des stéatonécroses systémiques notamment cutanées.

 

F.        DIAGNOSTIC

1.         Biologie

 

L’hyperamylasémie et l’hyperlipasémie sont des signes essentiels mais non totalement spécifiques.

 

Une hyperglycémie transitoire est classiquement observée.

Le dosage de la calcémie a un intérêt dans l’établissement du pronostic.

 

L’hyperleucocytose et des troubles hydro-électrolytiques sont très fréquents mais peu spécifiques.

 

L’étiologie biliaire sera suspectée en cas d’élévation des transaminases (AST < ALT), associée éventuellement à une cholostase (­ des phosphatases alcalines, de la gamma GT et de la bilirubine).

 

L’étiologie alcoolique sera supectée en cas d’élévation du volume corpusculaire moyen et de la gamma GT.

 

Une élévation de la CRP > à 15 mg/100 ml est un argument en faveur d’une PA nécrosante.

 

2.         Imagerie

 

La radiographie de l’abdomen à blanc peut montrer un iléus localisé (anse sentinelle dans l’hypochondre gauche) ou généralisé. On recherchera également la présence de calcifications pancréatiques.

 

L’échographie percutanée montre une augmentation de volume de la glande pancréatique dont l’échostructure est globalement hypoéchogène. Elle permet de dépister une lithiase vésiculaire et une éventuelle dilatation de la voie biliaire principale (VBP) qui signeraient l’étiologie biliaire de la pancréatite aiguë. Lorsqu’il existe un iléus réflexe associé, la visualisation du pancréas peut être très difficile.

 

La tomodensitométrie avec injection IV de produit de contraste est l’examen de choix tant pour le diagnostic de la pancréatite aiguë que pour préciser sa gravité. Elle peut montrer un pancréas normal ou un pancréas augmenté de volume dans les formes d’évolution bénigne. Les formes de gravité intermédiaire sont caractérisées par l’existence d’une infiltration inflammatoire de la graisse péripancréatique. Les formes les plus graves s’accompagnent de collections dans un seul étage abdominal ou dans plus d’un étage ou contenant de l’air.

 

 

TABLEAU II : CLASSIFICATION DES PANCREATITES AIGUES SUR BASE DE LA TOMODENSITOMETRIE SELON BALTHAZARD

Grade A Pancréas d’aspect normal

Grade B Pancréas augmenté de volume

Grade C Infiltration de la graisse péripancréatique

Grade D Présence de collection(s) limitée(s) à un seul étage abdominal et ne contenant pas d’air

Grade E Présence de collection(s) s’étendant à plusieurs étages de l’abdomen ou contenant de l’air

 

 

La sévérité de la PA dépend également de la nécrose du parenchyme pancréatique qui peut être quantifiée par la tomodensitométrie (absence de nécrose, < 30%, 30-50%, > 50%).

 

La cholangiopancréatographie endoscopique (CPE) est indiquée lorsqu’une étiologie biliaire est suspectée (perturbations des enzymes de cholestase et/ou des transaminases et/ou signes échographiques suggestifs de lithiase biliaire). Elle permet de réaliser immédiatement une spincterotomie biliaire visant à lever l’obstacle lithiasique présent au niveau de la VBP.

 

L’indication de la CPE en cas de pancréatite aiguë éthylique est plus discutée : elle permet de démontrer et éventuellement de traiter les anomalies canalaires en cas de pancréatite chronique (voir plus loin) et d’éliminer par l’injection du produit de contraste dans le canal de Wirsung les précipités protéiques qui peuvent jouer un rôle dans les poussées de pancréatite aiguë éthylique.

 

G.        PRONOSTIC

 

Les pancréatites oedémateuses ont un bon pronostic spsontané (mortalité < 2%) tandis que pour les atteintes nécrosantes la mortalité peut atteindre 80%.

 

L’évaluation pronostique de la pancréatite aiguë fait appel à des critères généraux qui mesurent le retentissement général de cette maladie. L’indice de Ranson est le plus utilisé. Il associe 5 paramètres mesurés à l’admission et 6 à la 48ème heure (Tableau III). L’inconvénient est qu’il faut attendre 48 heures pour préciser la sévérité de la PA.

 

TABLEAU III : CRITERES DE RANSON

A l’admission

A la 48ème heure

Age > 55 ans

Leucocytes/mm³ > 16.000

Glycémie > 200 mg%

LDH > 350 UI/L

SGOT > 250 UI/L

Hématocrite diminué de 10%

Urée augmentée de 5 mg %

Calcémie < 8 mg%

PaO2 < 60 mm Hg

Déficit de base > 4 mEq/l

Séquestration liquidienne > 6 l

 

 

La pancréatite aiguë est jugée sévère si trois critères ou plus sont présents. La mortalité peut atteindre 100% lorsque le nombre de critères présents dépasse 7.

 

Les critères de Ranson sont surtout valables pour les pancréatites alcooliques. Le pronostic basé sur ces critères est correct chez plus de 90% des malades dont l’évolution a été prédite bénigne, mais la valeur prédictive n’est exacte que chez moins de 50% des malades dont la pancréatite a été jugée sévère.

 

Des critères modifiés ont été présentés par Ranson pour les PA non alcooliques. D’autres scores (critères de Glasgow, Apache II System) sont utilisés pour prédire aussi précocément que possible la gravité d’une PA.

 

L’obésité est un facteur de mauvais pronostic car la graisse péri-pancréatique est particulièrement sensible à la nécrose induite par les enzymes activés.

 

Un Body Mass Index > 30 kg/m² (BMI = poids en kg : (taille en m)² est associée à un risque plus important de complications pulmonaires et de mortalité en cas de PA.

 

H.        TRAITEMENT

 

Le traitement initial de la pancréatite aiguë est médical et nécessite dans tous les cas l’hospitalisation du patient.

 

La pancréatite aiguë oedémateuse sans retentissement clinique important ne nécessite aucun traitement particulier en dehors de l’administration de médicaments antalgiques (pethidine), de perfusions IV et la mise au repos du pancréas en laissant le patient à jeun. Une aspiration gastrique ne sera placée que s’il existe un iléus symptomatique (c’est-à-dire avec vomissements). Après quelques jours, le patient peut être réalimenté progressivement.

 

Le traitement de la pancréatite aiguë grave se fait en général dans un service de réanimation où l’on tentera de corriger l’hypovolémie (secondaire à l’exsudation massive de liquides dans la loge pancréatique et dans les espaces péripancréatiques), l’insuffisance respiratoire et la dénutrition (par une alimentation parentérale). Actuellement, en cas de pancréatite aiguë nécrosante (CRP > 15 mg/100 ml, nécrose à la tomodensitométrie), il est préconisé d’administrer une antibiothérapie prophylactique (cefuroxime 3 x 1,5 g IV/24 h ou ciproxine 2 x 400 mg IV/24 h) car la principale cause de décès en cas de PA sévère est l’infection de la nécrose.

 

En cas de détérioration clinique et d’évolution défavorable une ponction percutanée des collections est réalisée et en cas d’infection confirmée par la culture un drainage percutané et/ou endoscopique et/ou chirurgical des collections péripancréatiques est alors indiqué. La chirurgie permet de reséquer les tissus nécrosés et de drainer largement toutes les collections lorsque celles-ci sont inaccessibles par voie percutanée ou endoscopique.

 

Si l’étiologie de la pancréatite aiguë est biliaire, une sphinctérotomie endoscopique biliaire réalisée en urgence permet d’évacuer le(s) calcul(s) cholédocien(s) éventuellement impactés en amont de la papille de Vater, et de prévenir une récidive précoce de migration lithiasique qui pourrait aggraver le pronostic et la sévérité de la pancréatite aiguë. Une cholécystectomie peut être proposée durant la même hospitalisation chez les malades de moins de 75 ans en cas de PA peu sévère (< 3 critères de Ranson).

 

De nombreux autres traitements comme les inhibiteurs d’enzymes pancréatiques, l’administration d’anti-H2, de glucagon, d’ocréotide ou de calcitonine, le lavage péritonéal, le drainage du canal thoracique et la chirurgie précoce de principe ont été proposés. Leur utilité n’a pas été démontrée.

 

Dans un avenir plus ou moins proche, il est possible que des drogues visant à inhiber l’action des cytokines proinflammatoires libérées précocément au cours de la PA puissent diminuer la morbidité et les complications systémiques associées à la PA sévère (ex. : le lexipafant).

 

Divers traitements sont possibles pour les pseudo-kystes ne régressant pas spontanément et qui restent symptomatiques :

·        La kysto-gastrostomie par voie endoscopique pour les pseudo-kystes du corps ou de la queue du pancréas faisant protrusion dans la lumière gastrique.

·        La kysto-duodénostomie endoscopique pour les pseudo-kystes céphaliques comprimant la paroi duodénale.

·        La chirurgie est à réserver aux échecs de drainage percutané et/ou endoscopique. Il comprend un drainage interne par kysto-jéjunostomie ou plus rarement une résection pancréatique caudale pour certains pseudo-kystes infectés de la queue du pancréas.

 

II.        LES PANCREATITES CHRONIQUES

a.        ANATOMOPATHOLOGIE

 

Deux types de pancréatites chroniques (PC) sont décrites : la pancréatite chronique calcifiante qui est fréquente et la pancréatite chronique obstructive qui est rare.

 

1.         La pancréatite chronique calcifiante

 

Elle se caractérise par des lésions de fibrose du parenchyme pancréatique exocrine associées à des anomalies des canaux pancréatiques (sténoses et dilatations) qui sont souvent remplis de précipités protéiques calcifiés ou non. Le tissu fibreux remplace progressivement le tissu exocrine puis endocrine. Des kystes de taille variable (allant jusqu’à plus de 10 cm) et communiquant avec le canal de Wirsung se développent chez certains malades. Il s’agit de pseudo-kystes à paroi fibreuse, développés dans, puis hors du pancréas. Ils contiennent du suc pancréatique pur sous pression. Ils sont donc différents des pseudo-kystes nécrotiques rencontrés dans les pancréatites aiguës.

 

2.         La pancréatite chronique obstructive

 

Elle est caractérisée par une dilatation régulière du canal pancréatique en amont d’un obstacle sur le canal de Wirsung préexistant à la pancréatite, comme un cancer à évolution lente de la tête du pancréas, une sténose oddienne bénigne ou un ampullome Vatérien.

 

B.        ETIOLOGIE ET HISTOIRE NATURELLE

1.         Alcoolisme chronique

 

L’alcoolisme chronique est l’étiologie largement dominante dans les pays à climat tempéré et est considéré comme étant la cause de 70 à 90% des cas de PC. Il existe une relation linéaire entre la consommation d’alcool et le logarithme du risque de survenue de la PC, sans valeur seuil. On considère que la durée moyenne de la prise d’alcool est de 17 à 18 ans chez les hommes et de 10 à 13 ans chez les femmes avant que la maladie ne se manifeste cliniquement. Le type d’alcool absorbé et le rythme de prise d’alcool ne semblent pas jouer de rôle majeur sur le risque de survenue de la PC. Tous les alcooliques chroniques ne développant pas des PC, il est probable que d’autres facteurs (peut-être génétiques) interviennent.

 

Le tabagisme (souvent associé à l’alcoolisme chronique) intervient également comme facteur étiologique dans la PC calcifiante.

 

L’affection a une nette prépondérance masculine et survient à un âge moyen de 40 ans.

 

Au début, la maladie se manifeste principalement par des douleurs (80% des cas). Des poussées de pancréatite aiguë peuvent apparaître éventuellement compliquées de pseudo-kystes nécrotiques. Après 5 à 10 ans, les poussées aiguës deviennent plus rares, mais des pseudo-kystes de type rétentionnel et de la cholestase peuvent se développer. Ultérieurement, la fibrose du parenchyme continuant à évoluer, les douleurs tendent à diminuer, mais on assiste à l’installation d’une insuffisance pancréatique exocrine et endocrine.

 

2.         Pancréatite chronique tropicale

 

Une forme particulière de PC a été décrite chez les habitants les plus pauvres des pays en voie de développement. Elle survient à un âge moyen de 12,5 ans et atteint également les deux sexes. Le rôle de la malnutrition protéique est possible, la toxicité du manioc a été suggérée mais non prouvée.

 

3.         Pancréatite chronique héréditaire ou familiale

 

La maladie pourrait être due à une tare autosomale dominante à pénétrance incomplète. Elle est due à une mutation du gène du trypsinogène cationique situé sur le long bras du chromosome 7. Son incidence est inférieure à 1% de toutes les PC.

 

La pancréatite débute en général avant l’âge de 20 ans et les deux sexes sont affectés.

 

4.         Pancréatite chronique auto-immune

 

Il s’agit d’une pancréatite chronique peu sévère (pas de dilatation du canal de Wirsung, pas de kyste, pas de calcification, peu de douleur) associée à une hyper g globulinémie, une hypereosinophilie et à la présence d’auto-anticorps, en l’absence d’une autre étiologie. Elle survient à un âge moyen de 63 ans, atteint les deux sexes et répond à une corticothérapie.

 

5.         Pancréatite idiopathique

 

La proportion de PC d’étiologie indéterminée varie de 10 à 30%. Des différences dans les critères d’acceptation de l’alcoolisme comme cause de PC expliquent en partie cette variation. Deux pics d’incidence sont observés : le premier vers l’âge de 25 ans (type juvénile) et le deuxième vers 65 ans (type sénile).

 

C.        PHYSIOPATHOLOGIE

 

Les facteurs influençant le développement et la progression de la pancréatite chronique (PC), en particulier la PC alcoolique sont encore controversés :

 

-         Théorie de l’obstruction canalaire : l’alcool perturbe les fonctions acinaires et ductales et altère ainsi les sécrétions pancréatiques (augmentation de la viscosité du suc pancréatique et de sa teneur en protéines, diminution de la concentration en citrate et en lithostatine, qui tous deux empêchent la précipitation du CaCO3). Des précipités protéiques se forment dans les canalicules ce qui engendre inflammation et fibrose. Le primum movens serait un défaut héréditaire ou acquis de biosynthèse de la lithostatine dont la concentration basse dans le liquide pancréatique pourrait être secondaire à la prise d’alcool ou liée à des facteurs génétiques ce qui expliquerait la susceptibilité individuelle à développer une PC en cas d’alcoolisme.

 

-         Théorie de la toxicité de l’alcool : sur la cellule acinaire par augmentation de la fragilité des organelles cytoplasmiques et des membranes lysosomiales, accumulation de gouttelettes lipidiques dans les cellules ductales et acinaires suivie de fibrose et d’atrophie glandulaire.

 

-         Théorie du stress oxydatif : un stress oxydatif induirait un excès de production de radicaux libres dans les cellules acinaires, une fusion des lysosomes et des granules zymogènes, et une oxydation des lipides membranaires. L’ensemble de ces événements conduisent à une dégranulation des mastocytes, une activation plaquettaire et une réponse inflammatoire.

 

-         Théorie de la séquence nécrose-fibrose : cette théorie postule qu’il existe une pathogenèse commune pour la pancréatite aiguë et chronique. En fait, la pancréatite chronique résulterait de la répétition de phénomènes nécrotiques inflammatoires aigus avec résorption et cicatrisation des foyers nécrotico-inflammatoires et évolution vers la fibrose.

 

-         Théorie ischémique : dans un pancréas présentant un obstacle canalaire et ayant perdu une grande partie de son élasticité parenchymateuse à cause du processus fibrotique, les pressions tissulaire et intraductale s’élèvent lors de la stimulation sécrétoire. Ceci entraîne une diminution du flux sanguin pancréatique et une diminution du pH tissulaire pouvant jouer un rôle dans la progression des lésions fibrosantes et dans la survenue de la douleur postprandiale.

 

D.        MANIFESTATIONS CLINIQUES

 

La douleur est la principale manifestation de la PC débutante. Elle siège habituellement dans la moitié supérieure de l’abdomen, le plus souvent au niveau de l’épigastre. Elle peut irradier de manière transfixiante dans le dos et est parfois calmée par la position en chien de fusil. La durée des épisodes douloureux est longue : de plusieurs heures à 2 à 3 jours. Entre les crises douloureuses, pendant l’intervalle libre qui peut varier de quelques semaines à plusieurs mois, voire plusieurs années, le calme est complet. La crise douloureuse peut débuter brutalement 12 à 24 heures après une prise excessive d’alcool (c’est-à-dire au moment où la concentration protéique dans le liquide pancréatique est maximale). La douleur est aggravée par les repas, ce qui explique que les malades évitent de manger au cours des crises.

 

Au cours de l’évolution de la maladie, la douleur peut devenir chronique et continue (systématiquement au cours de la période post-prandiale par exemple), pouvant ainsi devenir un facteur favorisant le développement d’une toxicomanie.

 

Les mécanismes de la douleur dans la PC sont probablement multifactoriels et incluent notamment :

·         Une augmentation de la pression canalaire et tissulaire en amont d’un obstacle (sténose et/ou calcul) entraînant l’ischémie du parenchyme glandulaire fibreux non expansible ;

·         Une inflammation aiguë avec oedème du pancréas ;

·        Des lésions inflammatoires périnerveuses.

 

L’amaigrissement est contemporain des crises douloureuses et son importance varie en fonction de l’intensité et de la répétition des crises. Entre les crises douloureuses, le poids retourne à la normale. Au stade tardif de la maladie, l’amaigrissement est secondaire à l’insuffisance endocrine (diabète) et exocrine (stéatorrhée) qui viennent compliquer l’affection.

 

Le diabète survient en général tardivement au cours de l’évolution de la PC, il est le plus souvent modéré, rarement acido-cétosique. L’hypoglycémie est fréquente dans le diabète d’origine pancréatique. Son origine est multifactorielle : apports caloriques irréguliers, maldigestion, diminution de libération du glucagon. Les complications rénales, vasculaires et rétiniennes sont inhabituelles. La polynévrite est par contre fréquente à cause de l’effet favorisant de l’alcoolisme.

 

La stéatorrhée survient lorsque la sécrétion d’enzymes pancréatiques dans le duodénum est diminuée d’au moins 90% et s’observe dans environ 30% des PC. La malabsorption des graisses précède toujours la malabsorption des protéines (créatorrhée). Elle peut s’accompagner d’une malabsorption des vitamines liposolubles (A, D, E, K) de certains oligo-éléments et de la vitamine B12.

 

E.        COMPLICATIONS

1.         La cholestase

 

La sténose du cholédoque intrapancréatique, secondaire à la fibrose pancréatique, est présente dans environ 50% des cas mais sera responsable d’une cholestase dans 10 à 25% des cas et d’un ictère chez seulement 5% des patients.

 

Les principaux risques d’une cholestase liée à une sténose de la voie biliaire principale sont les infections biliaires (angiocholite ou exceptionnellement abcès hépatiques) et la cirrhose biliaire secondaire dont la prévalence apparaît faible. On considère qu’un drainage biliaire doit être proposé en cas de cholestase significative (phosphatase alcaline > 2 N) et persistante (durant plus de 4 semaines).

 

2.         Les pseudo-kystes

 

Il existe deux types de pseudo-kystes au cours de la PC. Les « pseudo-kystes nécrotiques » sont secondaires à une poussée de pancréatite aiguë. Les « pseudo-kystes rétentionnels » proviennent de la rupture d’un canal pancréatique sous pression. Les seconds sont plus fréquents que les premiers.

 

50% des pseudo-kystes par rétention sont localisés dans la tête du pancréas.

 

Les pseudo-kystes nécrotiques régressent souvent spontanément endéans les 6 semaines suivant l’épisode aigu tandis que les pseudo-kystes par rétention ont de faibles chances de régresser sauf s’ils sont de petite taille (< 5 cm de diamètre) et s’il n’existe pas  d'obstacle canalaire (absence de dilatation du canal de Wirsung).

 

Les pseudo-kystes peuvent s’infecter (avec formation d’un abcès), se rompre vers un organe creux voisin (le péritoine, la plèvre, …), de comprimer la voie biliaire principale (choléstase et/ou ictère) ou de l’axe spléno-portal (avec développement d’une hypertension portale segmentaire), ou encore être le siège d’hémorragie intrakystique (par érosion vasculaire).

 

3.         La sténose duodénale

 

Peu fréquente, elle peut être due à une hypertrophie de la tête du pancréas ou à un volumineux pseudo-kystes céphalique.

 

4.         Lésions associées

 

La stéatose hépatique est fréquente. La prévalence de la cirrhose est variable suivant que celle-ci est appréciée sur de simples critères cliniques (2% des PC) ou sur l’examen anatomopathologique d’une biopsie hépatique (18 à 25% des PC). La fréquence de la lithiase biliaire varie de 2 à 15% des cas, elle survient principalement en cas de sténose de la voie biliaire principale, ce qui laisse penser que la stase biliaire joue un rôle favorisant.

 

L’artérite des membres inférieurs est plus fréquente (7% des cas) chez les malades atteints de PC que dans la population générale. L’hyperuricémie, l’alimentation hypercalorique, le diabète et le tabagisme sont des facteurs étiologiques possibles.

 

Le cancer du pancréas est rare et concerne 2 à 3% de PC. Il s’observe surtout en cas de PC familiale.

 

F.        DIAGNOSTIC

1.         Biologie et exploration fonctionnelle

 

Les signes suivants peuvent être observés :

·        Une hyperamylasémie et une hyperlipasémie au moment des poussées.

·        Une choléstase transitoire ou permanente.

·        Un diabète clinique ou une épreuve d’hyperglycémie provoquée pathologique.

·        Une stéatorrhée.

·        Des déficits protéiques, lipidiques et vitaminiques consécutifs à la malabsorption.

 

Les tests évaluant la fonction pancréatique sont rarement nécessaires pour le diagnostic. Ils sont, parfois, utiles pour suivre l’évolution de la maladie et l’effet du traitement.

 

2.         Imagerie

 

La radiographie de l’abdomen sans préparation peut déceler la présence de calcifications dans l’aire pancréatique. Les clichés doivent être pris de face, de profil, en oblique antérieur gauche et en oblique antérieur droit pour éviter la superposition des calcifications pancréatiques et des structures osseuses de la colonne vertébrale.

 

L’échographie percutanée abdominale en cas de PC, montre un pancréas hyperéchogène ou hétérogène, une dilatation du canal de Wirsung et parfois des calculs intracanalaires. Elle permet le diagnostic des pseudo-kystes pancréatiques, la mise en évidence d’une dilatation des voies biliaires, d’une thrombose spléno-portale et d’une ascite.

 

La tomodensitométrie montre des calcifications pancréatiques invisibles sur les clichés d’abdomen à blanc. Les dilatations du canal de Wirsung sont nettement visibles. La présence de pseudo-kystes et leurs rapports avec les organes de voisinage ou les vaisseaux peuvent être précisés. En cas de poussée aiguë, la tomodensitométrie est préférable à l’échographie (meilleure détection des coulées inflammatoires).

 

La cholangiopancréatographie par résonance magnétique nucléaire (CPRM) met en évidence les anomalies canalaires des voies biliaires et pancréatiques (sténoses et dilatations), démontre les pseudo-kystes et leur communication avec le système canalaire et évalue la sécrétion pancréatique exocrine résiduelle après injection IV de sécrétine. Cette technique est par contre moins performante pour la mise en évidence des calcifications pancréatiques.

 

3.         Endoscopie

a. La cholangiopancrétographie endoscopique (CPE)

 

Les lésions canalaires atteignent uniquement les canaux secondaires au stade initial de la PC. A un stade plus  avancé, le canal pancréatique principal apparaît soit dilaté de manière homogène en amont d’un obstacle (lithiase et/ou sténose fibreuse) soit irrégulier, d’aspect tortueux, montrant une succession de sténoses avec ou sans dilatations segmentaires. Des lacunes intracanalaires correspondant à des précipités protéiques ou à des calculs calcifiés peuvent être visibles. Différentes classifications de la PC sur base de la pancréatographie endoscopique ont été proposés. Celle de Cremer, est représentée dans le tableau IV.

 

Les sténoses de la voie biliaire principale ainsi que leurs retentissements (dilatation du canal hépatique, lithiases biliaires en amont) peuvent également être mises en évidence lors de la CPE.

 

 

TABLEAU IV : CLASSIFICATION DES DEFORMATIONS CANALAIRES DANS LA PC SELON M. CREMER

Type I : Lésions portant uniquement sur les canaux secondaires

 

Type II : Formes focales où les lésions ne portent que sur une partie du pancréas (tête corps ou queue)

 

Type III : Pancréatite diffuse. Wirsung d’aspect tortueux montrant des sténoses avec ou sans dilatations segmentaires.

 

Type IV : Dilatation homogène en amont d’un obstacle situé dans la tête du pancréas.

 

Type V : Obstruction complète du canal de Wirsung au niveau du corps du pancréas

 

 

b. L’écho-endoscopie

 

En balayant la face postérieure de l’estomac ou la face interne du deuxième duodénum, on obtient des renseignements sur l’échostructure fine du pancréas, autorisant ainsi le diagnostic à un stade trèsprécoce des PC ainsi que sur les rapports entre pseudo-kystes et paroi digestive.

 

G.        TRAITEMENT

 

Le traitement de la PC est l’objet de controverses. Celles-ci résultent, en partie, du développement rapide de techniques nouvelles (pose de prothèses biliaires ou pancréatiques, lithotritie extracorporelle, coeliochirurgie). Les attitudes thérapeutiques sont donc très variables. Chez près de la moitié des malades un traitement médical est suffisant. Les autres traitements sont réservés aux malades présentant des douleurs ne répondant pas au traitement médical, et à ceux présentant des complications.

 

1.         Traitement médical

 

Quelle que soit l’étiologie de la PC, il faut préconiser la suppression totale et définitive de boissons alcooliques et un régime modérément appauvri en graisses (25 à 30% de la ration calorique totale, c’est-à-dire 60 à 80 gr de lipides par jour) et normal en protéines (80 à 100 gr par jour).

 

Les antalgiques en cas de crise douloureuse sont l’aspirine et les anticholinergiques. Souvent les dérivés morphiniques sont requis pour calmer la douleur aiguë. Le danger de dépendance médicamenteuse est très grand et les opiacés ne peuvent être utilisés que transitoirement.

 

L’utilisation d’enzymes pancréatiques pour diminuer les phénomènes douloureux a été proposée, l’hypothèse étant que les protéases pancréatiques présentes dans la lumière duodénale inhiberaient la sécrétion pancréatique exocrine et par là réduiraient la pression intracanalaire et soulageraient le patient lors des épisodes douloureux. En pratique, cet effet bénéfique reste controversé et le plus souvent il n’est pas observé dans la PC douloureuse sévère.

 

L’administration d’enzymes pancréatiques (CréonÒ, PancréaseÒ) est indiquée pour le traitement de la malabsorption secondaire à l’insuffisance pancréatique exocrine. Les doses efficaces sont celles apportant 30.000 unités internationales de lipase par jour. Six à douze comprimés ou capsules par jour des différentes préparations actuellement disponibles seront prescrites, réparties au cours des différents repas. Des préparations hautement dosées en enzymes pancréatiques seront bientpot disponibles sur le marché (Créon Forte ou Pancréase HL).

 

Le traitement du diabète comprend, au début de la maladie, les hypoglycémiants oraux mais le plus souvent le recours à l’insulinothérapie est nécessaire (voir cours d’endocrinologie).

2.         Traitement chirurgical

a. Drainage du canal de Wirsung

 

Il est préférentiellement réalisé par une anastomose pancrético-jéjunale latéro-latérale sur anse Y (fig. 25). Le Wirsung est ouvert sur toute sa longueur et sa partie céphalique vidée de ses calculs. Le traitement n’est possible que si le diamètre du canal de Wirsung atteint plus de 8 mm. Plus de 75% des malades sont définitivement débarrassés de leurs douleurs. Les échecs surviennent presque toujours chez des malades qui continuent à consommer de l’alcool. Dans les centres spécialisés la mortalité est de 1 à 2%.

 

Figure 25

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Figure 25’

 

La pancréatectomie caudale complétée par une anastomose pancréatico-jéjunale termino-terminale selon  Duval a gardé quelques rares indications (fig. 25’).

 

b. Kysto-entérostomies

 

Suivant la localisation du kyste, on réalisera une kysto-gastrostomie, une kysto-duodénostomie ou une kysto-jéjunostomie sur anse en Y.

 

c. Traitement de la cholostase et de la sténose duodénale

 

Les sténoses cholédociennes peuvent être traitées par choldéco-duodénostomie. La vésicule sera systématiquement enlevée. Pour éviter les sténoses secondaires de l’anastomose, celle-ci doit avoir au moins 1 cm de large. En cas de sténose duodénale, une gastro-entérostomie sera réalisée.

 

d. Opérations combinées

 

Les opérations décrites ci-dessus peuvent être combinées en cas de nécessité. On peut par exemple associer une Wirsungo-jéjunostomie et une kysto-jéjunostomie sur une seule anse jéjunale en Y. La triple dérivation comporte une Wirsungo-jéjunostomie, une cholédoco-entérostomie et une gastro-entérostomie.

 

e. Résections pancréatiques

 

La duodéno-pancréatectomie céphalique (opération de Whipple) ou l’une de ses variantes n’a que des indications exceptionnelles.

 

Les rares pancréatites localisées uniquement à la queue du pancréas seront traitées par pancréatectomie caudale.

 

3.         Traitement endoscopique

 

Le but du traitement endoscopique de la PC est d’abolir la douleur si elle est continue ou de prévenir la réapparition des crises douloureuses récidivantes en restaurant un drainage canalaire pancréatique adéquat. Il a pour objet complémentaire de préserver, voire d’améliorer la fonction pancréatique. Différentes techniques peuvent être utilisées en même temps chez un malade.

 

La sphinctérotomie pancréatique constitue la première étape du traitement endoscopique des PC sévères (de type III , IV ou V selon la classification de Cremer). Elle se réalise en deux temps : la section diathermique du sphincter biliaire suivie d’une spetotomie après introduction du sphinctérotome dans le canal de Wirsung.

 

En présence d’une sténose serrée du canal principal, un drainage correct peut s’obtenir après insertion d’une prothèse pancréatique en plastique visant à calibrer la sténose (différentes longueurs sont possibles, le diamètre intérieur est de 2,6 mm). Les prothèses pancréatiques actuellement disponibles s’obstruent fréquemment par les précipités protéiques présents dans le liquide pancréatique et le plus souvent la sténose canalaire récidive après retrait de la prothèse. L’évolution du matériel prothétique et en particulier l’apparition de prothèses métalliques couvertes palliera peut-être les problèmes d’obstruction et de récidive sténotique rencontrés actuellement.

 

L’insertion d’une prothèse biliaire a pour objet de traiter la sténose de la voie biliaire principale dans son trajet intrapancréatique.

 

En cas de pseudo-kystes volumineux (d’un diamètre supérieur à 6 cm) et symptomatiques c’est-à-dire responsables de douleurs persistantes ou d’ictère ou encore en cas de surinfection du pseudo-kyste, un drainage du pseudo-kyste doit être proposé. Si le pseudo-kyste est proche de la paroi digestive et s’il entraîne une compression de la face postérieure de l’estomac ou du duodénum, une kystogastrostomie ou kystoduodénostomie (création d’une fistule entre le pseudo-kyste et l’estomac ou le duodénum) seront réalisées. En cas d’impossibilité technique (pseudo-kyste trop éloigné des cavités digestives par exemple), un drainage percutané guidé par échographie ou par tomodensitométrie peut être effectué. L’échoendoscopie permet actuellement de repérer et de drainer par kystogastrostomie/duodenoastomie, certains pseudokystes n’entraînant pas de compression visible de la paroi digestive en raison de leur éloignement.

 

Aucune étude randomisée médico-chirurgicale, comparant les drainages endoscopiques et chirurgicaux n'a pu éclaicir les cliniciens sur la supériorité de l'une ou l'autre approche. Dans les hôpitaux où les gastro-entérologues sont entraînés à ces techniques délicates, ils ont tendance à poursuivre les traitements médicaux. Les chirurgiens ne bénéficient donc pas d'un recrutement homogène de patients. En outre, l'éthylisme actif pose un énorme problème éthique. Pour certains gastroentérologues, les avantages des traitements conservateurs sont une mortalité (liée à la thérapeutique) réduite, l’amélioration de l’état nutritionnel, l’amélioration de la fonction pancréatique exocrine pour certains patients et l’absence d’aggravation du diabète.

 

4.         La lithotritie extracorporelle

 

La lithotritie extracorporelle des calculs pancréatiques introduite en 1987 représente, pour certains, un progrès déterminant car elle permet de désintégrer les calculs pancréatiques toujours excessivement difficiles à extraire, même chirurgicalement du fait de leur enclavement dans la paroi canalaire.

 

5.         L’infiltration du plexus coeliaque

 

Un petit pourcentage de patients (moins de 10% des PC sévères et douloureuses) continuent à présenter un syndrome douloureux chronique malgré la restauration d’un drainage canalaire adéquat (c’est-à-dire après disparition de tout obstacle intracanalaire et absence de dilatation du canal de Wirsung). Une infiltration du plexus coeliaque par une solution de corticoïdes ou d’alcool à 50° (plus dangereuse) peut être proposée à ce groupe très sélectionné de patients avec des résultats satisfaisants mais transitoires.


CHAPITRE III : LES TUMEURS

I.         ANATOMOPATHOLOGIE

A.        LES TUMEURS EXOCRINES

 

Les tumeurs pancréatiques peuvent être d’origine exocrine ou plus rarement endocrine. Parmi les tumeurs exocrines, on distingue deux grands groupes :

·        Les tumeurs kystiques qui forment un groupe de lésions bénignes ou à potentialité maligne.

·        Les tumeurs solides malignes, qui sont les adénocarcinomes dont la plupart dérivent des canaux.

 

1.         Les tumeurs kystiques

 

Il faut les distinguer soigneusement des pseudo-kystes fréquents dans les pancréatites. Il faut également éliminer de ce groupe la dégénérescence kystique de certains adénocarcinomes.

 

a. Les cystadénomes  séreux

 

Le cystadénome microkystique séreux forme une masse multiloculaire souvent de grande taille. Il est constitué en règle générale d’une multitude de petits kystes, recouverts par un épithélium cubique riche en glycogène ; les cavités contiennent un liquide séreux. Le comportement du cystadénome séreux est en général bénin. On a cependant décrit une forme maligne (cystadénocarcinome microkystique).

 

b. Les tumeurs kystiques mucineuses

 

Les tumeurs kystiques mucineuses peuvent être uni- ou multiloculaires ; les kystes en général de grande taille sont tapissés par un épithélium cylindrique mucosécrétant. On les a longtemps divisés en variantes bénignes : cystadénomes et malignes : cystadénocarcinomes ; cette subdivision est abandonnée à l’heure actuelle en se basant sur le fait que les variantes histologiquement bénignes contiennent souvent des foyers dysplasiques ou dégénèrent dans un nombre important de cas.

 

L’évolution des tumeurs kystiques mucineuses, qu’elles soient au départ histologiquement bénignes ou malignes, est habituellement lente, les métastases sont tardives et limitées à la cavité abdominale.

c. Les tumeurs papillaires intracanalaires mucosécrétantes

 

Il s’agit de tumeurs rares se présentant sous forme d’une lésion papillaire mucosécrétante intracanalaire, soit dans le canal pancréatique principal, soit au départ d’un canal secondaire. Leur histologie est proche de celle des tumeurs kystiques mucineuses, qui elles, ne communiquent pas avec le système canalaire pancréatique.

 

Ces tumeurs doivent être considérées comme malignes ou potentiellement malignes.

 

2.         Les adénocarcinomes

 

L’adénocarcinome canalaire est la tumeur maligne du pancréas la plus fréquente (85% des cancers). Dans la majorité des cas, la tumeur se développe dans la tête de l’organe. L’extension loco-régionale ganglionnaire mésentérique et péritonéale est rapide. La présence de métastases hépatiques est observée au moment du diagnostic chez 50% des malades.

 

Il s’agit d’une tumeur du patient d’âge moyen (³ 55 ans), de mauvais pronostic.

 

Les autres tumeurs exocrines solides du pancréas sont rares citons le carcinome acinaire.

 

B.        LES TUMEURS ENDOCRINES

 

Ces tumeurs sont rares et représentent moins de 1% de la totalité des tumeurs pancréatiques. Histologiquement, elles sont tout à fait similaires aux tumeurs endocrines observées dans le tube digestif et à d’autres endroits de l’organisme.

 

Les tumeurs endocrines pancréatiques peuvent être non-fonctionnelles, du moins au niveau de la détection clinique de l’hormone. Plus communément, elles se manifestent par des syndromes endocriniens.

 

II.        L’ADENOCARCINOME

1.         Epidémiologie

 

Le cancer du pancréas représente près de 10% des cancers de l’appareil digestif. Son incidence est de 4 à 10/100.000 habitants/an. Cette incidence est plus faible en Inde, en Afrique, au Moyen-Orient.

 

L’âge moyen de survenue est d’environ 65 ans chez l’homme et de 70 ans chez la femme. Avant 50 ans, il existe une prédominance masculine.

Certains facteurs de risque ont été incriminés comme le tabac, le café, les graisses animales, le régime hypercalorique.

 

2.         Manifestations cliniques

 

La douleur est la symptomatologie la plus fréquente (60 à 80% des cas). Dans sa forme typique, elle a un siège sus-ombilical à irradiation transversale et surtout transfixiante. D’abord peu intense et espacée, elle peut devenir paroxystique imposant des attitudes antalgiques comme la position genu-pectorale.

 

L’ictère obstructif, parfois précédé de prurit, est un signe essentiel de cancer de la tête du pancréas. Son installation est insidieuse, son évolution continue sans rémissions. Il n’y a pas de température. Les urines sont foncées (couleur porto) et les selles décolorées (mastic). L’examen clinique peut révéler la présence d’une hépatomégalie sous laquelle on trouve une masse ovoïde lisse et indolore (signe de Courvoisier Terrier).

 

L’amaigrissement et l’asthénie sont constants à la période d’état, mais ils peuvent précéder les autres symptômes et constituer des signes cliniques de début.

La stéatorrhée est en général tardive sauf lorsquele développement de la tumeur bloque le canal pancréatique.

 

L’apparition d’un diabète peut être le premier signe d’un cancer de la queue du pancréas.

 

Exceptionnellement, la première manifestation d’un cancer pancréatique est une pancréatite aiguë, une température d’origine indéterminée, des thromboses veineuses superficielles, une hypertension portale segmentaire, une pleurésie amylasique ou une ascite chyleuse.

 

3.         Diagnostic

 

Le diagnostic repose essentiellement sur l’utilisation des méthodes morphologiques.

 

A l’échographie percutanée, le cancer du pancréas se présente sous forme d’une lésion focale hyperéchogène de l’aire pancréatique. On peut observer une dilatation des voies biliaires extra et intrahépatiques dans les formes ictériques.

 

La tomodensitométrie montre une augmentation localisée du volume du pancréas au sein de laquelle on visualise une zone hypodense après injection IV de produit de contraste. Son rôle est important dans le bilan d’extension et de resécabilité. Les résultats obtenus par la résonance magnétique nucléaire (RMN) ne semblent pas supérieurs à la tomodensitométrie.

 

La limite inférieure de détection concerne les lésions de 1 à 2 cm. La sensibilité et la spécificité sont d’environ 90%.

 

La cholangiopancréatographie endoscopique (CPE) est l’examen le plus performant pour le diagnostic des lésions cancéreuses qui entraînent une sténose localisée du canal de Wirsung avec dilaration canalaire en amont. En cas de cancer de la tête du pancréas, le signe de la double sténose du cholédoque et du Wirsung en regard l’une de l’autre, est pathognomonique. On peut recueillir du suc pancréatique pour analyse cytologique et procéder à un brossage au niveau des sténoses à la recherche de cellules malignes et d’altérations moléculaires au niveau d’oncogènes.

 

L’écho-endoscopie permet de préciser l’extension locale de la tumeur en démontrant la présence d’adénopathies de grande taille ou un envahissement vasculaire (thrombose porte par exemple). L’efficacité diagnostique de l’écho-endoscopie semble supérieure (91%) à celle de l’échographie percutanée (64%) de la tomodensitométrie (66%) surtout pour des tumeurs de moins de 2,5 cm de diamètre.

 

La ponction à l’aiguille fine sous échographie percutanée ou endoscopique ou tomodensitométrie permet souvent un diagnostic de certitude. La spécificité est de près de 100%. La sensibilité atteint ou dépasse 80%. Des techniques de ponction transpapillaire au cours de la CPE sont en cours de développement. Elles permettront d’éviter le risque de dissémination intrapéritonéale lié aux ponctions percutanées.

 

L’artériographie sélective n’est plus considérée comme une méthode utile dans le bilan d’extension des tumeurs pancréatiques compte tenu de la qualité des séquences angiographiques obtenues par RMN ou tomodensitométrie.

 

La biologie a peu de place dans le dépistage, le suivi ou le pronostic d’un adénocarcinome pancréatique. On ne retiendra que le dosage du CA 19.9 sérique et un volet prometteur apporté par la biologie moléculaire.

 

Le CA 19.9 (N < 37 UI/l) est le meilleur marqueur actuel de l’adénocarcinome pancréatique. Cependant, il a une faible sensibilité au stade précoce. Il a peut-être un rôle utile dans le suivi de la tumeur, et il semble généralement admis qu’un taux > 1000 UI/l soit le signe d’une tumeur non réséquable.

 

Un dépistage dans les selles, le liquide pancréatique ou des échantillons cytologiques, de la présence de mutations de l’oncogène Ki-ras et/ou du gène suppresseur de tumeur p53 paraît prometteur dans le cadre du diagnostic de carcinome pancréatique, mais ceci reste encore à confirmer et n’est donc pas disponible en routine clinique.

4.         Traitement

a. Traitement à visée curative

 

Dans les cancers du corps ou de la queue du pancréas, l’exérèse sera une spléno-pancréatectomie caudale réséquant la rate et la partie gauche du pancréas (fig. 26).

 

La résection chirurgicale est le seul traitement possible si l'on espère une curabilité.

Celle-çi est assortie d'un pronostic qui dépend du stade pTNM de la tumeur pancréatique.

Ce stade ne peut être confirmé que par la lymphadénectomie qui accompagne la résection.

 


 

Zone de Texte: Fig. 26
Tumeur caudale du pancréas

 

 


Si la tumeur occupe la région céphalo-corporéale du pancréas, la résection consiste en une duodénopancréatectomie couramment appelée D.P.C.  (fig. 27)

 

Figure 27

Le traitement à visée curative du cancer de la tête du pancréas est la duodénopancréatectomie céphalique (opération de Whipple). Elle comporte une hémi-résection gastri-que, une résection du duodénum, de la tête du pancréas et du bas cholédoque. Ces résec-tions sont faites en bloc et sont accompagnées d’un curage ganglionnaire. Une cholécystectomie est réali-sée de principe pour prévenir le développement de calculs. La continuité digestive est rétablie par une anse grêle sur laquelle on anastomose succes-sivement le moignon pancréatique, le cholé-doque et l’estomac.

 

 
 


 


Une variante de l’opération de Whipple consiste en une duodénopancréatectomie céphalique avec conservation du pylore (et de l’estomac dans son entièreté) qui semble améliorer le confort postopératoire.

 

Aucun traitement adjuvant n’a démontré son efficacité.

 

b. Traitement palliatif

 

Fig. 28.

Le drainage biliaire chirurgical sera réalisé par une cholédoco-duodénostomie si la tumeur envahit peu les voies biliaires et par hépatico-entérostomie dans les autres cas.

Cette dérivation chirurgicale palliative peut également être associée à une dérivation gastrique préventive.

On parle alors de double dérivation.

 

 
L’ictère peut être traité chirurgicalement ou endoscopiquement.


 


Le placement d’une prothèse biliaire par voie endoscopique et/ou transhépatique est couramment réalisée dans les centres spécialisés. La place respective des deux techniques est controversée.

 

La sténose duodénale sera traitée par une gastro-entérostomie chirurgicale. Une gastro-entérostomie de principe sera réalisée en cas de drainage biliaire chirurgical car ± 20% des malades ayant eu une simple dérivation biliaire présentent ultérieurement une occlusion duodénale nécessitant un geste thérapeutique additionnel.

 

La douleur est soulagée, au moins temporairement, par la dérivation biliaire chez ± 50% des malades ayant un cancer de la tête du pancréas. Pour les autres localisations et pour les cancers avancés, l’infiltration du plexus coeliaque par de l’alcool apporte une sédation de longue durée chez plus de 80% des malades.

 

Les tumeurs pancréatiques sont d’une manière générale peu sensibles à la radiothérapie et à la chimiothérapie. Des traitements comportant l’association d’une radiothérapie externe et d’une chimiothérapie, la radiothérapie per-opératoire ou la chimiothérapie intra-artérielle avec hémofiltration sont en cours d’évaluation.

 

5.         Pronostic

 

L’adénocarcinome pancréatique est, de tous les cancers de l’appareil digestif, celui dont le pronostic est le plus mauvais.

 

Le taux de survie à 5 ans après résection curative, dans les centres spécialisés est de 25 %, tous stades confondus, la mortalité opératoire étant inférieure à 3%. La majorité des récidives sont locales.

En cas de chirurgie ou d'endothérapie palliative, la survie médiane est de ± 20 mois et de ± 4 mois en l’absence de traitement.

 

III.      LES CYSTADENOMES ET LES CYSTADENOCARCINOMES

 

Les cystadénomes constituent moins de 10% des lésions kystiques du pancréas. Ils sont de deux types : le cystadénome séreux et le cystadénome mucineux. Seuls les seconds présentent des risques de dégénérescence néoplasique.

 

Moins de 1% des cancers du pancréas sont des cystadénocarcinomes.

 

Les cystadénomes se développent surtout chez des femmes d’âge moyen. Ils se manifestent par des douleurs, une perte de poids, des nausées et des vomissements. L’ictère et l’insuffisance pancréatique sont rares. La présence d’une masse épigastrique palpable est rare.

 

Le diagnostic est établi par l’échographie percutanée, la tomodensitométrie et la cholangiopancréatographie endoscopique ou plus récemment par la cholangiopancréatographie par résonance magnétique. Le diagnostic différentiel séreux vs mucineux nécessite l’analyse biochimique et cytologique du contenu du kyste prélevé par ponction percutanée sous controle échographique ou tomodensitométrique.

 

Les cystadénomes mucineux dégénérant en carcinomes, il semble raisonnable de proposer la résection sauf en cas de contre-indication d’ordre général. La survie à long terme des cystadénocarcinomes réséqués étant considérablement supérieure à celles des adénocarcinomes, une intervention chirurgicale est indiquée même en présence de masses volumineuses. Les cystadénomes séreux ne seront opérés que s’ils provoquent des douleurs ou s’ils compriment les organes voisins.

 

IV.       LES TUMEURS ENDOCRINES

 

Par rapport aux cancers exocrines, elles sont d’une grande rareté et représentent moins de 1% de la totalité des tumeurs pancréatiques. Elles se développent soit à partir des cellules des îlots de Langerhans (ex. : insulinome), soit à partir des cellules normalement disparues du pancréas endocrine après quelques semaines de vie du nouveau-né (ex. : gastrinome). Les plus fréquentes sont les insulinomes et les gastrinomes.

 

Les principales caractéristiques cliniques et biologiques de ces tumeurs figurent dans le tableau V.

 

1.         Syndrome de Zollinger-Ellison

 

En 1955, Zollinger et Ellison décrivirent l’association d’ulcères gastro-duodénaux rebelles au traitement médical et chirurgical et de tumeurs pancréatiques sécrétant de la gastrine. 60% de ces tumeurs sont localisées dans le pancréas, la muqueuse duodénale étant la deuxième localisation par ordre de fréquence. Plus de 50% d’entre elles sont malignes. Le syndrome ne se présente toutefois pas toujours sous forme d’ulcères à évolution grave. Ce peut être soit un ulcère banal, soit une association d’un ulcère et d’une diarrhée, soit encore une diarrhée isolée.

L’examen endoscopique montre des signes d’hypersécrétion et la présence d’un ou plusieurs ulcères éventuellement à localisation atypique.

 

Le diagnostic est établi par l’étude de la sécrétion gastrique acide (concentration acide basale ³ 100mEq/litre, débit acide basal horaire ³ 15 mEq/heure) et la détermination de la gastrinémie basale (N < 100 pg/ml). Dans les cas douteux, on fait un test à la sécrétine. Cette hormone augmente la gastrinémie en cas de syndrome de Zollinger-Ellison, alors qu’elle la diminue chez les sujets normaux. La scintigraphie à l’octreotide radiomarqué permet la localisation des tumeurs endocrines et de leurs métastases.

 

Lorsque la tumeur est unique et qu’il n’y pas de métastases, l’exérèse chirurgicale s’impose. Lorsqu’une résection curative n’est pas réalisable, un traitement continu par l’oméprazole permet de réduire considérablement la gravité immédiate du syndrome (liée à l’hypersécrétion gastrique acide).

 

2.         Syndrome de Verner et Morrison

 

De très rares cas de diarrhée liquide (cholériforme) associée à de l’achlorhydrie ont été décrits. Ils peuvent s’accompagner d’hyperglycémie, d’hypercalcémie et d’hypokaliémie. Ce syndrome est dû à la libération soit de VIP (Vasoactive Intestinal Polypeptide), soit d’une hormone à action voisine, par une tumeur localisée en général dans le pancréas. L’ablation de la tumeur responsable est suivie d’une guérison.

Lorsque la tumeur n’est pas résécable, certaines possibilités médicales sont actuellement susceptibles de contrôler pour un temps la maladie, en particulier les analogues à longue durée d’action de la somatostatine, tel l’octréotide.

 

3.         Néoplasies endocrines multiples

 

On désigne sous ce nom des maladies héréditaires se caractérisant par la présence de tumeurs se développant en même temps dans plusieurs glandes endocrines le plus souvent les parathyroïdes, le pancréas et l’hypophyse et, mais plus rarement, la thyroïde et la surrénale.

Les processus tumoraux étant multiples et de petite taille, les possibilités chirurgicales curatives sont très faibles.

 

TABLEAU V : TUMEURS ENDOCRINES DU PANCREAS

 

MANIFESTATIONS CLINIQUES

BIOLOGIE

Insulinome

 

Gastrinome

 

 

Vipome

 

 

 

Glucagonome

 

Somatostatinome

 

 

GRFome

 

Ppome

Hypoglycémie 

 

Ulcère + diarrhée

Syndrome de Zollinger-Ellison

 

Diarrhée aqueuse, profuse, hypokaliémie, achlorhydrie

Syndrome de Verner et Morisson

 

Diabète, cachexie

 

Lithiase vésiculaire, diabète, stéatorrhée, achlorhydrie

 

Acromégalie, douleurs abdominales

 

Aucun ou signes locaux de tumeur

Hyperinsulinémie

 

Hypergasrinémie

Hypersécrétion gastrique acide

 

Hypervipémie

 

 

 

Hyperglucagonémie

 

Hypersomatostatinémie

 

 

Augmentation taux GRF

 

Augmentation du taux de PP

 


 

NEUVIEME PARTIE

L' ABDOMEN AIGU

 

 


CHAPITRE I : L’OBSTRUCTION INTESTINALE

I.         ETIOLOGIE

 

ETIOLOGIE DE L’OBSTRUCTION INTESTINALE

1.      CAUSES FREQUENTES

A.     INTESTIN GRELE

Brides (post opératoires)

Hernies (externes)

·        Maladie de Crohn

·        Tumeurs malignes

B.     COLON

Tumeurs malignes

·        Diverticulite sigmoïdienne

·        Fécalome

Volvulus

 

2.      CAUSES RARES

Iléus biliaire

·         Corps étrangers ; Bézoards

·         Parasites intestinaux

·         Tuberculose

·         Cicatrices (post-opératoires, ischémiques, actiniques)

·         Tumeurs extra-digestives

·         Abcès intra-abdominaux

Invagination intestinale

 

Remarque : les étiologies soulignées comportent un risque de nécrose intestinale par compression ou torsion vasculaire

 

II.        MANIFESTATIONS CLINIQUES ET DIAGNOSTIC DU SYNDROME D’OBSTRUCTION INTESTINALE EN GENERAL

 

Les symptômes de l’obstruction intestinale varient suivant le niveau et la nature de l’obstacle. Toutefois, toutes les occlusions ont un certain nombre de symptômes communs. Cet ensemble de symptômes sera décrit sous le nom de « syndrome d’obstruction intestinale en général ».

 

A.        ANAMNESE-

 

Trois signes importants caractérisent le syndrome : (a) la douleur ; (b) les vomissements ; (c) l’arrêt des matières et des gaz.

La douleur est en général d’installation progressive et évolue par crises très intenses séparées par des périodes d’accalmie (douleurs crampoïdes). Elle est, en général, localisée à l’épigastre. Après quelques jours, elle s’atténue (atonie intestinale et péritonite par perforation).

 

Les vomissements sont d’abord alimentaires puis bilieux. Ils deviennent « fécaloïdes » après un certain temps d’évolution. Ils sont d’autant plus précoces que l’obstruction est haute.

 

L’arrêt des gaz précède souvent l’arrêt des matières (vidange du segment intestinal d’aval). Il est d’autant plus précoce que l’obstruction est distale.

 

B.        EXAMEN PHYSIQUE

1.         Aspect général du malade

 

Le patient est agité et se « tord de douleur » lorsque se manifestent les crampes violentes des coliques. Il est abattu entre les crises. Le pouls est souvent accéléré mais la température reste normale, tout au moins au début (dans le cas contraire, penser à une nécrose intestinale).

 

Des symptômes de déshydratation apparaissent précocement à cause de l’importance des vomissements. Par contre, les signes de choc n’apparaissent que tardivement ou en cas de complication.

 

2.         Examen de l’abdomen

a. Inspection

 

Le signe le plus précoce et le plus constant est le ballonnement. Il peut être localisé à la région épigastrique (sténose pylorique ou grêle haute), au centre de l’abdomen (volvulus colique), « en cadre » (obstruction colique basse sans reflux iléal) ou diffus (obstruction grêle).

 

Le péristaltisme intestinal peut être visible à jour frisant à travers la paroi abdominale. La respiration abdominale persiste mais elle est diminuée à cause de la distension.

 

b. Palpation

 

La palpation abdominale est modérément douloureuse. Il n’existe ni contracture, ni hyperesthésie cutanée, ni péritonisme.

Parfois la contraction des anses intestinales est perceptible à travers la paroi.

 

c. Percussion

 

La percussion révèle un tympanisme de l’abdomen, parfois associé à une matité des flans (asicte).

 

d. Auscultation

 

Elle révèle l’un des signes principaux de l’obstruction : l’hyperpéristaltisme. Un clapotis est perçu lorsque l’on secoue le malade (succussion hippocratique).

 

e. Toucher rectal et toucher vaginal

 

Le cul-de-sac de Douglas est parfois empâté mais n’est pas tendu et douloureux comme dans les péritonites. L’ampoule rectale est, en général, vide dans les occlusions grêles ou coliques hautes. Une masse endo- ou exo-rectale peut être palpable.

 

f. Divers

 

Devant un syndrome occlusif, il ne faut jamais oublier d’examiner les régions herniaires et il faut rechercher les cicatrices d’interventions intra-abdominales indiquant l’existence possible de brides post-opératoires.

 

C.        EXAMENS COMPLEMENTAIRES

1.         Imagerie, endoscopie

 

L’examen de l’abdomen sans préparation réalisé en position debout met en évidence la présence de niveau hydro-aériques dans les anses intestinales. L’aspect et la localisation de ces niveaux permettent souvent une localisation, au moins approximative, de la lésion. Quelquefois la nature exacte de l’obstruction peut être établie (iléus biliaire).

 

On ne pratique, en général pas de transit baryté. En cas d’occlusion colique, un lavement baryté et/ou une colonoscopie seront effectués en urgence. Ces examens permettent de localiser et d’identifier l’obstacle.

 

 

2.         Biologie

 

Des troubles biologiques dus soit à la lésion causale, soit aux pertes hydro-électrolytiques (signes d’hémoconcentration, troubles de l’équilibre acide/base) apparaissent.

 

L’élévation progressive de la leucocytose peut indiquer l’évolution vers la strangulation et la gangrène. Une telle élévation n’est cependant pas constante.

 

III.      MANIFESTATIONS CLINIQUES DES SYNDROMES D’OBSTRUCTION INTESTINALE LES PLUS COURANTS

1.         La sténose pylorique

 

Cf. Pathologie de l’estomac.

 

2.         La subocclusion grêle

 

Les causes les plus fréquentes de subocclusion grêle sont les brides adhérentielles, les tumeurs, les infections intra-abdominales cloisonnées et la maladie de Crohn.

 

La subocclusion grêle provoque l’apparition d’une série de symptômes rassemblés sous le terme de syndrome de Koenig. Le malade décrit des crampes abdominales souvent épigastriques qui se terminent par des borborygmes audibles. Les vomissements sont, en général, présents mais ils n’ont pas le caractère récidivant et permanent que l’on observe dans l’occlusion complète. Il n’y a pas d’arrêt des matières et des gaz. L’hyperpéristaltisme présent au moment où le malade ressent des douleurs crampoïdes peut être perçu à la palpation et même parfois à l’inspection.

 

L’abdomen à blanc montre, en général, une distension modérée de quelques anses intestinales. Un transit baryté et/ou une entéroscopie sont réalisés pour localiser l’obstacle et pour en déterminer l’étiologie.

 

3.         L’occlusion grêle complète

 

Les causes les plus fréquentes sont les hernies et les brides adhérentielles post-opératoires. Le tableau clinique comporte la quasi-totalité des signes décrits dans le « syndrome d’obstruction intestinale ».

4.         L’occlusion colique

 

La cause la plus fréquente est le cancer du côlon gauche. Viennent ensuite la diverticulite eet le volvulus. Les douleurs sont souvent moins intenses et ont un caractère moins cyclique que dans l’occlusion grêle. L’arrêt des matières et des gaz est précoce et total. Les vomissements sont tardifs et peu abondants.

 

A l’examen physique, le signe le plus net est, en général, le ballonnement. Celui-ci peut devenir extrêmement intense si la valvule iléo-caecale ne permet pas le reflux des gaz et des liquides coliques dans l’intestin grêle.

 

L’abdomen à blanc permet de différencier l’obstruction colique de l’obstruction grêle. Les larges haustrations coliques se distinguent très facilement des images en « échelle » et en tuyaux d’orgue que réalise la distension du grêle. En cas d’obstruction colique et d’incontinence de la valvule de Bauhin, les images radiologiques d’occlusion grêle et colique coexistent.

 

IV.       TRAITEMENT

 

Les hernies étranglées et les tumeurs malignes occlusives constituent, presque toujours, des indications chirurgicales.

 

Les étiologies suivantes sont, en général, traitées non chirurgicalement : la maladie de Crohn, la diverticulite sigmoïdienne, le fécalome et le volvulus sigmoïdien (voir pathologie du grêle et du côlon).

 

Les occlusinos grêles par brides méritent également un essai de traitement non chirurgical (aspiration gastrique, rééquilibre hydro-électrolytique). Une intervention sera proposée en cas d’apparition de signes de souffrance intestinale ou après 48 heures de traitement non chirurgical inefficace.

 

A.        PREPARATION DU MALADE A L’INTERVENTION

 

La préparation du malade à l’intervention comporte trois éléments principaux : (a) la mise en place d’une aspiration gastrique ou intestinale ; (b) la correction de la volémie et des troubles hydro-électrolytiques ; (c) l’administration d’antibiotiques à large spectre.

 

1.         Aspiration gastrique

 

Une aspiration gastrique doit être placée dès que le diagnostic d’obstruction intestinale est suspecté. Une telle aspiration diminue la distension intestinale ou, tout au moins, évite qu’elle ne s’aggrave. Elle assure également une vidange gastrique et évite la régurgitation de liquide digestif au moment de l’induction de la narcose. Pour arriver à mieux diminuer la distension abdominale, on a proposé l’utilisation de longues sondes jéjunales munies à leur extrémité d’un ballonnet (sonde de Miller-Abbot). Le péristaltisme peut faire progresser ces sondes, jusqu’au niveau de l'occlusion. En pratique, l’utilisation de telles sondes se révèle cependant peu utile. Le franchissement du pylore et la progression de la sonde sont souvent difficiles, voire même impossibles. On soumet donc le malade à des manoeuvres souvent pénibles et inutiles.

 

2.         Correction de la volémie

 

La détermination du pouls, de la tension artérielle, du débit urinaire, de l’hématocrite, du taux de protéines et d’urée, ainsi que l’ionogramme permet d’estimer les pertes liquidiennes et plasmatiques. L’interrogatoire du malade (nature et abondance des vomissements) est également utile. En fonction des renseignements recueillis, on administrera de l’eau, des ions, et, éventuellement des expanseurs du volume plasmatique. La correction de la volémie sera suivie par la détermination régulière de la T.A., de la P.V., du débit urinaire et des constantes biologiques (ionogramme). A titre indicatif, les quantités de liquides nécessaires peuvent être estimées de la manière suivante :

·        Symptômes de choc présents : ± 6 litres.

·        Symptômes de déshydratation nets et absence de chlorure dans les urines : ± 4 litres.

·        Signe de déshydratation modérée et présence de chlorure dans les urines : ± 2 litres.

 

3.         Antibiothérapie

 

Dès le diagnostic d’obstruction posé, il faut administrer des antibiotiques à large spectre. La pratique systématique de cette antibiothérapie a contribué à réduire la mortalité de l’obstruction.

 

B.        TRAITEMENT CHIRURGICAL PROPREMENT DIT

 

Ce traitement dépend de la nature et de la localisation de l’obstacle. D’une manière générale, l’obstruction grêle peut être traitée d’emblée d’une manière définitive (cure de hernie, section de brides adhérentielles, résection d’une lésion sténosante, drainage d’abcès, court-circuitage d’une lésion inextirpable). Par opposition, les lésions coliques obstructives néoplasiques ou inflammatoires seront souvent traitées par la réalisation d’une colostomie en amont de l’obstacle (cf. pathologie du côlon).

 

C.        TRAITEMENT POST-OPERATOIRE

 

L’aspiration gastrique doit être maintenue jusqu’à la reprise d’un transit digestif suffisant. La réhydratation entreprise avant l’intervention sera poursuivie avec controle strict des constantes biologiques.


CHAPITRE II : LES PERITONITES

 

 

Les péritonites généralisées sont, le plus souvent, secondaires à la perforation dans le péritoine d’un viscère creux (ex. : ulcère perforé) ou à l’extension au péritoine d’un processus infectieux frappant le tube digestif (exemple : péritonite appendiculaire). Plus rarement, il n’existe pas de lésion du tube digestif. Ces péritonites sont appelées « primitives ». Les péritonites primitives sont exceptionnelles dans nos régions. Les péritonites secondaires sont au contraire fréquentes.

 

I.         ETIOLOGIE

a.        PERITONITES PRIMITIVES

1.         Péritonites à pneumocoques et à streptocoques

 

Ces lésions surviennent, le plus souvent, chez des enfants de 2 à 10 ans avec une prédominance très nette pour le sexe féminin. La lésion abdominale est parfois précédée d’une infection des voies aériennes supérieures et l’on admet dans ces cas que l’infection péritonéale se fait par voie hématogène. Chez d’autres malades, l’on suppose que la porte d’entrée des germes est le vagin. Ceci expliquerait la prédominance du sexe féminin et le fait que ces lésions s’observent surtout dans les classes les plus pauvres de la population là où les conditions d’hygiène sont les moins satisfaisantes. La moitié des péritonites à pneumocoques survient chez des enfants atteints de syndrome néphrotique.

 

2.         Péritonites tuberculeuses

 

Affections devenues rares depuis la diminution de l’endémie tuberculeuse. Il existe deux formes de péritonite tuberculeuse. La première dite « humide » se manifeste principalement par l’ascite. La seconde, dite « sèche » est caractérisée par le développement d’adhérences et d’abcès cloisonnés.

 

B.        PERITONITES SECONDAIRES

 

TABLEAU II : ETIOLOGIES DES PERITONITES SECONDAIRES

FREQUENTES

RARES

Appendicite aiguë

Cholécystite aiguë

Ulcère gastro-duodénal perforé

Diverticulite sigmoïdienne

Pelvipéritonite

Tumeurs malignes perforées

Maladies inflammatoires perforées

Occlusion intestinale avec nécrose

Diverticulite de Meckel

Traumatismes pénétrants ou fermés

 

 

II.        MANIFESTATIONS CLINIQUES ET DIAGNOSTIC

 

Les symptômes dépendent de l’intensité et de l’étendue de l’infection péritonéale. En cas d’ulcère perforé, le tableau de la péritonite est, en général, complet. Il est plus frustre en cas de péritonite appendiculaire, pelvienne ou colique.

 

A.        INTERROGATOIRE

 

Les symptômes subjectifs sont les mêmes que ceux décrits pour les obstructions : douleurs abdominales, arrêt des matières et des gaz, vomissements. Néanmoins, certaines différences méritent d’être signalées.

 

Le caractère de la douleur est très différent de celui de l’obstruction. En cas de péritonite, la douleur est continue et non pas cyclique. Elle est souvent plus intense au niveau d’un endroit assez précis de l’abdomen. L’arrêt des matières et des gaz est moins constant et plus tardif et les vomissements sont moins abondants que dans l’occlusion grêle.

 

B.        EXAMEN PHYSIQUE

1.         Aspect général du malade

 

Le patient est en général abattu, immobile et angoissé. L’élévation de la température et l’accélération du pouls sont quasi constantes. La déshydratation, si elle existe, est en général modérée. Les symptômes de choc se développent précocement. Dans les péritonites généralisées, florides, les symptômes d’intoxication sont évidents : prostration, teint gris, polypnée et battement des ailes du nez, pouls petit et filant.

 

2.         Examen de l’abdomen

a. Inspection

 

Le ballonnement abdominal peut exister mais il est inconstant. Parfois, l’abdomen est déprimé. La contraction réflexe permanente de la musculature abdominale (contracture) provoque la disparition des mouvements respiratoires de l’abdomen.

 

b. Palpation

 

La palpation prudent permet de recueillir les signes les plus importants du syndrome d’irritation péritonéale.

 

(1)   La contracture et la défense

 

La contracture est une contraction réflexe des muscles de la paroi abdominale en réponse à une irritation du péritoine. Sa présence indique de façon quasi formelle la présence d’une péritonite. La défense est une contraction antalgique des muscles de la paroi abdominale provoqué par la palpation et survenant lorsque celle-ci devient douloureuse. Par rapport à la contracture, la défense est un symptôme moins spécifique mais plus sensible d’irritation péritonéale. Il n’est pas toujours aisé de faire la différence entre contracture et défense. L’examen doit être prudent et progressif.

 

Une palpation trop brutale peut faire apparaître une contraction des muscles de la paroi abdominale en dehors de toute irritation péritonéale. En présence d’une contraction des muscles abdominaux, les signes suivants plaident pour la présence d’une contracture : (a) la contraction est présente même lorsque la palpation est légère ; (b) la contraction persiste même lorsqu’on distrait le malade ; (c) l’inspection a montré une disparition ou une diminution des mouvements respiratoires de l’abdomen.

 

Le ballonnement, la présence d’une ascite abondante ou la présence d’une volumineuse masse abdominale (rétention vésicale, kyste de l’ovaire) peuvent donner à la palpation une impression rappelant la contracture ou la défense.

 

Chez les malades obèses, dénutris, âgés ou en état de choc, il est souvent difficile de mettre en évidence une contracture ou une défense. L’administration d’antalgiques (opiacés) voire même d’antibiotiques peut faire disparaître la contracture ou la défense. Il ne faut jamais administrer ces médicaments lorsqu’il persiste un doute diagnostique.

Contracture et/ou défense peuvent être très marquées et généralisées à tout l’abdomen (ventre de bois de l’ulcère perforé) ou être à peine ébauchées et localisées (appendicite aiguë). L’évolution de la contracture et de la défense tant en intensité qu’en étendue est un témoin fidèle de l’extension du processus d’infection intrapéritonéale.

(2)   Le péritonisme

 

La dépression progressive de l’abdomen suivie d’un relâchement brusque de cette pression provoque en cas de péritonite, une douleur. Comme pour la contracture, ce signe a une intensité maximale à l’endroit de l’irritation péritonéale maximale. Ce symptôme est également appelé signe de rebond (rebound tendernes chez les auteurs anglo-saxons).

 

(3)   La douleur à la palpation profonde

 

Presque toujours présente, elle est cependant moins caractéristique que les signes précédents.

 

(4)   L’hyperesthésie cutanée

 

Les téguments de la paroi abdominale deviennent plus sensibles au pincement et à la piqûre.

 

c. Percussion

 

Il existe parfois une matité de la partie déclive des flancs, témoin de l’existence d’un épanchement intra-abdominal. Dans les péritonites par perforation, la matité hépatique disparaît. Ce signe très évocateur est cependant inconstant.

 

d. Auscultation

 

La péritonite généralisée provoque un iléus paralytique et l’auscultation abdominale montre une diminution ou même une disparition complète du péristaltisme.

 

e. Toucher vaginal et toucher rectal

 

Le toucher vaginal et le toucher rectal doivent être réalisés systématiquement. Ils révèlent très souvent une hypersensibilité de cul-de-sac de Douglas et même parfois un empâtement.

 

C.        EXAMENS COMPLEMENTAIRES

1.         Imagerie

a. Radiographie

 

Un abdomen sans préparation en position debout sera pratiqué. Il révèlera :

·        Une dilatation en général modérée du grêle et du côlon réalisant l’image radiologique dite « en mosaïque ».

·        Parfois à l’un ou l’autre endroit de l’abdomen, une anse grêle est plus dilatée que les autres et prend un aspect en tuyau d’orgue. Désignée sous le nom « d’anse sentinelle », cette image indique souvent la localisation du processus à l’origine de la péritonite (exemple : anse sentinelle de la fosse iliaque droite dans l’appendicite perforée).

·        La présence d’air sous les coupoles diaphragmatiques. Ce signe précieux de perforation viscérale est cependant très inconstant.

 

Tous les examens barytés sont contre-indiqués en cas de suspicion de péritonite généralisée. Chez quelques rares malades, on pratiquera soit un transit oeso-gastro-duodénal, soit un lavement au moyen d’un produit de contraste hydrosoluble (gastrografine).

 

b. Echographie et tomodensitométrie

 

L’échographie et la tomodensitométrie seront pratiquées dans de nombreux cas. Ces examens sont indispensables en cas de suspicion de cholécystite aiguë de diverticulite sigmoïdienne et de pancréatite aiguë.

 

2.         Endoscopie

 

Les endoscopies sont rarement indiquées dans les péritonites.

 

3.         Coelioscopie

 

Ses indications sont devenues très fréquentes depuis l’introduction de la coeliochirurgie.

 

4.         Biologie

 

Il n’y a aucun signe biologique caractéristique de la péritonite généralisée. Les tests inflammatoires et notamment la leucocytose sont en général perturbés. Le dosage des amylases et des lipases sériques est utile dans le diagnostic des pancréatites aiguës. Les pertes liquidiennes et plasmatiques provoquent des troubles de l’ionogramme, des protéines sériques et de l’examen hématologique.

 

III.      TRAITEMENT

 

L’existence d’une péritonite constitue une indication formelle de traitement chirurgical.

 

Les conséquences physiopathologiques de la péritonite sont analogues à celles de l’obstruction intestinale. Avant l’intervention, il convient donc de préparer le malade (aspiration gastrique, réhydratation, antibiothérapie). L’évolution d’une péritonite généralisée étant toujours grave, le délai avant l’intervention sera aussi court que possible.

 

Le traitement chirurgical comporte :

 

1.         Le traitement de la lésion causale

 

Il faut traiter d’emblée la lésion causale (appendicectomie, résection d’une perforation grêle, traitement chirurgical d’un ulcère perforé, etc.).

 

2.         Le nettoyage de la cavité abdominale

 

Le liquide purulent sera aspiré puis le péritoine lavé abondamment avec du sérum physiologique.

 

3.         Le drainage

 

Les péritonites peuvent se compliquer d’abcès localisés résiduels. Pour éviter ces abcès, il faut placer des drains notamment dans les gouttières pariéto-coliques et le cul-de-sac de Douglas.

 

Certaines péritonites graves seront traitées « à péritoine ouvert ». La cavité abdominale ne sera pas fermée et les anses intestinales seront recouvertes par un voile en matériel synthétique. Toutes les 24 heures, la cavité péritonéale sera explorée dans sa totalité et les foyers septiques lavés et drainés. L’abdomen ne sera fermé qu’après stérilisation complète du péritoine.

 

IV.       DIVERS

 

L’administration d’antibiotiques sera poursuivie durant au moins 8 jours.


CHAPITRE III : DIAGNOSTICS DIFFERENTIELS DES DOULEURS ABDOMINALES AIGUES

 

 

Les causes les plus fréquentes de douleurs abdominales aiguës sont les occlusions intestinales et les péritonites. Rappelons toutefois que de nombreux malades présentent des douleurs abdominales aiguës dont l’origine n’est pas établie (douleur abdominale non spécifique : cf. appendicite aiguë).

 

Parmi les autres diagnostics différentiels nous pouvons relever :

 

1)         Affections digestives

·        Ulcère gastro-duodénal non compliqué

·        Colique hépatique

·        Pancréatite aiguë

·        Rupture des muscles abdominaux

·        Entérocolites

 

2)         Affections vasculaires

·                    Anévrisme de l’aorte

·                    Ischémie intestinale

 

3)         Affections urologiques

·        Colique néphrétique

·        Pyélonéphrite, cystite

·        Epididymite / Torsion testiculaire

 

4)         Affections gynécologiques

·                    Douleur à l’ovulation

·                    Grossesse ectopique

·                    Endométriose

·                    Kystes tordus de l’ovaire

 

5)         Affections extra-abdominales

·        Infarctus du myocarde

·        Affections pulmonaires

·        Diabète / Urémie

·        Affections neurologiques (Tabès)

·        Purpura rhumatoïde

·        Fièvre méditerranéenne familiale

·        Drépanocytose.

DIAGNOSTIC DIFFERENTIEL DE LA CONTRACTURE ABDOMINALE

 

La contracture abdominale est un symptôme évoquant l’existence d’une péritonite.

 

Des contractures abdominales peuvent toutefois s’obsrver dans les circonstances suivantes :

·        La présence de sang ou d’urine dans le péritoine après un traumatisme

·        Les hématomes rétro-péritonéaux

·        Certaines lésions vertébro-médullaires

·        Les lésions pulmonaires des bases

·        La rupture spontanée des muscles de la paroi abdominale.

 

DIAGNOSTIC DIFFERENTIEL DES PNEUMOPERITOINES

 

L’existence d’un pneumopéritoine évoque avant tout le diagnostic de perforation d’un organe creux intra-abdominal et principalement les perforations gastriques.

 

Il existe cependant d’autres circonstances au cours desquelles une telle lésion peut être observée. Les plus fréquentes sont la laparotomie et la coelioscopie. Ces pneumopéritoines ne disparaissent souvent qu’après 1 à 3 semaines. Des pneumopéritoines idiopathiques ont été observés. Ils sont plus fréquents chez la femme que chez l’homme. Chez la femme on admet, en général, que l’air a pénétré dans la cavité abdominale par la filière génitale. Chez l’homme, le mécanisme du pneumopéritoine idiopathique est indéterminé.


TABLE DES MATIERES

 

 

SIXIEME PARTIE :  LE FOIE.. 1

CHAPITRE I : INTRODUCTION.. 2

I.     ANATOMIE. 2

A.  ANATOMIE MACROSCOPIQUE.. 2

B.  ANATOMIE MICROSCOPIQUE.. 3

II.    FONCTIONS DU FOIE ET SES ALTERATIONS. 4

A.  LES FONCTIONS METABOLIQUES. 4

1.   Métabolisme des protéines. 5

a. Conditions normales (rappel) 5

b. Conditions pathologiques. 6

2.   Métabolisme des hydrates de carbone. 7

a. Conditions normales (rappel) 7

b. Conditions pathologiques. 7

3.   Métabolisme des lipides. 8

a. Conditions normales (rappel) 8

b. Conditions pathologiques. 8

4.   Métabolisme des vitamines et micronutriments. 10

a. Vitamines hydrosolubles. 10

b. Vitamines liposolubles. 10

c. Les oligo-éléments. 11

B.  LA FONCTION BILIAIRE.. 11

1.   Métabolisme de la bilirubine. 11

a. Origines de la bilirubine. 11

b. Métabolisme normal de la bilirubine. 11

c. Pathologie du métabolisme de la bilirubine. 12

2.   Métabolisme des acides biliaires. 13

a. Métabolisme normal 13

b. Pathologie. 13

3.   La sécrétion biliaire. 14

a. La sécrétion hépatocytaire et  canaliculaire (400 ml/24 heures) 14

b. La sécrétion canalaire (200 ml/24 heures) 14

III.   FOIE ET ALCOOL. 15

A.  CONSIDERATIONS GENERALES. 15

B.  METABOLISME DE L’ALCOOL. 15

1.   Production d’acétaldéhyde. 15

2.   Dégradation de l’acétaldéhyde. 16

C.  FACTEURS RESPONSABLES DES LESIONS HEPATIQUES. 17

1.   L’acétaldéhyde. 17

2.   Production de NADH dans le cytosol 17

3.   Formation d’acétate. 17

4.   Peroxydation lipidique. 18

D.  PERTURBATIONS DU METABOLISME HEPATIQUE.. 18

1.   Métabolisme énergétique. 18

2.   Métabolisme des lipides. 19

3.   Métabolisme des hydrates de carbone. 19

4.   Métabolisme des protéines. 19

5.   Synthèse de collagène. 20

6.   Production de cytokines. 20

7.   Régénération hépatique. 21

8.   Conséquences de l’activité accrue du système microsomal 21

CHAPITRE II : METHODES D’EXPLORATION EN PATHOLOGIE HEPATIQUE.. 22

I.     APPROCHE BIOCHIMIQUE DE LA PATHOLOGIE HEPATIQUE. 22

A.  LES TESTS HEPATIQUES CONVENTIONNELS. 22

1.   Indice de captation, conjugaison, et excrétion hépatique. 22

a. Bilirubine et dérivés de la bilirubine. 22

b. Acides biliaires. 22

2.   Indice de lésions hépatocellulaires (Cytolyse) 23

a. Aspartate-(AST) et alanine aminotransferase (ALT) 23

b. Lactate déshydrogénase (LDH) 24

3.   Indice de lésions canalaires ou enzymes de cholestase. 24

a. Phosphatases alcalines (PAL) 24

b. g Glutamyl transférase. 25

c. Leucine aminopeptidase (LAP) et 5’nucleotidase (5’nase) 25

4.   Indice de synthèse hépatique. 26

a. Protéines totales. 26

b. Electrophorèse des protéines. 26

c. Albumine et g globulines sériques. 26

d. Préalbumine. 26

e. Immunoglobulines. 26

f. Temps de prothrombine (PT) et dosage du facteur V.. 26

g. Cholinestérase. 27

h. Cholestérol sérique. 27

B.  LES TESTS QUANTITATIFS EXOGENES. 27

1.   Principes. 27

2.   Valeur clinique des tests exogènes. 28

a. Indice diagnostique. 28

b. Indice de sévérité et pronostic de la cirrhose. 28

II.    L’IMAGERIE. 28

A.  L’ECHOTOMOGRAPHIE.. 28

B.  LA TOMODENSITOMETRIE.. 28

C.  LA RESONANCE MAGNETIQUE.. 28

D.  LA CHOLANGIO-PANCREATOGRAPHIE ENDOSCOPIQUE ET LA CHOLANGIO-GRAPHIE TRANSPARIETALE   29

E.  L’ANGIOGRAPHIE.. 29

III.   LA LAPARO(COELIO)SCOPIE. 29

IV.   LA BIOPSIE HEPATIQUE ET LA CYTOPONCTION.. 30

CHAPITRE III : MANIFESTATIONS CLINIQUES : LES GRANDS SYNDROMES. 31

I.     L’INSUFFISANCE HEPATIQUE. 31

A.  L’INSUFFISANCE HEPATIQUE CHRONIQUE.. 31

1.   Asthénie et malnutrition. 32

2.   Ictère. 32

3.   Encéphalopathie. 32

a. Définition. 32

b. Pathogénie. 33

c. Manifestations cliniques. 33

d. Diagnostic paraclinique. 34

e. Diagnostic différentiel 34

f. Traitement 35

4.   Ascite. 35

5.   Syndrome hépato-rénal 35

6.   Manifestations cutanées. 36

a. Angiomes stellaires. 36

b. Erythème palmaire. 36

7.   Signes endocriniens. 36

8.   Troubles hématologiques. 36

9.   Altérations cardio-vasculaires et pulmonaires. 37

a. Cardio-vasculaires. 37

b. Pulmonaires. 37

10. Sensibilité aux infections. 38

B.  INSUFFISANCE HEPATIQUE AIGUE SEVERE.. 38

1.   Manifestations cliniques. 38

a. Ictère. 39

b. Encéphalopathie. 39

c. Coagulopathie. 39

d. Autres manifestations. 39

2.   Traitement 39

II.    LA CHOLOSTASE. 40

A.  ANATOMOPATHOLOGIE.. 40

1.   Cholostase obstructive (extra ou intra-hépatique) 40

2.   Cholostase non obstructive. 41

B.  CLASSIFICATION ET ETIOLOGIE.. 41

1.   La cholostase obstructive extra-hépatique. 41

2.   La cholostase obstructive intra-hépatique. 41

3.   La cholostase non obstructive. 41

C.  MANIFESTATIONS CLINIQUES. 41

1.   Ictère. 42

2.   Prurit 43

3.   Malabsorption. 43

D.  LOCALISATION DE LA CHOLOSTASE.. 43

E.  TRAITEMENT. 44

1.   Traitement de la cause de cholostase. 44

2.   Traitement des conséquences de cholostase. 44

a. Diététique et carences vitaminiques. 44

b. Carence calcique. 44

c. Prurit 44

III.   L’HYPERTENSION PORTALE. 44

A.  ETIOLOGIE.. 45

1.   Les blocs infrahépatiques. 46

2.   Les blocs hépatiques. 47

3.   Les blocs supra-hépatiques. 47

4.   L’excès de flux sanguin portal 47

B.  MANIFESTATIONS CLINIQUES. 47

1.   La circulation collatérale. 47

a. Dérivation supérieure. 47

b. Dérivation antérieure. 48

c. Dérivation inférieure. 48

d. Dérivation postérieure. 48

2.   L’ascite. 48

3.   L’encéphalopathie. 48

4.   La splénomégalie. 48

5.   La gastropathie hypertensive. 49

C.  DIAGNOSTIC.. 49

1.   Endoscopie. 49

2.   Imagerie. 49

3.   Mesure de la pression portale. 49

4.   Visualisation radiologique de la circulation portale. 50

D.  TRAITEMENT. 50

1.   Prévention primaire. 50

2.   Traitement de l’hémorragie aiguë. 50

a) Réanimation. 50

b) Drogues vasoactives. 51

c) Traitement endoscopique. 51

3.   Prévention de la récidive hémorragique. 51

4.   Hémorragie réfractaire ou récidivante malgré les drogues vasoactives et le traitement endoscopique. 52

a) Le shunt porto-cave par voie transjugulaire en cas de cirrhose Child B ou C.. 52

b) Traitement chirurgical : en cas de cirrhose Child A.. 52

IV.   L’ASCITE. 53

A.  PATHOGENIE.. 53

B.  MANIFESTATIONS CLINIQUES. 54

C.  DIAGNOSTIC.. 54

D.  TRAITEMENT. 55

1.   Traitement médical 55

2.   Complications du traitement médical 57

3.   Ascite réfractaire. 57

CHAPITRE IV : LES HEPATITES VIRALES. 58

I.     ANATOMOPATHOLOGIE. 58

A.  HEPATITES AIGUES. 58

B.  HEPATITE FULMINANTE.. 59

C.  HEPATITES CHRONIQUES. 59

1.   Hépatites chroniques en général 59

2.   Aspect particulier aux hépatites B et C.. 60

D.  CIRRHOSE POST NECROTIQUE.. 60

II.    EPIDEMIOLOGIE ET EVOLUTION SEROLOGIQUE. 60

A.  VIRUS A (Virus à ARN). 60

B.  VIRUS B (Virus à ADN). 61

C.  VIRUS d (virus à ARN). 63

D.  VIRUS C (virus à ARN). 63

E.  VIRUS E.. 64

F.  VIRUS G.. 64

G.  AUTRES VIRUS. 65

1.   Mononucléose infectieuse (EBV) 65

2.   Cytomégalovirus (CMV) 65

3.   Fièvre jaune. 65

III.   MANIFESTATIONS CLINIQUES. 66

1.   Phase pré-ictèrique. 66

2.   Phase ictérique. 66

3.   Phase post-ictérique. 66

IV.   DIAGNOSTIC BIOLOGIQUE. 67

V.    EVOLUTION ET PRONOSTIC.. 67

A.  PORTEURS SAINS. 68

B.  HEPATITE CHRONIQUE.. 68

C.  CIRRHOSE HEPATIQUE.. 70

D.  HEPATOCARCINOME.. 70

VI.   TRAITEMENT.. 70

A.  MESURES GENERALES. 70

B.  MEDICAMENTS. 71

1.   Hépatite aiguë. 71

2.   Hépatite chronique. 71

VII.  PREVENTION.. 72

A.  MESURES D’HYGIENE.. 72

B.  IMMUNOGLOBULINES ET VACCINATION.. 73

1.   Hépatite A.. 73

2.   Hépatite B.. 73

CHAPITRE V : LES HEPATITES TOXIQUES ET MEDICAMENTEUSES. 74

I.     LES HEPATITES TOXIQUES. 74

A.  L’ALCOOL. 74

B.  L’AMANITE PHALLOIDE.. 74

C.  LES SOLVANTS INDUSTRIELS. 75

II.    LES HEPATITES MEDICAMENTEUSES. 75

CHAPITRE VI : LES STEATOSES ET LES STEATOHEPATITES. 77

I.     ALCOOLIQUES. 77

A.  HISTOIRE NATURELLE DU FOIE ALCOOLIQUE.. 77

B.  ANATOMOPATHOLOGIE.. 77

1.   La stéatose et la stéato-fibrose. 77

2.   L’hépatite alcoolique. 78

3.   La cirrhose alcoolique. 78

C.  MANIFESTATIONS CLINIQUES, DIAGNOSTIC, TRAITEMENT. 79

1.   La stéatose. 79

2.   L’hépatite alcoolique. 79

II.    NON ALCOOLIQUES. 80

1.   Forme macrovacuolaire. 80

2.   Forme microvacuolaire. 80

CHAPITRE VII : PATHOLOGIE HEPATIQUE AUTO-IMMUNE.. 82

I.     LES HEPATITES AUTO-IMMUNES. 82

II.    LA CIRRHOSE BILIAIRE PRIMITIVE. 83

III.   LA CHOLANGITE SCLEROSANTE PRIMITIVE. 84

CHAPITRE VIII : PATHOLOGIES HEPATIQUES METABOLIQUES ET GENETIQUES. 85

I.     L’HEMOCHROMATOSE. 85

II.    LA DEFICIENCE HEREDITAIRE EN ALPHA-1 ANTITRYPSINE. 86

III.   LA MALADIE DE WILSON.. 86

IV.   TROUBLES GENETIQUES DU METABOLISME DE LA BILIRUBINE. 87

1.   La maladie de GILBERT.. 87

2.   Maladie de DUBIN-JOHNSON.. 87

3.   Maladie de ROTOR.. 87

CHAPITRE IX : PATHOLOGIES HEPATIQUES VASCULAIRES. 88

I.     LE FOIE CARDIAQUE. 88

II.    LE SYNDROME DE BUDD-CHIARI 88

III.   LA MALADIE VEINO-OCCLUSIVE. 89

IV.   LA PELIOSE HEPATIQUE. 89

CHAPITRE X : LES CIRRHOSES. 90

I.     ANATOMOPATHOLOGIE. 90

II.    ETIOLOGIE ET CLASSIFICATION.. 91

III.   MANIFESTATIONS CLINIQUES ET DIAGNOSTIC.. 91

A.  STADE COMPENSE.. 91

B.  STADE DECOMPENSE.. 92

IV.   TRAITEMENT.. 92

V.    PRONOSTIC.. 93

CHAPITRE XI : ABCES, KYSTES ET TUMEURS HEPATIQUES. 94

I.     LES ABCES HEPATIQUES. 94

A.  LES ABCES A PYOGENES. 94

1.   Etiologie. 94

2.   Manifestations cliniques et diagnostic. 94

3.   Traitement 95

B.  LES ABCES AMIBIENS. 95

1.   Etiologie. 95

2.   Manifestations cliniques et diagnostic. 95

3.   Traitement 96

II.    LES KYSTES HYDATIQUES. 96

1.   Manifestations cliniques. 96

2.   Diagnostic. 97

3.   Traitement 97

a. Destruction des scolex. 97

b. Elimination du kyste. 97

III.   LES TUMEURS HEPATIQUES. 97

A.  LES KYSTES NON PARASITAIRES. 98

1.   Kystes simples. 98

2.   Maladie polykystique. 98

B.  L’HEMANGIOME DU FOIE.. 98

C.  L’ADENOME HEPATIQUE.. 99

D.  L’HYPERPLASIE NODULAIRE FOCALE.. 99

E.  LES TUMEURS MALIGNES PRIMITIVES. 100

1.   Anatomopathologie. 100

2.   Epidémiologie et étiologie. 100

3.   Manifestations cliniques. 101

4.   Diagnostic. 101

5.   Traitement 101

F.  LES TUMEURS MALIGNES SECONDAIRES. 102

CHAPITRE XII : LA CHIRURGIE HEPATIQUE.. 103

I.     LES RESECTIONS HEPATIQUES. 103

II.    LES DERIVATIONS BILIAIRES. 104

III.   LA TRANSPLANTATION HEPATIQUE. 104

1.   Indications en fonction d'un syndrome clinique. 104

2.   Insuffisance hépatique globale terminale. 105

a. Fulminante aiguë ou subaiguë. 105

b. Chronique. 105

3.   Insuffisance hépatique sélective. 105

4.   Tumeurs ou pseudotumeurs irrésécables. 106

5.   Techniques chirurgicales. 106

SEPTIEME PARTIE :  LES VOIES BILIAIRES. 108

CHAPITRE I : GENERALITES. 109

I.     MANIFESTATIONS CLINIQUES. 109

1.   La colique biliaire. 109

2.   L’ictère. 109

3.   L’hémobilie. 110

4.   La dyspepsie. 110

II.    METHODES D’EXPLORATION.. 111

1.   L’échographie et la tomodensitométrie. 111

2.   Les autres examens radiographiques. 111

a. L’abdomen sans préparation (abdomen à blanc) 111

b. La cholécystographie orale. 111

c. La cholangiographie directe. 111

d. La cholangio-IRM... 113

e. L’angiographie. 113

f. La cholangiographie intra-veineuse. 113

g. Le bili-scan. 113

CHAPITRE II : LA LITHIASE BILIAIRE.. 114

I.     PATHOGENIE. 114

A.  COMPOSITION DES CALCULS BILIAIRES. 114

B.  MECANISMES DE LA FORMATION DES CALCULS. 114

1.   Calculs cholestéroliques. 114

a. Composition lipidique de la bile. 114

b. Stades de la formation des calculs. 115

c. Facteurs de risque des calculs cholestéroliques. 116

2.   Calculs pigmentaires. 117

3.   Boue biliaire (ou « sludge ») 118

4.   Lithiase médicamenteuse. 118

II.    MANIFESTATIONS CLINIQUES. 118

1.   La lithiase vésiculaire simple. 118

2.   La cholécystite chronique. 119

3.   La cholécystite aiguë. 119

4.   La lithiase cholédocienne. 121

5.   L’iléus biliaire. 121

6.   La pancréatite aiguë. 121

7.   L’hydrops vésiculaire. 122

8.   La lithiase intrahépatique. 122

9.   Le syndrome de MIRIZZI 122

III.   TRAITEMENT.. 123

1.   La lithiase vésiculaire asymptomatique. 123

2.   La lithiase vésiculaire symptomatique. 123

a. La cholécystectomie. 123

b. L’acide chénodéoxycholique et l’acide ursodéoxycholique. 124

c. La lithotritie extra-corporelle. 125

3.   La cholécystite aiguë. 125

4.   La lithiase cholédocienne. 125

5.   L’iléus biliaire. 126

CHAPITRE III : LES TUMEURS DES VOIES BILIAIRES. 127

I.     TUMEURS BENIGNES. 127

II.    TUMEURS MALIGNES. 127

A.  ANATOMOPATHOLOGIE, MANIFESTATIONS CLINIQUES ET DIAGNOSTIC.. 127

1.   Vésicule biliaire. 127

2.   Voie biliaire principale. 128

3.   Carcinome de l’ampoule de Vater 128

B.  TRAITEMENT. 128

1.   A visée curative. 128

2.   A visée palliative. 129

HUITIEME PARTIE :  LE PANCREAS. 130

CHAPITRE I : GENERALITES. 131

I.     MANIFESTATIONS CLINIQUES. 131

1.   La douleur pancréatique. 131

2.   L’ictère. 131

3.   La sténose duodénale. 131

4.   La stéatorrhée et le diabète. 131

II.    METHODES D’EXPLORATION.. 132

A.  ETUDE ANATOMIQUE.. 132

B.  ETUDE BIOLOGIQUE.. 132

1.   Enzymes sériques. 132

a. Amylase. 132

b. Lipase. 133

2.   Exploration fonctionnelle. 133

a. Tubage duodénal ou pancréatique sélectif 133

b. CPRM après injection IV de secrétine. 133

CHAPITRE II : LES PANCREATITES. 134

I.     LES PANCREATITES AIGUES. 134

A.  ANATOMOPATHOLOGIE.. 134

1.   Les PA oedémateuses. 134

2.   Les PA nécrotico-hémorragiques. 134

b.   ETIOLOGIE.. 135

1.   Lithiase biliaire. 135

2.   Alcoolisme chronique. 135

3.   Causes rares. 135

C.  PHYSIO-PATHOLOGIE.. 136

D.  MANIFESTATIONS CLINIQUES. 136

E.  COMPLICATIONS. 137

F.  DIAGNOSTIC.. 138

1.   Biologie. 138

2.   Imagerie. 138

G.  PRONOSTIC.. 139

H.  TRAITEMENT. 140

II.    LES PANCREATITES CHRONIQUES. 142

a.   ANATOMOPATHOLOGIE.. 142

1.   La pancréatite chronique calcifiante. 142

2.   La pancréatite chronique obstructive. 142

B.  ETIOLOGIE ET HISTOIRE NATURELLE.. 142

1.   Alcoolisme chronique. 142

2.   Pancréatite chronique tropicale. 143

3.   Pancréatite chronique héréditaire ou familiale. 143

4.   Pancréatite chronique auto-immune. 143

5.   Pancréatite idiopathique. 144

C.  PHYSIOPATHOLOGIE.. 144

D.  MANIFESTATIONS CLINIQUES. 145

E.  COMPLICATIONS. 146

1.   La cholestase. 146

2.   Les pseudo-kystes. 146

3.   La sténose duodénale. 146

4.   Lésions associées. 147

F.  DIAGNOSTIC.. 147

1.   Biologie et exploration fonctionnelle. 147

2.   Imagerie. 147

3.   Endoscopie. 148

a. La cholangiopancrétographie endoscopique (CPE) 148

b. L’écho-endoscopie. 149

G.  TRAITEMENT. 149

1.   Traitement médical 149

2.   Traitement chirurgical 150

a. Drainage du canal de Wirsung. 150

b. Kysto-entérostomies. 151

c. Traitement de la cholostase et de la sténose duodénale. 151

d. Opérations combinées. 151

e. Résections pancréatiques. 151

3.   Traitement endoscopique. 151

4.   La lithotritie extracorporelle. 152

5.   L’infiltration du plexus coeliaque. 152

CHAPITRE III : LES TUMEURS. 153

I.     ANATOMOPATHOLOGIE. 153

A.  LES TUMEURS EXOCRINES. 153

1.   Les tumeurs kystiques. 153

a. Les cystadénomes  séreux. 153

b. Les tumeurs kystiques mucineuses. 153

c. Les tumeurs papillaires intracanalaires mucosécrétantes. 154

2.   Les adénocarcinomes. 154

B.  LES TUMEURS ENDOCRINES. 154

II.    L’ADENOCARCINOME. 154

1.   Epidémiologie. 154

2.   Manifestations cliniques. 155

3.   Diagnostic. 155

4.   Traitement 156

a. Traitement à visée curative. 156

b. Traitement palliatif 158

5.   Pronostic. 158

III.   LES CYSTADENOMES ET LES CYSTADENOCARCINOMES. 159

IV.   LES TUMEURS ENDOCRINES. 159

1.   Syndrome de Zollinger-Ellison. 159

2.   Syndrome de Verner et Morrison. 160

3.   Néoplasies endocrines multiples. 160

NEUVIEME PARTIE  L' ABDOMEN AIGU.. 162

CHAPITRE I : L’OBSTRUCTION INTESTINALE.. 163

I.     ETIOLOGIE. 163

II.    MANIFESTATIONS CLINIQUES ET DIAGNOSTIC DU SYNDROME D’OBSTRUCTION INTESTINALE EN GENERAL  163

A.  ANAMNESE- 164

B.  EXAMEN PHYSIQUE.. 164

1.   Aspect général du malade. 164

2.   Examen de l’abdomen. 164

a. Inspection. 164

b. Palpation. 165

c. Percussion. 165

d. Auscultation. 165

e. Toucher rectal et toucher vaginal 165

f. Divers. 165

C.  EXAMENS COMPLEMENTAIRES. 165

1.   Imagerie, endoscopie. 165

2.   Biologie. 166

III.   MANIFESTATIONS CLINIQUES DES SYNDROMES D’OBSTRUCTION INTESTINALE LES PLUS COURANTS  166

1.   La sténose pylorique. 166

2.   La subocclusion grêle. 166

3.   L’occlusion grêle complète. 166

4.   L’occlusion colique. 167

IV.   TRAITEMENT.. 167

A.  PREPARATION DU MALADE A L’INTERVENTION.. 167

1.   Aspiration gastrique. 168

2.   Correction de la volémie. 168

3.   Antibiothérapie. 168

B.  TRAITEMENT CHIRURGICAL PROPREMENT DIT. 168

C.  TRAITEMENT POST-OPERATOIRE.. 169

CHAPITRE II : LES PERITONITES. 170

I.     ETIOLOGIE. 170

a.   PERITONITES PRIMITIVES. 170

1.   Péritonites à pneumocoques et à streptocoques. 170

2.   Péritonites tuberculeuses. 170

B.  PERITONITES SECONDAIRES. 171

II.    MANIFESTATIONS CLINIQUES ET DIAGNOSTIC.. 171

A.  INTERROGATOIRE.. 171

B.  EXAMEN PHYSIQUE.. 171

1.   Aspect général du malade. 171

2.   Examen de l’abdomen. 172

a. Inspection. 172

b. Palpation. 172

c. Percussion. 173

d. Auscultation. 173

e. Toucher vaginal et toucher rectal 173

C.  EXAMENS COMPLEMENTAIRES. 173

1.   Imagerie. 173

a. Radiographie. 173

b. Echographie et tomodensitométrie. 174

2.   Endoscopie. 174

3.   Coelioscopie. 174

4.   Biologie. 174

III.   TRAITEMENT.. 174

1.   Le traitement de la lésion causale. 175

2.   Le nettoyage de la cavité abdominale. 175

3.   Le drainage. 175

IV.   DIVERS. 175

CHAPITRE III : DIAGNOSTICS DIFFERENTIELS DES DOULEURS ABDOMINALES AIGUES  176

DIAGNOSTIC DIFFERENTIEL DE LA CONTRACTURE ABDOMINALE. 177

DIAGNOSTIC DIFFERENTIEL DES PNEUMOPERITOINES. 177